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T-4268-74
Lawrence H. Mandel (Demandeur)
c.
La Reine (Défenderesse)
Division de première instance, le juge Walsh—
Toronto, les 16, 17 et 18 juin; Ottawa, le 9 août 1976.
Impôt sur le revenu Avis d'opposition contre la nouvelle cotisation—La participation a-t-elle été acquise pendant l'an- née d'imposition afin de réclamer une allocation à l'égard du coût en capital?—Le revenu est-il imposable à titre de revenu d'entreprise régi par les articles 1100(3) et 1102 ou 1104 des Règlements? Le passif est-il éventuel?—Il incombe au con- tribuable de prouver l'invalidité d'une cotisation présumée valide par la loi Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148, version modifiée antérieure aux S.C. 1970-71-72, c. 63, art. 3, 4, 11(1)a), 12(1)a) et 137(1) Règlements de l'impôt sur le revenu, 1100(1)a) et (3), 1102(1)a) et (3), 1102(1)c) et 1104(1)a) et b).
La défenderesse soutient que le demandeur réclame la déduc- tion d'une perte sur les fonds investis dans une société en commandite, perte qui était exclusivement une allocation à l'égard du coût en capital. Une partie de la perte a été refusée parce que la contribution du demandeur au coût en capital était inférieure au total payé, que la société en commandite formée par le demandeur et ses associés pour acheter le film n'était pas engagée directement ni autrement dans une entreprise, et que la société en commandite n'a acheté aucune participation pen dant l'année d'imposition 1971. La défenderesse prétend égale- ment que si une participation dans le film a bien été achetée, elle ne l'a pas été en vue de gagner ou de produire un revenu; que la part supportée par le demandeur dans les pertes de la société en commandite s'est bornée à sa contribution en capital; et que le prétendu achat du film est une transaction fictive effectuée seulement en vue de tourner l'impôt sur les autres revenus du demandeur. Subsidiairement, la défenderesse fait valoir que si le film a été acheté en vue de gagner ou de produire un revenu, l'année d'imposition 1971 a été inférieure à douze mois et que ce revenu provient d'une entreprise; les déductions sont donc limitées par les articles 1100(3) et 1104 des Règlements afférents à la Loi de l'impôt sur le revenu (art. 3, 4, 11(1)a), 12(1)a) et 137(1)). Si le film n'a pas été acheté en vue de gagner ou de produire un revenu, alors, en vertu de l'article 1102(1)c) des Règlements, aucune déduction au titre de l'article 11(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu n'est possible, et le demandeur n'est pas fondé à déduire une allocation à l'égard du coût en capital qui dépasse celle autori- sée par la défenderesse. (Dans les onze autres causes auxquelles les autres commanditaires sont parties, la défenderesse a établi de nouvelles cotisations analogues, qui ont donné lieu aux mêmes avis d'opposition. Ces causes ont été entendues sur preuve commune et le jugement définitif rendu en l'espèce permettra, si besoin est, d'apporter des corrections aux cotisa- tions en appliquant les mêmes principes.)
Arrêt: l'appel est rejeté. Le demandeur n'était pas engagé dans une entreprise cinématographique et tout revenu qu'il est
susceptible de tirer du film ne proviendra pas d'une entreprise, mais de biens. Les articles 1100(3) et 1104 des Règlements ne s'appliquent donc pas aux fins de gagner ou de produire un revenu. Il n'existe, en outre, aucune preuve que l'achat des droits du film ait été fictif. Le principal litige porte sur l'oppor- tunité de la méthode comptable adoptée par le demander. Les témoignages des experts en comptabilité cités par le demandeur et la défenderesse sont en désaccord sur le point suivant: le passif de la société est-il éventuel? La Loi de l'impôt sur le revenu ne comporte aucune interdiction contre l'une ou l'autre des deux méthodes. Toutefois, il existe une présomption statu- taire en faveur d'une cotisation à l'impôt sur le revenu tant qu'il n'est pas prouvé qu'elle est erronée et le fardeau de la preuve incombe au contribuable.
APPEL en matière d'impôt sur le revenu. AVOCATS:
D. K. Laidlaw, c.r., P. Harris et G. Drabinsky pour le demandeur.
N. A. Chalmers, c.r., et N. W. Nichols pour la défenderesse.
PROCUREURS:
Macaulay, Perry, Toronto, pour le deman- deur.
Le sous-procureur général du Canada pour la défenderesse.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE WALSH: La présente affaire a été en- tendue sur preuve commune avec onze autres por- tant les n°s du greffe: T-4291-74, Vaile c. La Reine; T-4258-74, Howie c. La Reine; T-4259-74, Rush c. La Reine; T-4260-74, Farley c. La Reine; T-4261-74, Rogers c. La Reine; T-4262-74, Macaulay c. La Reine; T-4263-74, Howie c. La Reine; T-4264-74, Gibson c. La Reine; T-4265-74, Lilly c. La Reine; T-4266-74, Outerbridge c. La Reine, et T-4267-74, Perry c. La Reine, à la suite d'une ordonnance rendue le 10 octobre 1975. La question en litige dans chaque affaire dérive des avis d'opposition présentés par les demandeurs contre la nouvelle cotisation à l'impôt sur leur revenu pour l'année d'imposition 1971. Le deman- deur Lawrence H. Mandel, dans son avis du 3 janvier 1974 présenté contre la nouvelle cotisation à l'impôt sur son revenu établie le 19 octobre 1973, énonce les motifs de ces objections dans les termes suivants:
[TRADUCTION] Le 23 décembre 1971, ou vers cette date, moi, Lawrence H. Mandel, suis devenu commanditaire d'une société en commandite constituée sous la raison sociale One Flag Under Ontario Investments Limited & Film Associates («la société en commandite»), aux fins d'investir et d'acquérir un titre dans la propriété d'un film intitulé «Mahoney's Estate». Cette acquisition a effectivement eu lieu le 23 décembre 1971, ou vers cette date.
Je soutiens donc qu'en vertu de l'article 11(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu antérieure à 1972, et de l'article 1100(1)a)(xv) des Règlements de l'impôt sur le revenu anté- rieurs à 1972, j'ai droit, à titre de commanditaire d'une société en commandite, à une allocation à l'égard du coût en capital égale à 60% du total du paiement en argent comptant et des billets à ordre afférents à ma participation à titre de comman- ditaire et concernant l'achat du film par la société en commandite.
En application de l'alinéa 165(3)b) de la Loi de l'impôt sur le revenu (Canada) postérieure à 1972, j'en appelle immédiate- ment à la Cour fédérale, renonce par la présente à une révision de la nouvelle cotisation et sollicite à cet effet le consentement du ministre du Revenu national.
Les onze autres affaires comportent des nouvelles cotisations analogues, qui ont donné lieu aux mêmes avis d'opposition, mais les montants ne sont pas identiques, car la contribution de chacun dans la société en commandite et, naturellement, leurs revenus personnels provenant d'autres sources, dif- fèrent. Toutefois, lorsque la Cour aura réglé la question de droit en l'espèce par un jugement définitif, il sera possible d'apporter des corrections aux cotisations, si besoin est, en appliquant le même principe aux onze autres affaires.'
Dans son exposé de défense modifiée, la défen- deresse soutient que le demandeur, en établissant sa déclaration d'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1971, a inclus comme déduction dans le calcul de son revenu, une perte de $14,264.96 sur les fonds qu'il a investis dans la société en commandite à propos du film Mahoney's Estate, perte qu'il a réclamée exclusivement à titre d'allo- cation à l'égard du coût en capital. En établissant la nouvelle cotisation du demandeur, le ministre du Revenu national a refusé d'admettre une partie de ladite perte, soit $9,552.56. Il a conclu que le coût en capital de la participation dans le film Maho- ney's Estate supporté par la société en commandite s'est élevé à $150,000 (le total des contributions en espèces versées à la société en commandite par les commanditaires), dont $7,904 représentent la con
' Les pièces ont été versées au dossier de l'affaire Howie c. La Reine, du greffe T-4258-74.
tribution du demandeur; que la société en com- mandite, pendant l'année d'imposition 1971, n'était pas engagée directement, ou autrement, dans une entreprise cinématographique ou autre; qu'elle n'a acheté ni le film ni aucune participation dans ce film pendant l'année d'imposition 1971, si ce n'est la simple autorisation de le distribuer. En outre, le Ministre affirme que si la société en commandite a acheté le film Mahoney's Estate ou une participation dans ce film, elle ne l'a pas fait en vue de gagner ou de produire un revenu et n'a pas utilisé le film à cette fin à aucun moment de l'année d'imposition 1971; que le coût en capital supporté par la société en commandite pour le film n'a pas dépassé $150,000 et qu'elle n'a pas acheté le film ni une participation dans ce film; et que la part supportée par le demandeur dans les pertes de la société en commandite s'est bornée à sa contri bution en capital, soit $7,904. Le Ministre soutient en outre que le prétendu achat du film est une transaction fictive effectuée seulement en vue de tourner l'impôt sur le revenu de profession et autres revenus du demandeur, et non pas pour les fins commerciales légitimes.
