T-2201-72
Charles Perrault (Demandeur)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Walsh—
Montréal, le 7 novembre 1975; Ottawa, le 24
décembre 1975.
Impôt sur le revenu—Calcul du revenu—Dividendes—La
défenderesse ajoute $350,005.50 au revenu du demandeur à
titre d'avantage que lui aurait payé une compagnie dont il était
l'actionnaire principal et majoritaire—Motif—Exception
applicable à la liquidation—A-t-on agi suivant les instruc
tions du demandeur ou avec son consentement—Loi de l'impôt
sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148, art. 6(1), 8(1), 16(1), 137(2)
et ses modifications—Code civil de la province de Québec, art.
1472—Loi des compagnies de Québec, S.R.Q. 1964, c. 271, art.
68.
Le demandeur possédait 273 actions de la M Limited et avait
offert d'acheter les 24 actions d'un certain N. On a déclaré un
dividende de $1,813.50 par action, auquel le demandeur a
renoncé et qui n'a été touché que par la CMS, détentrice de 193
actions. Le demandeur avait auparavant proposé d'acheter les
193 actions détenues par la CMS; la succession R, qui dominait
la CMS, avait accepté l'offre. Cependant, personne n'a signé au
nom de la CMS. Le dividende a été déposé au compte de la
succession R; la CMS l'a fait figurer dans sa déclaration
d'impôt de 1965. La défenderesse, s'appuyant sur les articles
6(1), 8(1), 16(1) et 137(2) affirme qu'elle a ajouté la somme de
$350,005.50 au revenu du demandeur à titre d'avantage qui lui
aurait été payé par la M, dont il était l'actionnaire principal et
majoritaire. L'argument complémentaire avancé par la défen-
deresse, fondé sur l'article 6(1)a)(1), veut que le demandeur ait
reçu un dividende qui aurait dû être inclus dans le calcul de son
revenu parce que ce dernier détenait les actions achetées à la
CMS à l'époque où a été déclaré le dividende. Le demandeur
allègue que la déclaration de dividende ne devait profiter qu'à
la succession R et qu'il ne voulait pas acquérir les actions
additionnelles de la CMS.
Arrêt: l'action est rejetée. Quant à l'argument complémen-
taire avancé par la défenderesse, l'article 1472 du Code civil
exige le consentement des parties; la CMS n'a jamais légale-
ment donné son consentement au transfert. L'inscription au
registre des transferts se fit après la déclaration du dividende.
Si elle ne l'avait pas été, la renonciation du demandeur aurait
également valu pour ces actions. Le dividende a été payé à la
CMS et cette dernière l'a porté à sa déclaration d'impôt. On ne
l'a pas considéré comme payé au demandeur et sa cotisation ne
peut être fondée sur sa renonciation. Peu importe le but princi
pal, le demandeur doit en accepter les conséquences. Le deman-
deur ne peut se prévaloir de l'exception s'appliquant à la
liquidation contenue à l'article 8(1)b)(1) car la compagnie était
encore activement exploitée à l'époque où a été déclaré et payé
le dividende. Quant à l'article 16(1), il est clair que le deman-
deur dominait la compagnie et était en mesure de donner des
«instructions■ aux administrateurs. On a certainement agi avec
son «consentement■. Peu importe qui devait bénéficier de
l'avantage. Bien que l'article 137(2) soit peut-être applicable,
mieux vaut recourir à l'article 16(1). Il faudrait interpréter
l'article 137(2) de façon très large pour considérer la déclara-
tion d'un dividende comme une «opération» profitant au deman-
deur même si la CMS a reçu le dividende. Rien n'indique que le
demandeur n'ait pas réellement joui d'un avantage en acqué-
rant les actions additionnelles sans les payer personnellement.
Arrêt examiné: Robwaral Limited c. M.R.N. [1960]
C.T.C. 16. Arrêts appliqués: M.R.N. c. La succession
Merritt [1969] 2 R.C.É. 51; M.R.N. c. Bisson 72 DTC
6374 et M.R.N. c. Dufresne [1967] 2 R.C.É. 128. Distinc
tion établie avec l'arrêt: M.R.N. c. Bronfman [1966]
R.C.É. 172.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu.
AVOCATS:
P. Vineberg pour le demandeur.
A. Garon et R. Roy pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Phillips & Vineberg, Montréal, pour le
demandeur.
Le sous-procureur général du Canada pour la
défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement rendus par
LE JUGE WALSH: Il s'agit d'un appel contre la
cotisation établie par la défenderesse ajoutant la
somme de $350,005.50 au revenu du demandeur
pour l'année d'imposition 1965 titre d'avantage
qui lui aurait été payé par une compagnie, la
Montreal Terra Cotta Limited, dont il était l'ac-
tionnaire principal et majoritaire, en vertu des
dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu en
vigueur à cette époque'. Au moment de la déclara-
tion du dividende, le 15 novembre 1965, il possé-
dait 273 actions ordinaires de ladite compagnie, un
certain Oskar Nômm en détenait 24 et la Central
Motor Sales Ltd., une compagnie dominée par la
succession de A. H. Rocheleau, à laquelle le
demandeur n'était aucunement intéressé, était pro-
priétaire du reste, à savoir 193 actions, ce qui
portait le total à 490 actions. Le 11 novembre
1965 Oskar Nômm avait accepté de vendre ses 24
actions au demandeur Charles Perrault au prix de
$50,000 payable avec intérêt en trois ans, du 1°r
janvier 1966, lequel prix la Montreal Terra Cotta
Limited a acquitté intégralement par chèque en
S.R.C. 1952, c. 148 et ses modifications.
