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A-399-76
Pierre Piangos (Requérant) c.
Le ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigra- tion (Intimé)
Cour d'appel, les juges Heald et Ryan et le juge suppléant MacKay—Toronto, les 7 et 8 septembre 1976.
Examen judiciaire—Immigration—Pratique—Le requérant a été admis au Canada en qualité de non-immigrant—Rien dans la preuve n'établit la durée du séjour—Il est évident que le requérant avait l'intention de demeurer au Canada de façon permanente—L'appel contre l'ordonnance d'expulsion a été rejeté—Loi sur l'immigration, S.R.C. 1970, c. I-2, art. 18(1)e)(vi) et 18(2) Règlement sur l'immigration, art. 3A(1) —Loi sur la Cour fédérale, art. 28.
Le passeport du requérant a été estampillé le jour de son admission mais il n'y est nulle part fait mention de la durée du séjour. Il est évident que le requérant avait l'intention de demeurer de façon permanente mais il n'a pas demandé l'auto- risation nécessaire et a été le sujet d'une ordonnance d'expulsion.
Arrêt: la demande présentée en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale est rejetée. La conduite du requérant indique son intention de demeurer au Canada aussi longtemps que possible, mais il n'a pas demandé la prorogation de son permis de séjour conformément à l'article 3A(1) du Règlement sur l'immigration. Par conséquent, le requérant est sujet à expulsion.
DEMANDE d'examen judiciaire. AVOCATS:
Le requérant pour lui-même. E. A. Bowie pour l'intimé.
PROCUREURS:
Le requérant pour lui - même.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE HEALD: Après mûre réflexion et quel- ques hésitations, vu les circonstances inhabituelles de cette affaire, je conclus au rejet de cette demande présentée en vertu de l'article 28. Selon le rapport effectué en conformité de l'article 18, qui a donné lieu à l'enquête spéciale, le requérant a été admis au Canada le 25 septembre 1974 en vertu de l'article 7(1)c) (non-immigrant touriste
ou visiteur) jusqu'au 25 décembre 1974. Cepen- dant, rien dans la preuve présentée à l'enquête n'établit la période pour laquelle le requérant a effectivement été admis. Le passeport du requé- rant a été estampillé par un fonctionnaire à l'im- migration le jour de son admission (le 25 septem- bre 1974) mais il n'y est nulle part fait mention de la durée du séjour. Selon le témoignage du requé- rant, seul témoin cité à comparaître à l'enquête, on ne lui a remis aucun document ou papier précisant la durée du séjour. Il nie qu'un fonctionnaire à l'immigration l'ait informé que la durée de son séjour était limitée à une période de trois mois. Il est à mon avis malheureux qu'aucune preuve ne vienne corroborer la prétention qu'un tel avis a été donné au requérant, si c'est le cas.
L'avocat de l'intimé se fonde sur le Règlement 3A(1) de l'immigration aux termes duquel: «Toute personne qui cherche à entrer au Canada en qua- lité de non-immigrant pour une période limitée de plus de trois mois ... doit faire une demande auprès d'un fonctionnaire à l'immigration au port d'entrée, sur un formulaire prescrit pour l'enregis- trement en qualité de non-immigrant, et si, après l'examen fait par un fonctionnaire à l'immigration, il obtient l'entrée pour un temps limité de plus de trois mois, son entrée est enregistrée par le fonc- tionnaire à l'immigration sur le formulaire pres- crit.» L'avocat prétend qu'en l'espèce, puisque le requérant n'a pas demandé son entrée pour un séjour de plus de trois mois, il faut en déduire qu'il n'a été admis que pour une durée de trois mois. De prime abord, je n'étais pas certain que la preuve démontrait que le requérant en l'espèce était une personne «qui cherche à entrer au Canada en qualité de non-immigrant pour une période limitée de plus de trois mois» de façon à le soumettre au Règlement 3A(1). Cependant, après une étude plus approfondie, la preuve me convainc que le requérant est venu au Canada pour y demeurer aussi longtemps que possible et, s'il le pouvait, d'une façon permanente (voir les pp. 14, 15 et 16 de la transcription). Sa conduite subséquente con- firme cette intention car il est ici depuis le 25 septembre 1974. En conséquence, le Règlement 3A(1) s'applique et le requérant devait demander l'autorisation de séjourner pour une période de plus de trois mois, ce qu'il n'a pas fait; il n'a donc pas reçu la permission d'un fonctionnaire à l'immi-
gration pour demeurer au Canada après l'expira- tion de la période de trois mois. Par conséquent, les articles 18(1)e)(vi) et 18(2) de la Loi sur l'immi- gration s'appliquent et le requérant est sujet à expulsion.
Je ne peux terminer ces motifs sans commenter un usage en cours au ministère de l'Immigration, qui consiste à ne pas informer spécifiquement chaque requérant de la durée d'un permis de visi- teur lorsque la période approuvée est de trois mois. Il serait très simple de fournir au fonctionnaire à l'immigration un nouveau tampon pour indiquer clairement sur le passeport de chaque requérant la date d'expiration du permis de visiteur. Si c'était fait, personne ne pourrait prétendre, comme en l'espèce (et le témoignage du requérant n'a pas été contredit), n'avoir jamais été informé de la durée approuvée de son séjour. Si l'on songe que de nombreuses personnes demandant un statut de non-immigrant ne comprennent aucune des lan- gues officielles du Canada, et que, dans bien des cas, elles ne connaissent ni les exigences ni les lois canadiennes, il serait souhaitable que les autorités canadiennes responsables de l'immigration accom- plissent tous les efforts possibles pour que ces requérants comprennent ce qui se passe et pour- quoi. Les fonctionnaires du Ministère devraient s'efforcer d'aider ceux qui demandent à être admis dans notre pays et de les informer de leurs droits, devoirs et obligations en vertu des lois du Canada.
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LE JUGE RYAN: J'y souscris.
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LE JUGE SUPPLÉANT MACKAY: J'y souscris.
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