Subsidiairement, le Ministre allègue que si la société en commandite a acheté le film Mahoney's Estate en vue de gagner ou de produire un revenu, son année d'imposition 1971 a été inférieure à douze mois et que tout ce revenu provient d'une entreprise, en sorte que d'allocation à l'égard du coût en capital que réclame le demandeur est limitée par les dispositions des articles 1100(3) et 1104 des Règlements de l'impôt sur le revenu. Le Ministre s'appuie notamment sur les articles 3, 4, 11(1)a), 12(1)a) et 137(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1952, c. 148 dans sa forme modifiée antérieure aux S.C. 1970-71-72, c. 63 et aux articles 1100, 1102 et 1104 de ses Règlements. Si le film n'a pas été acquis en vue de gagner ou de produire un revenu, comme le Ministre l'affirme, alors, selon lui, en vertu de l'article 1102(1)c) des Règlements, il n'entre pas dans une des catégories de biens pour lesquelles une déduction peut être effectuée en vertu de l'article 11(1)a) de la Loi et, en tout état de cause, le demandeur n'est pas fondé à réclamer une allocation à l'égard du coût en capital concernant le film, qui dépasse celle autori- sée par le ministre du Revenu national, car elle réduirait indûment ou de façon factice son revenu.
Une série de documents ont été produits devant la Cour avec le consentement des parties, ainsi que certains autres dérivant de la communication et produits occasionnellement pendant les dépositions de différents témoins. Il a été convenu que les communications intervenues dans une affaire ser- viraient à toutes les autres.
Aux fins de l'espèce, il n'est pas nécessaire d'analyser en détail les nombreux contrats très complexes relatifs à la production du film, passés par différentes parties avant que le demandeur et ses onze associés (tous, sauf un, appartenant à la même société d'avocats de Toronto, la seule excep tion étant un médecin) se joignent à l'entreprise. Il suffit de dire que, le 14 septembre 1971, Topaz Productions Limited, Niagara Television Limited, Robert Lawrence Productions (Canada) Limited et John T. Ross, producteur exécutif du film Mahoney's Estate pour lequel était prévu un mon- tant de $653,000, ont passé un contrat stipulant qu'Alexis Kanner jouerait le rôle de Mahoney et serait coauteur du scénario et de l'image; que Topaz vendrait à Niagara 25% de ses droits, titres et intérêts dans le scénario et l'image, et garderait 75% de la propriété; que Topaz, en sa qualité de producteur, commencerait la photographie le 27 septembre 1971 ou vers cette date, afin que le film soit terminé pour le 31 décembre 1971; que $20,000 du montant à verser à Topaz pour la production du film seraient différés et qu'elle rece- vrait 25% des profits nets découlant du film; que $15,000 de l'indemnité à verser à Robert Law- rence Productions seraient différés et qu'elle recevrait 8% des profits nets. Niagara a avancé à Topaz, pour la production, $125,000 remboursa- bles sur les recettes. Robert Lawrence Productions a été chargée de pourvoir au financement de tous les frais de production en excédent de $375,000, à l'exclusion des frais différés. Une fois le film ter- miné, la firme de comptables agréés Deloitte, Has- kins & Cells, devait procéder à une vérification afin de déterminer le coût total de production sur les instructions de Topaz qui était également tenue d'en remettre une copie à Niagara et à Robert Lawrence Productions. Les profits nets en excé- dent des dépenses fixés par les vérificateurs devaient être répartis de la façon suivante: 20% à la Société de développement de l'industrie cinéma-
tographique canadienne, 22% Niagara, 8% à Robert Lawrence Productions, 25% Topaz, 7% à
Harvey Hart, 1.5% à Maud Adams et 1.5% à Sam Waterston, et les 15% restant aux personnes dési- gnées conjointement par Topaz et Robert Law- rence Productions ou, à défaut de cette désigna- tion, partagés à égalité entre ces deux compagnies.
Aux termes d'un contrat antérieur, en date du 8 juillet 1971, Harvey Hart a été engagé en qualité de directeur du film. Le 20 août 1971, Alexis Kanner a été engagé pour jouer le rôle de Maho- ney. Il a cédé à Topaz Productions Limited (dont il était président) tous ses droits sur un projet de script découpé, dont il était coauteur. Le 14 sep- tembre 1971, date à laquelle les parties ont passé le principal accord, la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne a con- venu avec Topaz Productions Limited et Niagara Television Limited, en tant que propriétaires, Topaz Productions Limited en tant que produc- teur, et John T. Ross, en tant que producteur exécutif, d'avancer pour la production du film $250,000, dont $5,000 l'avaient déjà été. En con- tre-partie, elle devait recevoir 20% des profits nets du film, comme je l'ai déjà dit. Le 31 août 1971, Topaz Productions Limited et Niagara Television Limited, désignées comme les donneurs de licence, et International Film Distributors Limited, dési- gnée comme le distributeur, ont passé un contrat ils ont convenu que la distribution du film aurait lieu suivant un pourcentage des recettes brutes et, le 9 décembre 1971, la Banque de Mont- réal a prêté $100,000, moyennant une participa tion de 2 1 / 2 % sur les profits nets, à un taux d'intérêt supérieur de 2 1 / 2 % au taux préférentiel de la banque, dont le remboursement devait commencer environ trois mois après l'achèvement de la production.
Lc 22 décembre 1971, la société d'avocats toron- toise Thomson, Rogers, à laquelle appartiennent le demandeur et tous les autres demandeurs sauf un, a écrit à Topaz Productions et à Niagara Television Limited pour confirmer que $150,000 avaient été réunis en vue d'acquérir la propriété intégrale du film Mahoney's Estate, et qu'ils devaient être avancés vers le 31 décembre 1971, à condition que Niagara convertisse les $125,000 déjà investis dans la production en une avance ne
portant aucun intérêt remboursable aux mêmes conditions que celle de $250,000 consentie par la Société de développement de l'industrie cinémato- graphique canadienne. Les acheteurs (qui avaient décidé de former une société en commandite com- prenant une compagnie à constituer qui devait en être le gérant et tous les investisseurs à titre de commanditaires) devaient payer le solde du prix d'achat en assumant toutes les obligations du pro- ducteur concernant le paiement et le rembourse- ment notamment des sommes avancées par la Société de développement de l'industrie cinémato- graphique canadienne et par Niagara et des sommes que le producteur avait convenu de payer en vertu de tous les accords, contrats et arrange ments existants, ou intervenus par la suite, en vue de compléter le film. Le producteur devait négo- cier le financement jusqu'à concurrence de $100,- 000 avec une banque à charte canadienne (il s'agit apparemment du prêt consenti par la Banque de Montréal) et le prix d'achat devait être le coût de production déterminé par les vérificateurs des pro- ducteurs, la firme Deloitte, Haskins & Sells. Il était convenu que les $150,000 versés en tant que partie du prix d'achat au comptant serait rembour- sés par la suite concurremment et proportionnelle- ment à la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne pour son avance de $250,000 et à Niagara pour son avance de $125,- 000, la société en commandite devant recevoir 12 1 / 2 % des profits nets du film.
Le 30 décembre 1971, ces modalités ont été intégrées dans un contrat intervenu entre Topaz Productions, Niagara Television Limited, la Société de développement de l'industrie cinémato- graphique canadienne, Robert Lawrence Produc tions (Canada) Limited, John T. Ross et One Flag Under Ontario Investments Limited & Film Asso ciates, agissant par l'entremise de son gérant, One Flag Under Ontario Investments Limited. A la suite de cet accord, les 15% de profits nets qui, en vertu du contrat de production passé le 14 septem- bre 1971, devaient être payés à des personnes susceptibles d'être désignées conjointement par Topaz et Robert Lawrence Productions, ont été distribués dans la proportion de 12.5% aux ache- teurs One Flag Under Ontario Investments Lim ited & Film Associates et de 2.5% à la banque, les pourcentages des autres parties au contrat initial restant inchangés. Topaz a versé immédiatement
$15,000 à la firme Thomson, Rogers en paiement des services qu'ils ont rendus en négociant l'achat du film par le propriétaire.
Au 31 décembre 1971, le coût du film établi par les vérificateurs s'élevait à $577,892, bien que le paiement de certaines parties de ce montant ait été différé. Le 30 décembre 1971, One Flag Under Ontario Investments Limited & Film Associates a été dûment constituée comme société en comman- dite ayant commencé ses activités le 23 décembre 1971. Les états financiers vérifiés montrent, outre l'investissement dans le film Mahoney's Estate qui s'élève à $577,892, un poste intitulé frais différés du coût de production du film au montant de $179,050 et une avance de $93,539 à la compagnie de production. Les frais différés du coût de pro duction du film figurent à la fois comme un élé- ment de l'actif et du passif et les notes annexées expliquent que les frais différés représentent des frais encourus sur une base conditionnelle et des obligations à régler uniquement sur le produit de la distribution. Une autre note déclare qu'aux termes du contrat, la société en commandite a pris en charge toutes les obligations afférentes à la production, notamment celles de rembourser les montants avancés par la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne, Nia- gara Television Limited et d'autres créanciers, à savoir la banque, pour un montant de $100,000, dont $50,000 ont été remis le 31 décembre 1971, Niagara, pour un montant de $125,000, la Société de développement de l'industrie cinématographi- que canadienne, pour un montant de $250,000, dont $246,580 avaient déjà été avancés le 31 décembre 1971, et la société en commandite, pour un montant de $150,000. Il y est également men- tionné que Niagara a accepté d'avancer tout mon- tant nécessaire à l'achèvement du film, qui serait en excédent de $625,000, le remboursement dudit montant étant à la charge de la société en com- mandite, mais qu'aucun montant de cette nature n'avait encore été avancé au 31 décembre 1971. Il y est enfin question de montants, dont le total s'élève à $54,850, dus à diverses personnes ayant participé à la production à titre de créanciers «privilégiés différés». Leurs noms et les montants qui leur sont dus figurent dans le contrat d'achat du 30 décembre 1971. Ce montant de $54,850 et celui de $124,200, qui figure comme autres frais
de production différés, semblent former le total des $179,050 indiqués dans le bilan comme frais diffé- rés de la production du film.