date du 30 décembre 1965 qui aurait été tiré au
compte de Perrault. Apparemment le 11 novembre
1965 on n'avait pas encore inscrit dans les livres de
la compagnie le transfert desdites actions, puisque
Oskar Nômm assistait ce jour-là à une réunion du
conseil d'administration, ainsi qu'en témoigne le
procès-verbal. Au cours de cette réunion, on a
déclaré et inscrit au procès-verbal un dividende de
$1,813.50 par action, ainsi que des lettres prove-
nant de Perrault et Nômm dans lesquelles ces
derniers renonçaient audit dividende, de sorte que
seule la Central Motor Sales Ltd. a touché le
dividende sur ses 193 actions, soit $350,005.50.
Assez curieusement, il y eut une seconde réunion
du conseil d'administration le même jour, à la
même heure et le procès-verbal mentionne que
Nômm, ayant vendu ses actions à Perrault, n'était
plus actionnaire, c'est pourquoi on l'a remplacé en
qualité d'administrateur. De nouveau, on a déclaré
le dividende auquel Perrault a renoncé. Si l'on
applique le procès-ve'rbal de la réunion, sa renon-
ciation s'étendrait donc à ses propres actions aussi
bien qu'à celles achetées à Nômm. Quoi qu'il en
soit, il est évident que Nômm ne devait toucher
aucun dividende et que Perrault a renoncé à ceux
auxquels il aurait autrement eu droit.
Près de quatre mois plus tôt, le 28 juillet 1965,
on avait conclu un accord sous forme d'une offre
par laquelle Perrault proposait d'acheter les 193
actions ordinaires de la Montreal Terra Cotta
Limited détenues par la Central Motor Sales Ltd.
Cette offre se lit comme suit:
Je, soussigné, offre de me porter acquéreur des 193 actions de
Montreal Terra Cotta Limited détenues par Central Motor
Sales Co. Ltd. pour un dollar et autres valables considérations.
Comme autre considération, si mon offre est acceptée, je
m'engage à faire verser à Central Motor Sales Co. Ltd. la
somme de $350,000 après quoi, les 193 actions de Montreal
Terra Cotta Limited devront m'être livrées dûment endossées.
Cette offre est valable jusqu'au 15 août 1965 midi, date limite
où la succession devra l'accepter en contresignant la présente
lettre. A compter de cette date, la somme de $350,000 devra
être versée dans un délai de 90 jours.
Comme gage de ma bonne foi, j'inclus un chèque de $10,000 à
l'ordre de la succession. Ce chèque devra m'être remis lors de la
fmalisation de la transaction.
La succession de A. H. Rocheleau a accepté l'offre
le 12 août. Cette acceptation a été signée par
Bernadette Rocheleau et Lucien H. Bélair, exécu-
teurs testamentaires, et contresignée et acceptée
par tous les héritiers. Au point de vue juridique, il
faut cependant souligner que personne n'a signé au
nom de la Central Motor Sales Ltd., dont on
vendait les actions, et qu'il n'y eut apparemment
aucune réunion du conseil d'administration de
cette compagnie ni la moindre résolution approu-
vant la vente. Lucien Bélair, C.A., depuis 1932
vérificateur de la Montreal Terra Cotta Limited et
de la compagnie qui l'avait devancée et qui était
également exécuteur de la succession Rocheleau, à
toute fin pratique ne fit aucun cas de la Central
Motor Sales Ltd., laquelle était inactive depuis
quelque temps. Cependant, le chèque représentant
le dividende a été dûment libellé au nom de la
Central Motor Sales Ltd., mais simplement
endossé par Bélair à titre de président aux fins de
dépôt au compte de la succession. La Central
Motor Sales Ltd. a accusé réception du dividende
de $350,000 dans sa déclaration d'impôt pour l'an-
née prenant fin le 31 décembre 1965, ce qui a
réduit son déficit, supérieur à cette somme. Le
Ministre n'a pas mis en doute cette déclaration.
Bélair a témoigné que les ventes de \ la Montreal
Terra Cotta Limited, qui avait des usines à Pointe-
Claire et à Deschaillons dans la province de
Québec, ont commencé à décliner vers 1958 ou
1959 et on a tenté de vendre la compagnie. Roche-
leau a transféré ses actions à la Central Motor
Sales Ltd., une compagnie dont il était le seul
propriétaire en 1959. Il est mort en janvier 1962
après une maladie d'un an. En 1964, on a décidé
de fermer l'usine de la Montreal Terra Cotta
Limited à Pointe-Claire et de vendre la propriété.
L'actif disponible de la compagnie était peu consi-
dérable, ainsi qu'en fait foi le bilan en date du 28
février 1965, indiquant en chiffres ronds, argent
liquide: $4,500; comptes à recevoir: $77,000; arti
cles finis et stock: $382,000; côté débit, il y avait
un emprunt bancaire garanti qui était dû et s'éle-
vait à $271,000 et des comptes à payer se chiffrant
à environ $60,000. A l'automne de 1964, on est
entré en pourparlers en vue de la vente du terrain à
Pointe-Claire, qui se fit le 23 septembre 1965 au
prix de $900,000 dont $450,000 furent payés
comptant. Deux actes de vente étaient en cause,
conclus avec la Elysee Realties Limited et compre-
nant la vente par cette dernière d'environ la moitié
de la propriété à la ville de Pointe-Claire. Les
détails de ces actes importent peu en l'espèce. Les
pourparlers duraient depuis quelque temps déjà,
cependant, et lorsqu'en juillet le demandeur a pro-
posé d'acheter les actions de la Montreal Terra
Cotta Limited, il savait assurément que cette com-
pagnie prévoyait vendre sa propriété, et par consé-
quent qu'elle disposerait prochainement de liquidi-
tés considérables.
Bélair a témoigné ne pas avoir expliqué à Per-
rault de quelle façon il voulait que ce dernier paie
les actions qu'il avait convenu d'acheter. Il avait
envisagé de se prévaloir des dispositions de la Loi
sur les liquidations, nécessitant le consentement
des créanciers, ou encore de réduire le capital de la
Montreal Terra Cotta Limited au moyen de lettres
patentes supplémentaires. Après la vente des biens
immobiliers et d'une partie du stock de marchandi-
ses, l'emprunt bancaire a été réduit considérable-
ment et la banque n'a fait aucune difficulté à
propos de la déclaration du dividende. Bélair a
consulté un avocat qui a approuvé le projet, lequel
a été adopté. Il a témoigné que la succession
Rocheleau, dans une situation financière précaire,
avait besoin d'argent. Il se rendait compte que si
les actionnaires avaient tous approuvé une déclara-
tion de dividende inférieur, le montant qu'aurait
reçu le demandeur Perrault aurait été imposable.
Il aurait évidemment eu droit au dégrèvement
pour dividendes. Il a souligné qu'à l'époque, Per-
rault n'avait pas besoin d'argent liquide et que la
façon dont ils ont procédé avait comme objectif
premier d'apporter des fonds à la succession
Rocheleau.
Dans son témoignage, le demandeur Perrault a
confirmé les dires de Bélair et affirmé qu'il ne
voulait pas acheter les actions des autres actionnai-
res de la Montreal Terra Cotta Limited. Cepen-
dant, il savait que l'argent devant servir à payer les
actions qu'il allait acheter viendrait de la Montreal
Terra Cotta Limited; mais il faisait totalement
confiance à Bélair et comprenait ce qui se passait.
La Montreal Terra Cotta Limited a été liquidée
en 1966 et transformée en une nouvelle compa-
gnie. On a fourni certains éléments de preuve
quant au montant qu'a reçu Perrault à cette
époque et au moment de la liquidation subséquente
des actions de la nouvelle compagnie, mais je
n'estime pas les transactions postérieures pertinen-
tes lorsqu'il s'agit d'établir si la compagnie lui a
accordé un avantage par suite de la déclaration, au
profit de la Central Motor Sales Ltd., du dividende
qui constituait le prix de son achat des actions que
possédait cette compagnie dans la Montreal Terra
Cotta Limited.
La défenderesse, en établissant la cotisation,
s'appuie sur les articles 6(1), 8(1), 16(1) et 137(2)
de la Loi de l'impôt sur le revenu, précitée. Plus
précisément, il semble que les articles 6(1)a) (i),
8(1)b) et l'exception qu'on y apporte au sous-ali-
néa (i), 16(1) et 137(2)a) soient en cause. Ces
articles se lisent comme suit:
6. (1) Sans restreindre la généralité de l'article 3, doivent
être inclus dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une
année d'imposition
a) les montants reçus dans l'année à titre, à compte ou au
lieu de paiement ou en acquittement
(i) de dividendes,
8. (1) Lorsque, dans une année d'imposition,
b) des fonds ou biens d'une corporation ont été affectés de
quelque manière que ce soit à un actionnaire ou à son
avantage, ou
autrement
(i) qu'à l'occasion de la réduction de capital, du rachat
d'actions, ou de la liquidation, cessation ou réorganisation
de son entreprise,
le montant ou valeur en l'espèce est inclus dans le calcul du
revenu de l'actionnaire pour l'année.
16. (1) Un paiement ou transport de biens effectué selon les
instructions du contribuable, ou avec son consentement, à
quelque autre personne à l'avantage du contribuable ou consti-
tuant un avantage que le contribuable a voulu faire conférer à
l'autre personne, doit être inclus dans le calcul du revenu du
contribuable, dans la mesure où il le serait si le paiement ou le
transport lui avait été fait.
137. (2) Lorsqu'une ou plusieurs ventes, échanges, déclara-
tions de fiducie ou autres opérations de quelque nature que ce
soit ont pour résultat qu'une personne confère un avantage à un
contribuable cette personne est censée avoir fait au contribua-
ble un paiement égal au montant de l'avantage conféré,nonobs-
tant la forme ou l'effet juridique des opérations ou le fait
qu'une ou plusieurs autres personnes y aient été également
parties; et, qu'il y ait eu ou non une intention d'éviter ou
d'éluder des impôts prévus par la présente loi, le paiement doit,
selon les circonstances, être
a) inclus dans le calcul du revenu du contribuable pour
l'application de la Partie I.