Certains contrats, bien que postérieurs à l'année d'imposition 1971, peuvent avoir une certaine influence sur la décision de la Cour. L'un deux, en date du ler février 1973, intervenu entre la Société de développement de l'industrie cinématographi- que canadienne, Amaho Limited (désignée comme le cessionnaire), Topaz Productions Limited, Niagara Television Limited, Robert Lawrence Productions Limited, John T. Ross, One Flag Under Ontario Investments Limited & Film Associates et Alexis Kanner, montre que Niagara a fourni pour le financement du film le montant de $125,000 et une somme complémentaire de $10,000 pour son achèvement. Elle cède tous ses droits à Amaho Limited (le cessionnaire), sauf pour les $10,000. Quant à la Société de développe- ment de l'industrie cinématographique canadienne, elle cède, moyennant un dollar, tous ses droits au remboursement des sommes avancées par ses soins, qui devait être prélevé sur une part des profits réalisés par le film, et les parties renoncent à toute réclamation contre elle concernant le solde de son engagement de $250,000 non encore payé (qui s'élevait seulement à $3,420). Le 11 février 1974, Topaz Productions Limited et British Lion Films Limited ont passé un contrat, qui déclare que les principales prises de vue du film sont terminées, mais qu'il faut un financement complémentaire pour terminer la production et livrer le film prêt à être projeté, financement que Lion a accepté de fournir contre l'acquisition des droits de distribu tion et de publicité au niveau international. Il s'agit d'un contrat plein de longueurs, complexe, et qui contient ce qu'on dit être les clauses de distri bution classiques.
Avant d'examiner les témoignages des experts en comptabilité, il vaut mieux s'occuper des dépo- sitions relatives aux possibilités qu'avait le film de produire éventuellement un revenu et aux raisons du retard apporté à son achèvement et à sa distri bution. Victor Perry, l'un des demandeurs, a témoigné qu'au moment ils ont acheté Maho- ney's Estate, le tournage du film était terminé. Kanner a voulu le découper à son idée, Hart l'ayant déjà fait d'une manière qui lui avait déplu, car il en est le producteur et le coauteur et la vedette, tandis que Hart en est le directeur. Il y
avait mésentente entre eux. British Lion est ensuite intervenue dans l'image et a voulu y intro- duire un fond musical.
Nathan Taylor, qui n'est pas un des deman- deurs, mais avocat et expert en industrie cinémato- graphique et aussi membre du groupe consultatif de la Société de développement de l'industrie ciné- matographique canadienne, a déposé à titre de témoin expert et son affidavit a été considéré comme lu. Il est engagé dans l'industrie cinémato- graphique depuis 1924 environ, alors qu'il est devenu secrétaire de l'association dite Motion Pic ture Theatre Owners of Ontario. Il a exploité des cinémas, est devenu président de International Film Distributors, a financé la production de grands films, construit des studios et s'est aussi occupé de télévision. Il a déclaré qu'à partir de 1971, on avait adopté pour la production une méthode de financement régulière et acceptable consistant à avancer de l'argent pour défrayer les coûts moyennant un remboursement sur les recet- tes du film. A son avis, Mahoney's Estate, avec Alexis Kanner comme producteur et vedette, Sam Waterston, Maud Adams et Diana Leblanc comme partenaires, Robert Lawrence Productions (Canada) Limited, John T. Ross comme produc- teur exécutif et Harvey Hart comme directeur, avait tous les éléments voulus pour être un film à succès. La compagnie à laquelle il appartient, International Film Distributors, a eu suffisamment confiance en cette production pour reporter le paiement de la location des studios elle était tournée, soit environ $20,000. Il pense aussi que Ross n'aurait pas accepté d'être producteur exécu- tif s'il n'avait pas eu confiance dans le succès du film et que le contrat de distribution passé ensuite avec British Lion Films Limited, l'un des princi- paux distributeurs du Royaume-Uni, augmente notablement ses chances de succès financier. Le fait qu'en 1974, elle y ait investi 70,000 livres sterling indique, selon lui, qu'elle lui reconnaît de grosses possibilités. Il a admis, au cours du contre- interrogatoire, que le délai de cinq ans qu'il a fallu pour tourner le film, est d'une longueur inusitée. Il a déclaré qu'en général, avant d'investir dans un film, on regarde ce qu'il appelle le [TRADUCTION] «levier», c'est-à-dire un bien vendu antérieurement, pièce de théâtre ou livre, ou bien une bonne inter- prétation ou quelque [TRADUCTION] «trouvaille
publicitaire» ou un bon script. Or, Mahoney's Estate avait une bonne distribution, un bon direc- teur et un bon script. Il a admis que les présents demandeurs sont des «anges» en matière de pro duction scénique et qu'il y a un avantage fiscal à disposer d'un coût élevé à utiliser comme alloca tion à l'égard du coût en capital.
Michael Spencer, directeur exécutif de la Société de développement de l'industrie cinémato- graphique canadienne, qui a travaillé à l'Unité cinématographique des Forces canadiennes et ensuite à l'Office national du film, il a occupé les fonctions de producteur et de directeur de la planification, a déclaré dans sa déposition qu'aux termes du contrat du ler février 1973, la Société s'était retirée du film Mahoney's Estate. Vers le mois de novembre 1972, il a vu le matériel découpé et en a conclu que le film ne pourrait jamais être fini d'une manière qui lui assure une distribution rentable. Il a donc recommandé à la Société de se retirer. Il a trouvé que le montage du film avait pris un temps anormalement long et, bien que la Société ait avancé tous les fonds qu'elle s'était engagée à fournir, sauf $3,400, il a estimé qu'une économie, même aussi faible, pouvait être employée à meilleur escient. Il s'est aperçu qu'il existait des divergences artistiques irrémédiables entre le producteur, le directeur et le principal acteur. Selon lui, le film qui, dans sa conception originale, était amusant, est devenu plein de lon- gueurs et ennuyeux. Il a déclaré que du ler avril 1968 au 31 mars 1976, la Société de développe- ment de l'industrie cinématographique canadienne a financé 188 films. Elle a recouvré une partie de ses fonds dans 40 ou 50 d'entre eux et l'intégralité de ses investissements, dans 10 seulement. Dans le cas du film bien connu Duddy Kravitz, elle a recouvré l'intégralité de ses débours, plus un profit de 10%. Dans un autre film, qui n'a coûté que $150,000, l'intégralité de ses débours et un béné- fice de 125%. Le seul film qu'elle ait abandonné après un investissement initial est justement Mahoney's Estate. Le film était censé être complè- tement terminé vers janvier-février 1972, dit-il, mais il ne l'a été en fait qu'en novembre et ce retard l'a inquiété. Il est au courant des difficultés de caméra qui, en 1972, ont entraîné une réclama- tion d'assurance, certaine partie du film ayant été abîmée au point d'exiger de nouvelles prises de vue. Il croit comprendre que Hart, le directeur, a
fait le premier découpage, mais que Kanner, le véritable directeur, et le producteur n'ont pas été satisfaits.
Don Owen, qui est dans l'industrie cinématogra- phique depuis 20 ans, ayant été écrivain, directeur et producteur pendant environ 15 ans et ayant tourné 4 grands films et 30 documentaires, a déposé en qualité d'expert, son affidavit étant con- sidéré comme lu. A son avis, Mahoney's Estate manque d'intrigue, de forme et de force; le com- portement du principal personnage est incohérent et immotivé, l'intrigue est confuse et ennuyeuse et manque totalement de valeur artistique ou com- merciale. Il a dit qu'il lui arrive parfois de lire des scripts et de donner des conseils. Il connaît et respecte Kanner, en tant qu'acteur, mais doute de sa maturité et de son expérience en tant que producteur. Toutefois, il a admis au cours de sa déposition que Kanner, Adams, Waterston, et Robert Lawrence Productions, dirigée par John T. Ross, sont tous bien connus au Canada. Il recon- naît qu'il a fallu qu'en 1971, la Société de dévelop- pement de l'industrie cinématographique cana- dienne ait eu grande confiance dans le succès du film pour s'engager à y investir $250,000 et qu'il aurait bien pu à ce moment-là partager cette confiance, son opinion actuelle étant basée sur l'état présent du film. Selon lui, le script n'est pas mauvais, mais la trame de l'intrigue se perd dans les prises de vue et le film a été mutilé par un mauvais montage.
Lawrence Rittenberg, a été cité comme témoin pour le compte des demandeurs. Il est employé par International Film Distributors Limited, son tra vail consistant à placer le film dans le plus grand nombre de cinémas possible. A l'époque de l'au- dience, en juin 1976, il avait déjà pris des arrange ments pour le placer à Edmonton le 13 août, à Calgary le 27 août, à Halifax le 22 octobre, à Saint-Jean (N.-B.) le 3 décembre, à Moncton (N.-B.) du 15 au 18 décembre et à Fredericton (N.-B.) du 15 au 18 décembre. Des négociations étaient en cours pour d'autres cinémas ailleurs dans le pays. Il a déclaré qu'on n'avait pas cherché à le projeter avant, car le matériel n'était pas prêt. International Film Distributors devait recevoir, sur une échelle mobile, de 35% 50% du profit brut.