L'argument complémentaire avancé par la
défenderesse, fondé sur l'article 6(1)a)(i) et selon
lequel le demandeur aurait reçu un dividende de
$350,005.50 qui aurait dû être inclus dans le calcul
de son revenu pour son année d'imposition 1965
peut aisément être réfuté car il prend pour acquis
que le demandeur détenait les actions achetées à la
Central Motor Sales Ltd. à l'époque où a été
déclaré le dividende. On s'est reporté à l'article
1472 du Code civil de la province de Québec, qui
se lit ainsi:
Art. 1472. La vente est un contrat par lequel une personne
donne une chose à une autre, moyennant un prix en argent que
la dernière s'oblige à payer.
Elle est parfaite par le seul consentement des parties, quoique
la chose ne soit pas encore livrée; sujette néanmoins aux
conditions contenues en l'article 1027, et aux règles spéciales
concernant la cession des vaisseaux enregistrés.
En vertu de cet article, le consentement des parties
est requis et il est évident qu'en dépit de toutes les
signatures apposées au document en date du 28
juillet 1965, la Central Motor Sales Ltd., en sa
qualité de propriétaire des actions, n'a jamais léga-
lement donné son consentement. Il faut tenir
compte de cette compagnie, par conséquent le
consentement ne liait que le demandeur et la suc
cession Rocheleau et constituait de la part de cette
dernière un engagement à convaincre la Central
Motor Sales Ltd. de vendre les actions qu'elle
possédait dans la Montreal Terra Cotta Limited
moyennant $350,000, que le demandeur Perrault
acceptait de lui faire payer, «après quoi» (pour
employer les termes mêmes de l'accord) les actions
devaient lui être remises 2 .
De plus, l'article 68(1) de la Loi des compagnies.
de Québec' se lit comme suit:
68. (1) Nul transfert d'actions, s'il n'est effectué par la
vente forcée ou à la suite d'un décret, ordre ou jugement d'une
cour compétente, n'a, jusqu'à ce qu'il soit dûment inscrit sur le
registre des transferts, aucun effet, excepté celui de constater
les droits respectifs des parties au transfert et de rendre le
cessionnaire responsable, dans l'intervalle, conjointement et
solidairement avec le cédant, envers la compagnie et ses
créanciers.
Il n'existe aucune preuve du moment où se fit
l'inscription au registre des transferts de la compa-
gnie mais ce fut sûrement après la déclaration du
2 Il semble que le même raisonnement ne puisse s'appliquer
dans le cas des actions achetées à Oskar Nômm, dont le
consentement, accompagnant la remise des actions, avait appa-
remment été donné le 11 novembre 1965, quoique le paiement
ne devait se faire que bien plus tard.
3 S.R.Q. 1964, c. 271.
dividende. De plus, si on devait sérieusement pré-
tendre que le demandeur était devenu propriétaire
des actions de la Central Motor Sales Ltd. avant la
déclaration du dividende, alors sa renonciation à
celui-ci aurait également valu pour ces actions. On
ne conteste pas que le dividende ait été réellement
payé à, la Central Motor Sales Ltd. et que cette
dernière l'ait porté à sa déclaration d'impôt de
1965, ni que le demandeur n'ait reçu aucun divi-
dende. Enfin, même si, par une fiction quelconque,
on estimait qu'il s'agit d'un dividende payé au
demandeur, il aurait donc fallu, pour que la cotisa-
tion soit conséquente, accorder à Perrault un
dégrèvement pour dividendes à cet égard, ce qui
n'a pas été fait.
La cotisation du demandeur ne peut davantage
être fondée sur sa renonciation au dividende. En
fait, le montant total des dividendes auxquels il a
renoncé quant aux 273 actions ordinaires qu'il
détenait déjà, plus peut-être ceux des 24 actions
additionnelles qu'il a acquises d'Oskar Nômm, si
ce transfert a bien été consigné dans les livres de la
compagnie avant la déclaration du dividende,
aurait été très supérieur à la cotisation de $350,-
005.50, si l'on se rappelle que le dividende avait été
fixé à $1,813.50 par action. La jurisprudence aussi
bien que les règles du Ministère relatives à la
renonciation au dividende ont établi une distinc
tion très nette entre d'une part l'acceptation d'un
dividende accompagné de sa cession à quelqu'un
d'autre, le bénéficiaire initial étant alors imposé, et
d'autre part la renonciation pure et simple au
dividende, qu'elle ait eu lieu avant ou après la
déclaration. (Voir par exemple, Simon's Taxes
D1.111, Robwaral Limited c. M.R.N 4 , et le Bulle
tin d'interprétation n° IT-208 du ministère du
Revenu national, lequel ne lie pas la défenderesse.)
Puisque la déclaration de dividende ne devait
profiter qu'à la succession Rocheleau, en mal de
fonds, et vu que le demandeur lui-même ne voulait
pas acquérir les actions additionnelles de la com-
pagnie que possédait la Central Motor Sales Ltd.,
celui-ci allègue qu'il n'avait aucun intérêt à les
acheter et que, par conséquent, on ne devrait pas
ajouter à son revenu imposable le montant du
dividende. Je ne peux accepter ce raisonnement.
La raison ayant incité le demandeur à conclure
4 [1960] C.T.C. 16.
l'accord du 28 juillet 1965 et persuadé la Montreal
Terra Cotta Limited de déclarer un dividende de
$1,813.50 par action le 15 novembre 1965, auquel
Perrault a renoncé, importe peu, si en fait cette
série d'opérations lui a procuré un avantage.
Même si son but principal était , de rendre service à
la succession Rocheleau, le demandeur doit en
accepter les conséquences, quelles qu'elles soient,
et il ne peut prétendre avoir ignoré la méthode à
laquelle on a recouru. Bélair, qui l'a conçue au
profit de la succession Rocheleau et qui a rédigé
l'accord du 28 juillet 1965, avait aussi été pendant
plusieurs années le vérificateur de la Montreal
Terra Cotta Limited et était en fait temporaire-
ment administrateur de la compagnie au moment
de la déclaration du dividende à la réunion du
conseil d'administration le 15 novembre 1965,
après que Nômm eut été remplacé en qualité
d'administrateur. Dans son témoignage, Perrault a
affirmé avoir totalement confiance en Bélair. Dans
l'affaire M.R.N. c. La succession Merritt 5 , mon
collègue le juge Cattanach a déclaré aux pages
62-63:
[TRADUCTION] Selon moi, le principe fondamental sur lequel se
fonde la présente analyse est le suivant: lorsque les négociations
menées au nom de chacune des deux parties au contrat sont en
fait dirigées par le même «cerveau», on ne peut dire que les
parties traitent à distance. En d'autres termes, lorsque la preuve
révèle que la même personne «dictait» les «conditions de la
transaction» au nom de chacune des deux parties, on ne peut
dire que les parties traitaient à distance.
et de nouveau à la page 63:
[TRADUCTION] Selon moi, il importe peu que l'entente ait été
d'un bout à l'autre l'«invention» de conseillers professionnels.
Elle aurait été sans effet si le défunt n'avait accepté leurs
conseils, adopté le projet et assuré sa réalisation. Peu importe
également qu'il ait jamais complètement saisi les détails du
plan. Il a stipulé les résultats auxquels le projet devait aboutir
et, en fait, il a ordonné la réalisation d'un projet conçu de façon
à produire ce résultat.
Je souscris à cette opinion, qui s'applique égale-
ment en l'espèce.
L'avocat de la défenderesse a fait valoir que,
puisque la compagnie ne disposait que d'environ
$350,000 en espèces pour payer les dividendes, au
lieu de déclarer le dividende de $1,813.50 par
action à la condition qu'il soit versé en entier à la
Central Motor Sales Ltd. au titre de ses 193
actions, on aurait pu déclarer un dividende d'envi-
' [1969] 2 R.C.É. 51.
ron $715 par action, que tous les actionnaires
auraient pu accepter et le demandeur, en sa qualité
de propriétaire de 273 actions ordinaires et des 24
autres achetées à Oskar Nômm (s'il était réelle-
ment le détenteur enregistré de ces actions avant la
déclaration du dividende), aurait reçu $212,355 et
la Central Motor Sales Ltd., $137,995. Perrault
aurait pu alors se servir du dividende perçu pour
effectuer en entier le paiement des actions qu'il
avait convenu d'acheter, et la succession Roche-
leau aurait en définitive reçu à peu près le même
montant que suivant la méthode adoptée. Dans ce ,
cas, il est très douteux que le Ministre, en établis-
sant la cotisation d'impôt du demandeur, aurait
jugé que la somme de $137,995 versée à la Central
Motor Sales Ltd. à titre de dividende était considé-
rée par les parties comme étant un paiement par-
tiel des actions qu'achetait Perrault et, par consé-
quent, constituait pour ce dernier un avantage pro
tanto, puisque assurément la déclaration d'un divi-
dende au profit d'un actionnaire «A» ne serait pas
normalement interprétée comme conférant un
avantage à un autre actionnaire «B» même si, en
fait, le montant du dividende doit être utilisé, en
tout ou en partie, par «B» pour l'achat des actions
de «A». La défenderesse, en affirmant qu'un avan-
tage avait été conféré au demandeur, s'est fondée
sur la renonciation de ce dernier au dividende, ce
qui a permis d'en verser un beaucoup plus élevé à
la Central Motor Sales Ltd., lequel constituait le
paiement total des actions qu'achetait Perrault,
bien qu'en elle-même, la renonciation pure et
simple n'entraîne pas habituellement l'imposition
du montant du dividende auquel a renoncé le
contribuable. Cependant, il ne fait aucun doute
que Bélair et Perrault savaient que si on avait
déclaré un dividende inférieur, que le demandeur
et la Central Motor Sales Ltd. auraient pu accep-
ter, le dividende perçu de cette façon aurait été
imposable. Toutefois, le Ministre ne peut établir
une cotisation selon de simples possibilités; il doit,
ainsi que la Cour, s'appuyer sur les faits et tenir
compte de leur répercussion sur la cotisation fis-
cale des diverses parties intéressées. Il est reconnu
en droit qu'un contribuable peut arranger ses
affaires de façon à éviter l'impôt s'il peut, sans
déroger à la Loi ni aux règles, adopter un procédé
lui permettant de réduire sa cotisation fiscale au
minimum.