La Cour a refusé une requête de la défenderesse aux fins de visionner le film. Je n'estime pas
opportun d'essayer de me former une opinion per- sonnelle sur les mérites artistiques du film ou ses possibilités commerciales d'engendrer des gains suffisants pour rembourser les sommes importan- tes qui y sont investies, alors que je ne possède aucune qualification particulière à cet égard. Ce genre d'observations doit être basé sur les déposi- tions de témoins expérimentés et sur les conclu sions susceptibles d'être tirées des contrats existants.
Pour l'utilité qu'elle peut avoir, une lettre du 3 décembre 1971 adressée par Deloitte, Haskins & Sells à Thomson et Rogers a été admise en preuve malgré l'opposition du demandeur. Elle comporte divers calculs fiscaux et des tableaux basés sur différentes hypothèses qui y sont jointes. Il n'est pas nécessaire d'entrer dans le détail, mais la lettre et les tableaux tendent à démontrer que si on suppose un revenu imposable de $100,000 par an pour chacune des six personnes qui investissent dans un film coûtant $500,000, dont $125,000 ont été fournis par les six personnes, chaque investis- seur aurait, après impôt, un revenu total de $284,- 205 pour les années 1971 à 1976 incluse, s'il n'avait pas investi dans le film. Par suite de l'inves- tissement dans le film, si celui-ci ne produisait aucun revenu, le revenu total, après impôt, serait de $313,555 pour la même période de six ans, soit une augmentation de près de $30,000. Si le film était un succès et que les $500,000 investis soient recouvrés avec un supplément de $250,000 pour chacune des années 1973 et 1974, le revenu total de chaque investisseur pour la période 1971 à 1976, s'élèverait, après l'impôt, à $287,337, soit une augmentation de quelque $3,000 par rapport à ce qu'aurait été leur situation financière s'ils n'avaient jamais investi dans le film. Enfin, dans un dernier exemple basé sur l'hypothèse que seuls $300,000 des $500,000 investis dans le film étaient recouvrés, le revenu total, après impôt, s'élèverait à $295,519 pour les six années, soit un gain de $11,000 environ. D'où, on peut tirer la conclusion fondamentale que l'économie fiscale serait plus grande si le film ne produisait aucun revenu et si aucun des investissements ne pouvait être recou- vré, et que le succès du film entraînerait un faible avantage fiscal pour les investisseurs. La lettre souligne que, pour obtenir le plus grand avantage possible, il est indispensable que la Société de développement de l'industrie cinématographique
canadienne, les distributeurs et tous ceux qui ont avancé des montants importants soient incités à n'accepter de remboursement que sur les recettes du film et que les investisseurs pourraient amortir tous les frais du film à des fins fiscales, sans tenir compte du montant qu'ils ont investi afin d'obtenir une propriété intégrale. On peut tirer de ce docu ment, entre autres, la conclusion que, sauf pour la perte possible des $150,000 investis comptant, les demandeurs étaient en mesure d'obtenir des avan- tages fiscaux d'une entreprise commerciale non rentable et que, dans une certaine mesure, moins le film était rentable, plus grand était l'avantage fiscal. On peut aussi tirer comme autre conclusion que les demandeurs étaient des avocats bien infor més, au courant des avantages fiscaux au moment ils ont acheté le film et qu'il s'agit sans doute de l'une des principales raisons qui les y ont poussé.
Toutefois, cela ne permet pas de conclure que cela soit irrégulier ou que leurs motifs sont de nature à les priver des avantages fiscaux résultant de l'achat, car le droit fiscal a comme principe fondamental qu'un homme d'affaires peut disposer ses affaires de façon à réduire son assujettissement à l'impôt pourvu qu'il reste dans le cadre de la loi et des règlements fiscaux pertinents. A la lumière de la preuve produite devant moi, je ne trouve pas non plus, comme la défenderesse le prétend, que les demandeurs aient délibérément cherché à ache- ter un film voué à un échec financier. Bien que les opinions des divers témoins diffèrent considérable- ment quant aux possibilités du film, à mon avis, d'après les faits, rien n'indiquait en 1971 que le film Mahoney's Estate avait peu de chance de succès, si ce n'est l'affirmation généralement admise que la production cinématographique est une entreprise comportant un fort élément de risque, car les films réellement réussis sont la minorité. Il ne suffit pas de dire après coup que si à la fin de 1972 ou au commencement de 1973, il était manifeste que le film ne serait pas un succès commercial, c'était déjà prévu en 1971, lorsque les demandeurs l'ont acheté. A cette époque, il avait un bon script, une bonne interprétation, de bons producteurs et de bons directeurs, à tel point que non seulement la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne, mais aussi la Banque de Montréal et Niagara Television Limited étaient prêtes à investir des sommes
importantes dans sa production. En outre même à une date beaucoup plus tardive, en février 1974, un distributeur expérimenté, British Lion Films Limited, était lui aussi disposé à investir dans le film des montants complémentaires très élevés. Maintenant, soit trois ans plus tard que prévu, on est enfin prêt à le projeter dans les cinémas com- merciaux. Il serait donc faux de conclure qu'en 1971, il a été acheté délibérément pour son poten- tiel de perte. En réalité, les acheteurs ont investi $150,000 dans une entreprise commerciale forte- ment hasardeuse, en sachant que même si elle échouait, ils bénéficieraient d'avantages fiscaux importants et que, si par hasard elle réussissait, ils bénéficieraient de ses profits.
Je passe maintenant à la preuve comptable rela tive à la manière dont cet investissement aurait être comptabilisé aux fins d'imposition, ce qui est le véritable point en litige. Les articles de la loi et des règlements auxquels les parties se sont référées au cours des débats sont les suivants:
11. (1) Par dérogation aux alinéas a),b) et h) du paragraphe (1) de l'article 12, les montants suivants peuvent être déduits dans le calcul du revenu d'un contribuable pour une année d'imposition:
a) la partie de ce que coûtent en capital les biens au contri- buable, ou la somme à l'égard de ce que coûtent en capital les biens au contribuable, s'il en est, qui est allouée par règlement;
12. (1) Dans le calcul du revenu, il n'est opéré aucune déduction à l'égard
a) d'une somme déboursée ou dépensée, sauf dans la mesure elle l'a été par le contribuable en vue de gagner ou de produire un revenu tiré de biens ou d'une entreprise du contribuable,
137. (1) Dans le calcul du revenu aux fins de la présente loi, aucune déduction ne peut être faite à l'égard d'un déboursé fait ou d'une dépense contractée, relativement à une affaire ou opération qui, si elle était permise, réduirait indûment ou de façon factice le revenu.
1100. (1) En vertu de l'alinéa a) du premier paragraphe de l'article 11 de la Loi, il est par les présentes alloué au contri- buable dans le calcul de son revenu d'une entreprise ou de biens, selon le cas, des déductions pour chaque année d'imposi- tion égales
a) au montant qu'il peut réclamer à l'égard de biens de chacune des catégories suivantes, comprises dans l'Annexe B, sans dépasser, à l'égard des biens
(i) de la catégorie 1, 4%,
(ii) de la catégorie 2, 6%,
(iii) de la catégorie 3, 5%,
(iv) de la catégorie 4, 6%,
(v) de la catégorie 5, 10%,
(vi) de la catégorie 6, 10%,
(vii) de la catégorie 7, 15%,
(viii) de la catégorie 8, 20%,
(ix) de la catégorie 9, 25%,
(x) de la catégorie 10, 30%,
(xi) de la catégorie 11, 35%,
(xii) de la catégorie 12, 100%,
(xiii) de la catégorie 16, 40%,
(xiv) de la catégorie 17, 8%,
(xv) de la catégorie 18, 60%,
(xvi) de la catégorie 22, 50%,
(xvii) de la catégorie 23, 100%,
(xviii) de la catégorie 25, 100%,
(xix) de la catégorie 26, 1%,
du montant qui reste, s'il en est, après déduction des mon- tants, établis en vertu des articles 1107 et 1110 l'égard de la catégorie, sur le coût en capital non déprécié, pour lui, des biens de la catégorie, à la fin de l'année d'imposition (avant d'opérer quelque déduction en vertu du présent paragraphe pour l'année d'imposition);
1100. (3) Lorsqu'une année d'imposition comprend moins de 12 mois, le montant alloué en déduction sous le régime des alinéas a), d) et h) du paragraphe (1) ne doit pas dépasser la proportion du montant maximum admissible que le nombre de jours dans l'année d'imposition représente par rapport à 365.
1102. (1) Les catégories de biens décrits dans la présente Partie et dans l'Annexe B sont censées ne pas comprendre les biens
c) qui n'ont pas été acquis par le contribuable aux fins de gagner ou de produire un revenu,
1104. (1) Lorsque le contribuable est un particulier et que son revenu pour l'année d'imposition comprend le revenu d'une entreprise dont l'exercice financier ne correspond pas à l'année civile à l'égard des biens susceptibles de dépréciation acquis aux fins de gagner ou de produire le revenu de l'entreprise, la mention dans la présente Partie
a) de «d'année d'imposition« est censée être la mention de l'exercice financier de l'entreprise, et
b) de «la fin de l'année d'imposition« est censée être la mention de la fin de l'exercice financier de l'entreprise.
ANNEXE B CATÉGORIE 18
(60%)
Les biens constitués par une pellicule cinématographique autre qu'un message commercial de télévision.