Le demandeur a prétendu que de toute façon, si
un avantage lui avait été conféré à titre d'action-
naire, l'exception contenue à l'article 8(1)b)(i)
serait applicable puisqu'on aurait agi ainsi à l'oc-
casion de la «liquidation, cessation ou réorganisa-
tion» des opérations de la compagnie. Je ne peux
accepter cet argument puisque la Montreal Terra
Cotta Limited, bien qu'elle ait disposé de sa pro-
priété de Pointe-Claire, possédait encore des biens
à Deschaillons et était activement exploitée. A la
fin de 1966, elle a été transformée en une autre
compagnie, la Montreal Terra Cotta (1966) Ltée
et, en temps et lieu cette compagnie a pu être
liquidée; assurément, Perrault tentait de vendre
son actif à cette fin, mais à l'époque où a été
déclaré et payé le dividende, il n'y a pas eu liquida
tion, cessation ou réorganisation de la compagnie.
Cette exception ne s'applique donc pas en l'espèce.
Si la cotisation fixée par la défenderesse doit
être maintenue, il faut que ce soit en vertu de
l'article 16(1) ou de l'article 137(2) de la Loi. Les
termes de l'article 16(1) sont très larges. Cet
article s'appliquerait, que le paiement du dividende
ait été effectué «selon les instructions» du contri-
buable ou «avec son consentement». Ce qui, me
semble-t-il écarte l'argument de l'avocat du
demandeur tiré du fait que ce sont les administra-
teurs de la compagnie qui déclarent le dividende et
non les actionnaires. Cette question a été soulevée
dans l'affaire M.R.N. c. Bronfman 6 portant sur
des cadeaux qu'a faits une compagnie à des
parents des administrateurs, notamment des mon-
tants considérables en guise de cadeaux de
mariage à leurs enfants et leurs petits-enfants.
Cependant, les cinq administrateurs ne détenaient
pas la majorité des actions et le juge Dumoulin, en
concluant que tous les actionnaires, et non seule-
ment les administrateurs, devraient être assujettis
à la cotisation fiscale résultant de l'application de
l'article 16(1), a dit à la page 179:
[TRADUCTION] Puisque les actionnaires avaient le droit de
vote, ils auraient pu, l'eussent-ils voulu, s'opposer à la généro-
sité de leurs administrateurs et la repousser au cours de la
réunion annuelle ou autres réunions convoquées à cet effet. Et
naturellement, ils auraient pu agir de façon radicale, destituer
tout le conseil d'administration et le remplacer par des adminis-
trateurs moins prodigues. Par leur abstention ou leur indiffé-
rence continue, ils ont approuvé implicitement le programme de
6 [1966] R.C.É. 172.
largesse de leurs administrateurs et ils auraient dû partager
avec eux, selon le nombre de leurs actions, le fardeau des
impôts que décrète l'article 16(1).
Cependant, les faits en l'espèce sont très différents.
Le demandeur, Charles Perrault, était l'action-
naire majoritaire, avec ou sans les actions qu'il a
achetées à Oskar Nômm. Les seuls autres action-
naires, mise à part la Central Motor Sales Ltd.,
étaient Raymond Corriveau qui ne détenait qu'une
action statutaire et, après la résignation de Nômm,
apparemment Lucien Bélair, qui avait assisté à la
seconde réunion du conseil d'administration le 15
novembre 1965 et déclaré être actionnaire et
admissible à le remplacer à titre d'administrateur,
bien qu'il n'existe aucune preuve d'un transfert
d'action à son -profit ni d'une résolution de la
Central Motor Sales Ltd. le désignant pour la
représenter à titre d'administrateur. Quoi qu'il en
soit, il est très clair que Perrault dominait la
compagnie et était en mesure de donner aux admi-
nistrateurs «instruction» de déclarer le dividende
comme ils le firent. Cela a été fait sans aucun
doute avec son «consentement».
Pour continuer l'analyse de l'article 16(1), il
s'applique que le paiement soit fait «à quelque
autre personne à l'avantage du contribuable» ou
qu'il constitue «un avantage que le contribuable a
voulu faire conférer à l'autre personne». Donc, il
importe peu que l'avantage (s'il y en eut réelle-
ment un) ait bénéficié au demandeur lui-même ou
à la succession Rocheleau qui, en sa qualité d'uni-
que actionnaire de la Central Motor Sales Ltd.,
devait profiter de la déclaration du dividende reçu
par cette compagnie, ainsi qu'en témoigne l'endos-
sement et la cession immédiate à ladite succession
de la totalité du chèque représentant le dividende.