Je ne conclus pas de la preuve produite devant moi que les demandeurs appartiennent à l'industrie cinématographique ni que tout revenu qui leur
échoit soit tiré d'une entreprise plutôt que d'un bien. La clause 7 du contrat d'achat se lit comme suit:
[TRADUCTION] 7. Sauf modification expresse ci-incluse, le Propriétaire reconnaît être lié par toutes les modalités des accords, contrats et arrangements existant actuellement entre Topaz et d'autres parties pour la production du film et par les modalités de tous les autres contrats passés ultérieurement par Topaz pour l'achèvement, la distribution et l'exploitation du film, étant entendu que le Propriétaire investit dans le film (et, à ce titre, en est le propriétaire), mais que toutes les décisions, de quelque nature qu'elles soient, normalement prises par un producteur de film, incombent au producteur du film tel que l'indique le contrat de production.
Les demandeurs eux-mêmes n'avaient absolument rien à voir dans la production du film ou dans sa distribution et paraissent s'être bornés à y investir. Je ne pense donc pas que les articles 1100(3) et 1104 des Règlements soient applicables. Comme je l'ai déjà indiqué, je ne conclus pas des éléments de preuve qui ont été produits devant moi, que le bien n'a pas été acquis par le contribuable en vue de gagner ou de produire un revenu, car il y avait toujours une possibilité de revenu. Je ne crois donc pas que l'article 1102(1)c) soit applicable. (Voir Walsh c. M.R.N. 2 )
Je ne conclus pas non plus que l'achat des droits du film par le demandeur ait été un subterfuge au sens retenu dans l'arrêt Snook c. London & West Riding Investments Ltd. 3 Il ne devient pas un subterfuge, comme la défenderesse le prétend, sim- plement parce que Topaz Productions Limited, dans le contrat de distribution qu'elle a passé subséquemment, le 11 février 1974, avec British Lion Films Limited a agi comme si elle était encore propriétaire au lieu de préciser clairement qu'elle agissait simplement à titre de mandataire des propriétaires One Flag Under Ontario Invest ments Limited & Film Associates. La clause 7 du contrat d'achat du demandeur définit clairement les relations entre Topaz Productions Limited et les acheteurs en tant que propriétaires du film. Cela règle la plupart des arguments subsidiaires soulevés par l'avocat de la défenderesse, mais le principal argument qui porte sur l'opportunité de la méthode comptable adoptée, reste à examiner.
2 [1966] R.C.É. 518.
3 [1967] 1 All E.R. 5: R, à la p. 528.
Aucun témoin n'a été cité pour le compte des vérificateurs, la firme Deloitte, Haskins & Sells, mais on peut présumer à coup sûr que s'il y en avait eu un, il aurait soutenu la manière dont ils ont considéré l'investissement dans le film Mahoney's Estate, à savoir, comme un investisse- ment correct et judicieux. Un témoin expert en comptabilité a été cité pour le compte du deman- deur. Il s'agit de Robert Fraser, C.A., de la firme Thorne, Riddell, qui a aussi appuyé cette façon de voir. De son côté, la défenderesse a également cité un témoin expert, David Bonham, F.C.A., qui a adopté un point de vue opposé. Ces deux experts hautement qualifiés ont invoqué à maintes reprises des sources comptables autorisées à l'appui de leur opinion sur la méthode comptable appropriée en l'occurrence. Il faut donc examiner leurs témoi- gnages en détail, puisque la question en dépend.
Fraser, dont l'affidavit assez long a été considéré comme lu, affirme avoir examiné la méthode de financement employée pour faire face aux coûts de production du film, y compris les contrats passés avec la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne, la Banque de Montréal et Alexis Kanner, ainsi que le contrat d'achat du film par la société en commandite. Il a aussi examiné les contrats relatifs au financement du film par la société en commandite et les états financiers de cette dernière, pour la période pre- nant fin le 31 décembre 1971, préparés par la firme Deloitte, Haskins & Sells. Il déclare: [TRA- DUCTION] «A mon avis, il est conforme aux princi- pes comptables généralement admis, de comptabi- liser les coûts du film imputables à la société en commandite en fonction des paiements effectués pour défrayer ces coûts tels qu'ils découlent des contrats précités». Il déclare aussi: [TRADUCTION] «A mon avis, le coût du film Mahoney's Estate supporté par la société en commandite, soit le montant de $577,892 qui figure à l'état financier susmentionné, est, conformément aux principes comptables généralement admis, ce qu'il a réelle- ment coûté à cette société».
L'opinion de Bonham est exprimée sous forme d'une lettre adressée à Me N. W. Nichols, avocat du ministère de la Justice; elle a été annexée à l'affidavit de ce dernier et considérée comme lue. Il a été interrogé à son sujet. Il déclare dans sa lettre qu'on lui a demandé son opinion sur la
méthode comptable appropriée dans le cas d'un bien acquis pour une contrepartie, dont une frac tion est conditionnelle à la survenance d'un ou plusieurs événements. Il ajoute qu'on lui a aussi demandé de présumer que les obligations contrac- tées par les acheteurs lorsqu'ils ont acquis le film étaient inconditionnelles jusqu'à concurrence de leur paiement de $150,000 et conditionnelles ou éventuelles en ce qui concerne le paiement de tous les autres montants jusqu'à concurrence d'un maximum de $427,892, tel qu'établi au 31 décem- bre 1971, la contrepartie maximale à cette date étant $577,892 et la condition étant qu'il y ait d'abord des sommes d'argent provenant de l'ex- ploitation du film conformément aux modalités des contrats y afférents. Son opinion repose sur une autre hypothèse, à savoir [TRADUCTION] «qu'à la fin de l'année financière 1971, aucun fondement raisonnable ne permettait de prédire que les pers pectives commerciales de l'exploitation du film seraient telles que l'obligation conditionnelle, dont on vient de parler, deviendrait presque certaine- ment payable. En d'autres termes, l'achat du film par One Flag a nettement été une entreprise spé- culative». Il conclut en se fondant sur ces hypothè- ses qu'au Canada, selon les principes généralement admis, la meilleure méthode comptable à appli- quer à cette transaction, à l'époque pertinente, aurait consisté à:
[TRADUCTION] 1. Comptabiliser le bien à la fin de l'année financière 1971, les droits du film étant acquis pour un montant fiscal de $150,000,
2. Expliquer dans une note annexée aux états financiers de la même année, le passif éventuel (égal à la contrepartie condi- tionnelle de $427,892) assujetti au rendement commercial de l'exploitation du film.
3. Si des paiements étaient requis en vertu du passif éventuel mentionné à l'alinéa 2 ci-dessus, le coût d'achat des droits du film aurait augmenté en conséquence.
Fraser a déclaré dans sa déposition que dans la pratique comptable, il est parfaitement correct d'incorporer au coût, un passif qui n'est pas exigi- ble avant une date future, car le passif, une fois assumé, fait partie du coût. Le passif que la société en commandite a assumé en vertu du contrat représente une partie du coût d'achat. Il s'est référé à l'ouvrage intitulé Terminology for Accountants publié par l'Institut canadien des comptables agréés, qui définit le mot coût comme étant: [TRADUCTION] «Le montant mesuré en argent des dépenses encourues pour obtenir des
biens ou des services», et le mot passif comme étant [TRADUCTION] «En général, une dette due. En comptabilité, le coût en argent pour s'acquitter d'une obligation exécutoire et représenté par un solde créditeur, qui peut à bon droit être inclus dans un bilan conformément aux principes comp- tables admis». Cela implique, a-t-il reconnu, qu'il faut déterminer si le passif est éventuel ou non. Selon lui, un passif éventuel est une obligation qui peut provenir d'un événement futur dont la surve- nance peut être possible ou probable. Si l'événe- ment est probable, le passif n'est pas éventuel. A son avis, en l'espèce, le passif assumé était réel et c'est seulement son paiement qui était éventuel. Il a fortement insisté sur la distinction entre l'exis- tence d'un passif et son paiement. Au cours du contre-interrogatoire, on lui a mentionné la recom- mandation 1580 du Manuel de l'Institut cana- dien des comptables agréés, dont l'article .33 est rédigé dans ces termes:
[TRADUCTiON] A la date d'acquisition, on doit comptabiliser la contrepartie conditionnelle comme faisant partie intégrante du prix d'achat si, à cette date, on peut prévoir avec suffisam- ment de certitude que la condition sera remplie et si l'on peut évaluer avec suffisamment de précision le montant de cette contrepartie. Si l'on ne peut évaluer ce montant avec suffisam- ment de certitude ou si l'on doute que la condition soit remplie, on doit annexer aux états financiers une note expliquant en détail la condition; lorsque cette dernière est remplie, on doit comptabiliser la contrepartie comme un élément supplémen- taire du prix d'achat.
Il s'est dit d'accord avec ce texte et a admis que, sauf si l'on peut prévoir avec suffisamment de certitude que la condition sera remplie, le montant doit être indiqué comme un billet et comptabilisé seulement après son paiement. En l'espèce, il y avait une obligation exécutoire sur l'actif de la société en commandite, mais payable seulement sur les recettes; donc, à son avis, le passif n'était pas éventuel. Il s'est aussi référé au Dictionary for Accountants, de Kohler, qui définit le passif éven- tuel comme celui qui est [TRADUCTION] «dû seule- ment au défaut d'accomplir un acte futur», défini- tion qui, selon lui, ne s'applique pas en l'occurrence. Il a souligné que la Banque et Niaga- ra Television Limited ont manifestement considéré les avances comme un prêt commercial judicieux et que la Société de développement de l'industrie cinématographique canadienne a considéré ses avances comme un investissement un peu hasar- deux. Il l'a comparé à un trou de mine qui peut ne rien produire mais est néanmoins imputé aux états
comptables, ou à une faillite le passif peut n'être jamais remboursé, mais n'en existe pas moins. Il a admis qu'il est nécessaire d'examiner le montant du passif pour voir si le prix payé est réaliste ou non. Il a considéré le coût total supporté par les autres parties comme un critère pour éta- blir le coût supporté par la société en commandite. Il évaluerait les obligations à rembourser à 100% parce qu'il s'agit d'un passif réel. Le seul passif qui, selon lui, ne devrait pas être comptabilisé, c'est celui qui n'apparaît qu'au cas un certain événement se produit. Le chiffre de $179,050 indi- qué comme frais de production différés s'explique par le fait que les créanciers de ces montants ont accepté de ne pas présenter de réclamation si le film ne rapportait pas d'argent; mais les autres postes n'entrent pas dans cette catégorie, en sorte que si ce montant est bien un compte éventuel, les autres montants dus à la Banque, à Niagara, à la Société de développement de l'industrie cinémato- graphique canadienne et aux commanditaires pour leurs investissements dans la société en comman- dite ne le sont pas.
De son côté, Bonham a témoigné que la compta- bilité a pour objet d'assurer une présentation fidèle et que les comptables doivent considérer la matière réelle des transactions. Le principe fondamental de ce qui constitue le coût supporté ],ar un acheteur était déjà bien établi en 1971. Il s'est aussi référé à l'ouvrage intitulé Terminology for Accountants, qui définit le terme dépense comme [TRADUC- TION] «Un débours, un passif encouru ou le trans- fert de biens afin d'obtenir des biens ou des servi ces», et au Bulletin 4 de Accounting Terminology du American Institute of Certified Public Accountants, qui définit le mot coût comme de «l'argent dépensé ... ou un passif encouru, en paiement de biens ou de services reçus ou à rece- voir». Il a admis que le passif à comptabiliser dans le bilan est une dette, même s'il est seulement payable dans l'avenir. Il considère le Manuel de l'Institut canadien des comptables agréés comme la publication la plus autorisée au Canada et cite la recommandation 3290 .01 afférente aux con ditions et rédigée dans les termes suivants:
[TRADUCTION] Toute dette éventuelle qui ne paraît pas au bilan doit figurer d'une autre façon aux états financiers. Il faut en indiquer la nature, le montant approximatif si possible, de même que la nature et la valeur de tout élément d'actif ou de toute autre chose affectée à sa garantie.
Selon le témoin, il y a deux façons de comptabili- ser un passif éventuel: la première consiste à annexer une note aux états financiers, qui signale son existence, et la seconde, à l'indiquer par une réserve de surplus. On peut utiliser l'une ou l'autre des deux méthodes, mais en aucun cas, on ne doit indiquer sur le bilan le passif éventuel comme un passif régulier. Il s'est aussi référé à l'opinion 16 du American Institute of Certified Public Accoun tants qui, selon lui, fait autorité aux États-Unis et a une force persuasive au Canada. Au 79, on peut lire:
[TRADUCTION] Une contrepartie conditionnelle doit, en géné- ral, être comptabilisée lorsque la condition est remplie et que la contrepartie est émise ou susceptible de l'être. En général, l'émission de titres supplémentaires ou la distribution d'une autre contrepartie basée sur les gains au moment les condi tions sont remplies, entraîne un élément de coût supplémentaire d'une compagnie acquise.
et à nouveau au 80:
[TRADUCTION] Condition basée sur les gains. Une contre- partie supplémentaire peut être conditionnelle à ce qu'on main- tienne ou atteigne dans le futur un certain niveau de bénéfices. Lorsque la condition est remplie et que la contrepartie supplé- mentaire peut être distribuée, la compagnie acheteuse doit comptabiliser la juste valeur actuelle de la contrepartie émise ou susceptible d'être émise comme coût supplémentaire de la compagnie acquise.
Cette opinion est analogue au paragraphe .33 de la recommandation 1580 du Manuel de l'Institut canadien des comptables agréés (précité) et à son paragraphe .35, qui est rédigé de la manière suivante:
[TRADUCTION] Dans les cas une contrepartie supplémen- taire devient exigible si un certain niveau de bénéfice est maintenu ou atteint dans les exercices qui suivent l'acquisition, on doit comptabiliser cette contrepartie au moment il est possible de la calculer, comme un élément supplémentaire du prix d'achat. On doit donner le détail d'une telle partie conditionnelle.
Ce Manuel n'a été adopté qu'en mars 1974 et n'était donc pas en vigueur au moment le bilan a été préparé dans la présente affaire. Il constitue une sorte de code des principes acceptés. Bonham s'est aussi référé à l'ouvrage de Skinner, intitulé Accounting Principles, que les témoins reconnais- sent être une source autorisée au Canada. L'auteur y déclare à la page 412:
[TRADUCTION] Dans la mesure le passif assujetti à une clause de paiement conditionnelle est jugé probable, l'acheteur doit prendre des dispositions à son sujet. Si la probabilité de paiement est faible, il suffit d'annexer aux états financiers, une note expliquant la condition.
Bonham a conclu qu'en l'espèce, la meilleure façon d'expliquer le passif excédant les $150,000 effecti- vement versés consistait à annexer des notes au bilan et à ne comptabiliser les montants supplé- mentaires que lorsqu'ils devenaient payables sur les produits de la distribution du film. Selon lui, si le passif est éventuel, la question de son évaluation ne se pose pas, car elle ne doit entrer en ligne de compte que lorsqu'il s'agit d'un passif réel et déter- minable. Il estime, et c'est il diffère totale- ment d'opinion avec Fraser, que si un paiement est conditionnel, il aboutit à un passif éventuel, même lorsqu'il y a un passif nettement délimité à payer sous réserve de la condition. Il s'est déclaré incapa ble de trouver une justification pour traiter la somme de $179,050, indiquée comme frais différés de la production du film, de manière différente du passif de $577,892 indiqué sur le bilan. Il a affirmé que le passif fixé pour payer un montant fixé à une date future indéterminée peut être éventuel ou ne pas dépendre de la méthode employée pour déter- miner la date. S'il est sûr que le paiement sera échu à une certaine date, alors le passif n'est pas éventuel, mais si ce n'est pas seulement la date de paiement, mais son existence même qui est incer- taine, alors le passif est éventuel. Donc, un billet à vue est un passif ordinaire car, bien qu'il ne soit pas certain qu'il donnera lieu à une demande de paiement, ce billet reste sous le contrôle du créan- cier. Dans les livres comptables de Topaz, le coût effectivement dépensé a été capitalisé correcte- ment, mais il n'en est pas de même pour les acheteurs, car ils doivent faire figurer dans leurs états financiers, le coût qu'ils ont supporté. Même une partie du passif de Topaz n'était payable que si le film faisait des recettes, et le témoin n'admet- trait pas qu'il soit indiqué comme passif sur le bilan.
L'avocat de la défenderesse, dans son plaidoyer, s'est référé au dictionnaire juridique de Stroud, volume 1, quatrième édition qui, à la page 575 définit la dette éventuelle comme [TRADUCTION] «Une dette pour laquelle la date de paiement peut arriver ou ne pas arriver» et le passif éventuel comme [TRADUCTION] «un passif qui, en raison de quelque acte accompli par la personne engagée, prendra obligatoirement naissance si un certain événement survient». C'est précisément le cas ici.
On s'est également référé à la définition de passif éventuel que donne l'ouvrage Terminology for Accountants (précité). En voici les termes:
[TRADUCTION] Une obligation légale qui peut découler de circonstances présentes à condition qu'un certain événement survienne. La possibilité d'un passif futur ne constitue pas en soi un passif éventuel. Elle doit découler de circonstances présentes ou d'affaires pendantes.
Les deux parties se sont référées longuement à l'arrêt britannique Winter and Others (Executors of Sir Arthur Munro Sutherland (deceased)) c. Inland Revenue Commissioners 4 qui fait jurispru
dence, bien que les faits alors en cause diffèrent de ceux qui nous occupent. Il s'agissait de droits de succession exigés en vertu de l'article 50(1) du Finance Act 1940, qui traite des déductions à prévoir pour les dettes et charges grevant une compagnie et prévoit que [TRADUCTION] «les com- missaires accorderont une allocation sur la valeur principale de ces biens pour tous les éléments de passif de la compagnie (calculée pour le passif qui n'est pas échu à la date du décès en fonction de sa valeur à cette date et, pour le passif éventuel, en fonction de l'estimation que les commissaires juge- ront raisonnable)». A la page 858, lord Reid déclare, en substance:
[TRADUCTION] Il ne fait aucun doute que les termes «passif» et «passif éventuel» sont plus souvent utilisés à propos des obligations contractuelles que de celles découlant de la loi. Mais je suis certain que si une loi déclare qu'une personne qui a fait quelque chose doit payer un impôt, cet impôt est un «passif» de ladite personne. Si le montant de l'impôt a été fixé et est exigible immédiatement, il constitue clairement un passif. S'il n'est exigible qu'à une certaine date ultérieure, il doit être considéré comme un passif qui «n'est pas échu à la date du décès» au sens l'entend l'art. 50(1). Si l'on n'est pas encore certain de l'exigibilité de l'impôt ou de la date à laquelle il deviendra exigible ou du montant qui sera exigible, pourquoi alors ne s'agirait-il pas d'un passif éventuel en vertu du même article.