Le juge Pratte a tranché un cas assez semblable
dans l'affaire M.R.N. c. Bisson 7 dans laquelle ce
dernier, l'un des deux actionnaires égaux d'une
compagnie d'autobus, a acquis les actions de l'au-
tre actionnaire, W. T. Thorn, qu'il détenait en
dépôt à titre de sûreté d'un prêt. Un différend à ce
sujet a été réglé lorsque Bisson, en plus de renon-
cer au remboursement du prêt, a convaincu la
compagnie d'employer son ancien associé Thorn et
de lui payer ses services passés et futurs à titre de
conseil de la compagnie. Le juge Pratte a conclu
7 72 DTC 6374.
que les paiements qu'a faits la compagnie confé-
raient un avantage à Bisson en vertu de l'article
16(1) de la Loi, puisqu'ils avaient été effectués
avec son consentement et à son avantage. A la
page 6379, le juge Pratte a déclaré:
[TRADUCTION] De ces faits, on ne peut, à mon avis, tirer
qu'une inférence: c'est que, comme prix de la renonciation à sa
réclamation contre Bisson, Thorn exigeait qu'on lui paie une
somme d'argent que, en fait, la compagnie Transport Urbain de
Hull Ltée lui a payée. En versant à Thorn la somme de $60,000
stipulée au contrat du 13 mai 1953, la compagnie Transport
Urbain de Hull Ltée a donc payé partie du prix que Thorn
exigeait pour renoncer à sa réclamation contre Bisson. Ce
faisant, la compagnie a effectué des paiements à l'avantage de
l'intimé au sens de l'article 16(1), et comme ces paiements ont
été faits avec le concours de l'intimé et qu'ils auraient fait
partie de son revenu s'ils lui avaient été faits directement, j'en
viens à la conclusion qu'ils auraient dû être inclus dans le calcul
du revenu de l'intimé pour les années qui nous intéressent.
On peut se référer également à l'affaire M.R.N.
c. Dufresne 8 dans laquelle une compagnie fami-
liale dont l'intimée était l'actionnaire majoritaire a
accordé deux fois à ses actionnaires le droit de
souscrire à des actions additionnelles ayant une
valeur nominale de $100 l'unité alors que chacune
avait une valeur aux livres de $1,421. L'intimé et
son épouse n'ont pas souscrit mais leurs cinq
enfants l'ont fait. Le Ministre s'est fondé sur l'arti-
cle 137(2), assujettissant l'intimé à l'impôt sur les
dons polir avoir conféré un avantage à ses enfants.
L'intimé a allégué que ce n'était pas lui mais la
compagnie qui avait conféré l'avantage, et que de
toute façon il bénéficiait de l'exemption prévue à
l'article 8(1)c)(iii) suivant lequel aucun avantage
ou bénéfice n'est attribué à un actionnaire par une
corporation si on confère à tous les détenteurs
d'actions ordinaires du capital de la corporation un
droit d'y acheter des actions ordinaires addition-
nelles. Le président Jackett, maintenant juge en
chef, a conclu cependant:
[TRADUCTION] Le Ministre a correctement appliqué l'article
137(2) en assujettissant l'intimé à l'impôt sur les dons. Il
semble clair qu'on supposait de part et d'autre que les opéra-
tions en question conféraient un avantage aux enfants; quoi
qu'il en soit, l'intimé n'a pas mis en doute la justesse d'une telle
supposition. L'avantage accordé consistait en une augmentation
de la part des actions des cinq enfants correspondant à une
réduction des actions de l'intimé. Un tel avantage était le
«résultat» d'une «opération» et l'intimé a attribué l'avantage à
ses enfants. L'intimé avait une influence prépondérante sur le
cours des événements qui nous concernent, puisqu'il était pro
8 67 DTC 5105.
priétaire de presque toutes les actions de la compagnie en même
temps que le chef de la famille. La suite des événements semble
bien indiquer qu'il s'agit d'une série d'opérations commerciales
calculées à l'avance par l'intimé dans le but d'augmenter la part
des enfants dans le capital de la compagnie. L'article 8(1)c)(iii)
n'avait pas pour effet de soustraire l'intimé à l'obligation de
payer l'impôt sur les dons même si cette obligation découlait
d'une série d'opérations ou autres événements, dont l'octroi de
droits par la compagnie à ses actionnaires.
La renonciation au dividende par le demandeur
en l'espèce se rapproche de l'abstention des époux
Dufresne de souscrire aux actions qu'offrait leur
compagnie à une valeur inférieure à la valeur au
livre. Si nous étudions le résultat en l'espèce, la
Montreal Terra Cotta Limited a conféré un avan-
tage au demandeur (à supposer que l'acquisition
d'actions additionnelles constituait réellement un
avantage) de la même façon qu'on a conclu dans
l'affaire Bronfman, précitée, que les paiements
effectués par une compagnie à des tiers attri-
buaient un avantage à un actionnaire qui a incité
la compagnie à faire ces paiements à son profit.
Bien que l'article 137(2) soit peut-être applica
ble et, dans ce cas, ne le serait pas l'exception
contenue à l'article 137(3) 9 vu le rôle qu'a joué
Bélair, qui agissait au nom de toutes' les parties
ainsi qu'on l'a déjà souligné, et que le paiement ait
été fait à l'acquit d'une obligation du demandeur
et non de la compagnie, en l'espèce, je préfère
fonder la cotisation fiscale du demandeur sur l'ar-
ticle 16(1), car il faudrait interpréter l'article
137(2) de façon très large pour considérer la
déclaration d'un dividende comme une «opération»
profitant au demandeur même si la Central Motor
Sales Ltd. a reçu le dividende.