On dit que lorsqu'il y a un contrat, il y a une obligation, même si on doit attendre la survenance de certains événements pour voir si quelque chose devient exigible, mais dans le cas qui nous occupe, il n'y a pas d'obligation comparable. Il m'apparaît toutefois qu'il y a une grande similitude. Pour prendre la première phrase, si je vois une montre dans une vitrine et songe à l'acheter, je ne suis pas soumis à un passif éventuel face à son prix. De même, si une loi dit que je dois payer un impôt lorsque je commerce et réalise un profit, je ne suis pas soumis à un passif éventuel avant de commencer mes activités. Dans aucun des deux cas, je ne me suis engagé à quoi que ce soit. Mais, si je conviens par contrat d'accepter des allocations étant entendu que je paierai une somme si je vends plus tard quelque chose au-dessus d'un certain prix, je me suis engagé et je suis soumis à un passif éventuel face au paiement dans ce cas.
4 [1961] 3 All E.R. 855.
A la page 859, il se réfère au Erskine's Institute of the Law of Scotland, Vol. 2, Livre III, titre I, art. 6, dont il cite l'extrait suivant:
[TRADUCTION] Une obligation conditionnelle ou une obliga tion acceptée sous condition, dont l'existence est incertaine, n'a pas force obligatoire tant que la condition n'est pas réalisée; puisque la partie déclare n'avoir l'intention d'être liée par cette obligation qu'au cas cet événement surviendrait, elle n'est redevable de rien tant que cette condition n'existe pas effective- ment; ainsi la condition, c'est-à-dire, l'événement incertain, suspend non seulement l'exécution de l'obligation, mais l'obli- gation elle-même.
Il continue ensuite dans ces termes:
[TRADUCTION] Autant que je sache, cette déclaration n'a jamais été mise en question depuis qu'elle a été écrite il y a deux siècles, et la jurisprudence postérieure à cette déclaration démontre clairement qu'obligation conditionnelle et obligation éventuelle ont le même sens.
Toutefois, il faut se rappeler qu'en l'espèce, aucune loi n'exige qu'à la date les états finan ciers sont préparés, on procède à une estimation de la valeur actuelle de l'obligation de payer le solde du prix d'achat et, en outre, comme la défende- resse le prétend, l'incertitude ne porte pas seule- ment sur la date du paiement de l'obligation, mais aussi sur l'existence même de ce paiement. Dans M.R.N. c. Time Motors Limited 5 , un concession- naire d'automobiles payait les voitures qu'il ache- tait à des particuliers en partie avec des notes de crédit que seul le détenteur pouvait affecter, dans un délai prévu, à l'achat d'une autre voiture, dont la valeur minimale était déclarée. Ces notes figu- raient dans les comptes de la compagnie à leur valeur nominale comme passif et lorsqu'elles étaient remboursées, le prix de vente de la voiture était entré dans le revenu et les notes de crédit éliminées du compte du passif. Les notes n'étaient pas transférables et ne pouvaient pas être rem- boursées en espèces. Le Ministre prétendait qu'el- les constituaient un passif éventuel à exclure du revenu en vertu de l'article 12(1)e) et la compa- gnie soutenait qu'elles créaient une obligation immédiate irrévocable, qui n'était nullement éven- tuelle. Le juge Gibson, faisant droit à l'opinion du Ministre a conclu qu'il y avait incertitude quant aux obligations découlant des notes de crédit à toutes les époques en cause, car la compagnie savait qu'un bon nombre d'entre elles expireraient sans être remboursées. A la page 5083, il dit:
5 68 DTC 5081.
[TRADUCTION] L'expression «compte éventuel' n'est pas définie dans la Loi de l'impôt sur le revenu. Il ne s'agit pas de termes techniques. D'après la définition du dictionnaire, un compte doit présenter un élément d'incertitude avant d'être qualifié de compte éventuel et cet élément d'incertitude doit porter sur l'obligation.
et plus loin:
[TRADUCTION] ... il est évident qu'il y avait incertitude quant aux obligations découlant de ces notes de crédit à toutes les époques en cause, car l'intimée savait qu'un grand nombre d'entre elles expireraient sans être remboursées.
On s'est aussi longuement référé à trois arrêts qui, sans avoir de rapport direct avec l'affaire qui nous occupe, indiquent la tendance de la jurispru dence en la matière. Dans l'affaire britannique City of Birmingham c. Barnes (Inspector of Taxes) 6 , il s'agissait de savoir si la compagnie qui avait posé des rails de tramway et reçu une sub- vention pour défrayer une partie du coût des tra- vaux, pouvait réclamer une allocation à l'égard du coût en capital sur le coût réel des travaux, même si par suite du remboursement, le coût total s'éle- vait à un chiffre inférieur. Elle a été autorisée à réclamer le coût total, en raison d'une interpréta- tion de l'expression «coût réel à la personne» conte- nue dans la loi. En prononçant son jugement, lord
Atkin déclare à la page 298:
[TRADUCTION] Ce qu'un homme paie pour la construction ou pour l'achat d'un ouvrage me semble être le coût supporté par lui; et cela que quelqu'un lui ait donné ou non l'argent pour construire ou acheter; ou, avant l'événement, que quelqu'un ait promis ou non de lui donner l'argent après qu'il aura payé l'ouvrage; ou, après l'événement, que quelqu'un ait promis ou non de lui donner l'argent pour le dédommager de ce qu'il a dépensé.
Le président Jackett (maintenant juge en chef) a invoqué ce jugement dans l'arrêt qu'il a rendu dans Ottawa Valley Power Company c. M.R.N. 7 En l'espèce, l'Hydro-Ontario avait dépensé $1.9 million pour porter le système générateur et de distribution de l'appelante de 25 60 cycles. L'ap- pelante entreprit de changer son contrat qui l'auto- risait à fournir l'électricité de 25 cycles contre un l'autorisant à fournir l'électricité de 60 cycles. Elle a réclamé une allocation à l'égard du coût en capital pour les adjonctions et les améliorations apportées à ses installations et payées par l'Hydro, à titre de contrepartie pour avoir abandonné le droit en capital valable qu'elle avait de livrer l'électricité de 25 cycles pour le reste de la durée
6 [1935] A.C. 292.
7 [1969] 2 R.C.É. 64.
du contrat. L'appel a été rejeté pour le motif que l'appelante n'avait pas établi qu'elle a supporté un coût en capital des biens en question sur la base des arguments qu'elle a soulevés. En prononçant son jugement, le savant juge en chef a déclaré aux
pages 75-76:
[TRADUCTION] Lorsqu'en 1955, l'Hydro-Ontario a pressenti l'appelante, on pouvait honnêtement s'attendre à ce qu'elle convienne de lui payer, pour le changement souhaité au contrat d'approvisionnement, tout ce qu'il pourrait lui en coûter pour apporter les modifications nécessaires à ses installations. Si tel avait été le cas, l'appelante aurait supporté le coût en capital des adjonctions et des améliorations et même s'il lui avait été remboursé par l'Hydro, elle aurait eu droit à une allocation à l'égard du coût en capital afférente au coût en capital qu'elle avait ainsi supporté.
Il a fondé cette conclusion sur l'arrêt Corporation of Birmingham c. Barnes (précité) tout en faisant remarquer qu'on était arrivé au résultat contraire dans un cas analogue aux États-Unis, l'affaire Detroit Edison Co. c. Commissioner of Internal Revenue 8 , qu'il a toutefois distinguée de l'affaire dont il était saisi.
Dans un jugement ultérieur rendu dans l'affaire D'auteuil Lumber Co. Ltd. c. M.R.N. 9 , il a expli- qué avec plus de détails, le raisonnement qu'il a tenu dans l'affaire Ottawa Valley Power Com pany. En l'espèce, dans l'affaire D'auteuil Lumber la province de Québec avait exproprié 95% du domaine d'exploitation forestière de l'ap- pelante qui avait ensuite échangé les 5% restants et son droit à une indemnité pour la partie expropriée contre certains droits de coupe octroyés par la province. L'appelante estimait que le coût en capi tal de ces droits était égal à la valeur des droits de coupe au moment de leur acquisition, tandis que le Ministre prétendait que ledit coût devait être déterminé par la valeur du domaine d'exploitation forestière exproprié, plus les dommages, les inté- rêts et la valeur du reste du domaine au moment de sa cession à la province, ce qui représentait un chiffre beaucoup plus faible. Le jugement a décrété que le coût des droits de coupe supporté par l'appelante équivalait à la valeur de ce qu'elle avait abandonné pour les obtenir. A ce propos, le juge en chef Jackett a déclaré, aux pages 425 et 427:
8 (1942) 319 U.S. 98.
9 [1970] R.C.É. 415.