La seule question qu'il reste à trancher est une
question de fait, à savoir «si la série d'opérations
qui aboutit à l'achat par le demandeur des 193
actions de la Montreal Terra Cotta Limited que
détenait la Central Motor Sales Ltd. sans qu'il
paie de sa poche, lui a conféré un `avantage' ou si,
9 137. (3) Lorsqu'il est établi qu'une vente, un échange, ou
autre opération ont été conclus par des personnes traitant à
distance, de bonne foi et non en conformité ou comme partie de
quelque autre opération, non plus que pour effectuer le paie-
ment, en totalité ou en partie, de quelque obligation existante
ou future, aucune partie aux susdits n'est réputée aux fins du
présent article, avoir conféré un avantage à la partie avec
laquelle elle a ainsi traité.
selon le souhait du demandeur, elle a bénéficié à la
succession Rocheleau?»
A première vue, il semblerait que l'acquisition
par un contribuable d'actions additionnelles d'une
compagnie solvable et viable sans qu'il lui en coûte
rien doive être considérée comme lui conférant un
avantage. Cependant, il s'agit peut-être là d'un
raisonnement simpliste. Après le paiement du divi-
dende et le transfert des actions à son nom, Per-
rault détenait 490 actions au lieu de 273, auxquel-
les s'ajoutaient les 24 actions achetées auparavant
à Oskar Nômm. Mais l'actif de la corporation
avait diminué de $350,005.50, soit le montant du
dividende. On peut constater aisément que si les
$350,005.50 avaient représenté tout l'actif le
demandeur, loin de recevoir un avantage, y aurait
perdu, car la propriété de 273 ou même 297 des
490 actions d'une compagnie dont l'actif s'élèverait
à $350,000 serait préférable à la propriété de
toutes les actions d'une compagnie sans actif. D'un
autre côté, même dans ce cas hypothétique, on
aurait pu considérer que le demandeur, en incitant
la compagnie à déclarer un tel dividende et en
renonçant à sa part de sorte que la Central Motor
Sales Ltd. le reçoive en entier, était assujetti à
l'impôt en vertu de l'article 16(1) pour avoir con-
féré indirectement un avantage à la succession
Rocheleau. Par conséquent, il nous faut nous
demander si nous sommes réellement en présence
d'un avantage imposable en vertu des dispositions
de l'article 16(1) de la Loi. On a présenté quelques
éléments de preuve dans le but d'établir suivant le
barème de prix actuel ce qu'a réellement reçu le
demandeur à l'occasion de la réorganisation de la
compagnie en la Montreal Terra Cotta (1966)
Ltée et de la liquidation postérieure de cette der-
nière; c'est aller trop loin. Nous devons considérer
les actions qu'a obtenues Perrault selon leur valeur
au moment de l'acquisition, sans égard aux fluc
tuations de prix résultant des opérations subsé-
quentes de la compagnie ou des dispositions posté-
rieures de propriété.
Le bilan de la Montreal Terra Cotta Limited au
28 février 1965 indiquait un actif propre s'élevant
à $967,779.43 incluant le capital versé de $49,000
et l'excédent de capital de $100,182.07. Par consé-
quent, les 490 actions avaient une valeur compta-
ble légèrement inférieure à $2,000 l'unité. Oskar
Nômm a reçu $50,000 pour les 24 actions que lui a
achetées- le demandeur—un généreux paiement à
un employé de longue date. La somme de
$1,813.50 payée au moyen d'une déclaration de
dividende pour l'achat par le demandeur des
actions de la Central Motor Sales Ltd. semble être
un prix juste et réaliste 10
Après la déclaration et le versement du divi-
dende, le bilan suivant de la compagnie indique
qu'au 28 février 1966, l'actif propre s'élevait à
$1,122,912.14. On ne retrouve plus d'excédent de
capital mais les gains accumulés sont passés de
$818,597.36 $1,073,912.14. Il est évident que le
demandeur étant alors l'unique actionnaire, l'actif
propre, loin d'être diminué, a augmenté.
Par conséquent, rien n'indique que le deman-
deur n'ait pas réellement joui d'un avantage en
acquérant les actions additionnelles sans les payer
personnellement.
Sa cotisation a donc été correctement fixée pour
son année d'imposition 1965 en vertu des disposi
tions de la Loi de l'impôt sur le revenu en vigueur
à l'époque, et son action est rejetée avec dépens.
'o Soulignons toutefois que le demandeur s'est simplement
engagé à «faire verser» à la Central Motor Sales Ltd. la somme
de $350,000. Naturellement, rien dans la déclaration du divi-
dende n'indique que Perrault acquittait ainsi sa dette, mais
toutes les parties semblent avoir présumé que c'était le cas. On
peut se demander ce qui se serait produit si la Central Motor
Sales Ltd., tout en ayant reçu le dividende, dûment déclaré,
avait décidé d'exiger du demandeur le paiement des actions
qu'elle lui avait vendues.
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