Puisque l'appelante a fait allusion au jugement que j'ai rendu dans l'affaire Ottawa Valley Power Corporation v. Minister of National Revenue, [1969] 2 R.C.É. 64, aux pp. 75 et suiv., je dois m'y reporter. Dans l'exposé des motifs de ce jugement, plus précisément dans une partie de cet exposé il n'est rien affirmé de définitif, je déclarais que, dans l'hypothèse que j'envisageais alors, un fournisseur paye son usine en concluant un contrat de fournitures à bas prix («by entering into the low-priced supply contract»), et qu'à première vue, ce qu'il paye pour l'usine représente la valeur de l'usine («prima facie, what he pays for the plant is the value of the plant»). Ceci se rapproche beaucoup de ce qu'avançait l'appelante en l'espèce; et, rétrospectivement, je dois admettre que je ne me suis pas exprimé avec toute la prudence nécessaire. Il s'agissait, d'un cas la contrepartie de l'usine consistait à «conclure un contrat de fournitures à bas 'prix»--contrepartie très difficile à évaluer; l'idée que je suis certain d'avoir voulu exprimer est que, à première vue, la valeur de la contrepartie doit être égale à la valeur de ce qui est reçu en échange; par conséquent, lorsqu'il est facile d'évaluer l'objet reçu, mais presque impossible d'éva- luer la contrepartie, comme c'était le cas dans mon hypothèse, il est juste de dire qu'«à première vue, ce qu'il paye pour l'usine représente la valeur de l'usine». Ainsi, dans une espèce donnée, peut se présenter le problème de l'admissibilité des preuves. Lorsque la valeur de la chose donnée en échange du bien en capital peut être déterminée sans plus de difficulté que celle du bien en capital lui-même, je suis porté à penser que la Cour n'accepterait pas facilement que l'on recoure à l'évaluation du bien en capital lui-même plutôt qu'à celle de sa contrepartie, ou en supplément à cette dernière évaluation. D'autre part, lorsque la valeur de la contrepartie est presque impossible à déterminer et que la valeur du bien en capital est presque incontestable, il se peut que le seul moyen de déterminer la valeur de la contrepartie soit de considérer la valeur du bien en capital.
Ces arrêts ont quelque rapport avec la présente action, le demandeur prétendant que le montant de $577,892 qui a été dépensé ou engagé dans la production du film, ce qui n'est pas contesté, est le chiffre qu'il convient d'utiliser comme coût dans le calcul de l'allocation à l'égard du coût en capital, tandis que la défenderesse prétend que les ache- teurs ne peuvent réclamer pour l'année d'imposi- tion 1971, aux fins d'allocation à l'égard du coût en capital, que le montant qu'ils ont réellement dépensé avant la fin de ladite année. En procédant à l'achat, ils ont contracté l'obligation de payer le solde, mais seulement sur les recettes du film, en sorte que tant la date que l'existence du paiement étaient éventuelles et que ces montants ne devaient être réclamés que lorsqu'ils seraient payés et s'ils l'étaient. Certainement, pour employer les termes du juge en chef Jackett dans D'auteuil Lumber, «il est facile d'évaluer l'objet reçu, mais presque impossible d'évaluer la contrepartie». Toutefois, il poursuit: «Lorsque la valeur de la chose donnée en échange du bien en capital peut être déterminée
sans plus de difficulté que celle du bien en capital lui-même, je suis porté à penser que la Cour n'accepterait pas facilement que l'on recoure à l'évaluation du bien en capital lui-même plutôt qu'à celle de sa contrepartie, ou en supplément à cette dernière évaluation.» En l'espèce, il me semble que la valeur de la contrepartie pourra être déterminée avec une parfaite exactitude lorsqu'on aura finalement touché les recettes nettes du film et aucun texte législatif ou autre n'exige que ces recettes soient évaluées à la fin de l'année d'impo- sition 1971, ce que d'ailleurs il aurait été impossi ble de faire.
Je ne peux donc accepter l'argument du deman- deur selon lequel, puisque les acheteurs ont assumé toutes les obligations de Topaz, en plus de verser les $150,000 comptants, ils viennent en lieu et place des vendeurs et que le coût en capital du film supporté par eux est le même que ce qu'il aurait été pour les vendeurs.
La question du poids qu'il convient d'accorder, dans les causes fiscales, aux témoignages des experts en comptabilité a été assez longuement examinée par le président Thorson, alors de la Cour de l'Échiquier dans Publishers Guild of Canada Limited c. M.R.N. 10 Il déclare aux pages 49 et 50:
[TRADUCTION] A ce stade, j'estime opportun de faire quel- ques remarques d'ordre général à propos du rôle des experts en comptabilité dans les causes relatives à l'impôt sur le revenu. La profession de comptable n'est pas statique et les méthodes comptables qu'ils doivent appliquer dans les entreprises leurs services sont requis, ne sont pas immuables. Une méthode comptable qui convient à un genre d'entreprise, ne convient pas nécessairement à un autre. Seule une personne à l'esprit con- ventionnel prétendra qu'il n'y a qu'une seule méthode d'appli- cation universelle; pas une personne raisonnable. Mais les comptables, tout en imaginant des changements dans les méthodes pour faire face à l'évolution du monde des affaires et aux nouvelles façons de diriger une entreprise, doivent toujours s'en tenir au même principe directeur. La comptabilité est, en réalité, l'enregistrement en chiffres, au lieu de mots, des inci dences financières des opérations de l'entreprise à laquelle on l'applique. Le comptable est donc le narrateur des opérations, son récit s'inscrivant en chiffres plutôt qu'en mots. Son récit doit être de nature à expliquer aux personnes qui comprennent le langage des chiffres, la vraie situation de l'entreprise de son client à un moment donné ou pour une période donnée. Le comptable ne peut donc s'acquitter de ses fonctions qu'après avoir soigneusement examiné la manière dont son client exploite son entreprise et lui avoir expliqué la méthode compta-
10 [1956-60] R.C.É. 32.
ble qui lui convient et traduit avec le plus d'exactitude sa situation financière, y compris l'état de ses revenus au moment requis ou pour la période requise.
Mais la Cour ne doit pas renoncer en faveur des comptables, à l'obligation qui est la sienne de déterminer la dette fiscale du contribuable. Il lui appartient d'en décider, conformément à la loi de l'impôt sur le revenu applicable. Il existe en cette Cour un principe de droit reconnu, à savoir qu'il y a une présomption de validité en faveur d'une cotisation à l'impôt sur le revenu tant qu'il n'est pas prouvé qu'elle est erronée et le fardeau de la preuve incombe au contribuable qui l'attaque. Mais si la Cour ne doit pas perdre de vue ce principe, elle doit aussi, dans son effort d'appliquer la loi avec objectivité, garder un oeil vigilant sur les affirmations arbitraires du fisc. Il entre, par exemple, dans sa compétence de permettre ou de refuser une certaine méthode comptable et sa décision en la matière est concluante. Je ne peux exprimer trop clairement l'opinion de la présente cour qui juge que, faute de disposition législative contraire, la validité de toute méthode comptable ne dépend pas de l'autori- sation ou du refus du ministère du Revenu national de l'utiliser. La Cour s'occupe avant tout de vérifier la dette fiscale du contribuable. Donc le principal critère, lorsque le litige porte sur une méthode comptable, est en premier lieu de savoir si la méthode utilisée convient à l'entreprise pour laquelle elle est utilisée et si elle donne une image fidèle de la situation finan- cière du contribuable, puis si cette condition est réalisée, de savoir si la loi de l'impôt sur le revenu applicable en interdit l'usage. Si la loi ne l'interdit pas, alors la Cour doit retenir l'opinion des experts en comptabilité lorsqu'ils affirment que cette méthode est reconnue, convient à l'entreprise du contri- buable et traduit avec le plus d'exactitude l'état de ses revenus, si les motifs de cette opinion sont dignes d'attention.
En l'espèce, la Cour bénéficie de l'opinion de deux experts en comptabilité: Robert Fraser, C.A., associé dans la firme bien connue Thorne, Riddell, qui appuie la méthode comptable employée par les vérificateurs de la société en commandite, la firme également bien connue, Deloitte, Haskins & Sells; et David Bonham, F.C.A., professeur de comptabi- lité et auteur d'un ouvrage en la matière, qui aurait simplement comptabilisé aux fins d'alloca- tion à l'égard du coût en capital les $150,000 payés comptant, et considéré le solde du prix comme un passif éventuel qu'il convient d'indiquer sur des notes annexées au bilan et de comptabiliser aux fins de coût en capital seulement si les paiements sont effectués et pas avant. La loi de l'impôt sur le revenu applicable ne contient certainement aucune interdiction contre l'une ou l'autre des deux méthodes et la question est suffisamment contro- versée pour qu'on puisse dire que toutes deux sont des méthodes comptables reconnues. Toutefois, vu la différence d'opinion entre les experts, il incombe à la Cour de déterminer laquelle des deux métho- des convient le mieux à l'entreprise en question et traduit avec le plus d'exactitude l'état de l'impôt
sur le revenu du demandeur. Ce faisant, elle doit avoir présent à l'esprit, comme l'a déclaré le prési- dent Thorson, qu'il existe une présomption de vali- dité en faveur d'une cotisation à l'impôt sur le revenu, tant qu'il n'est pas prouvé qu'elle est erro- née, et que le fardeau de la preuve incombe au contribuable qui l'attaque.
L'obligation existait manifestement, la société en commandite ne pouvant pas se retirer unilatéra- lement et, selon mes conclusions, il n'y a pas eu de subterfuge en 1971, car il y a toujours eu une possibilité raisonnable que le film produise un revenu ultérieurement. Néanmoins, j'estime que les paiements en excédent de $150,000 en vertu de l'obligation sont suffisamment incertains, tant en ce qui concerne le moment ils seront effectués que l'existence de profits qui permettraient de les effectuer, pour que la meilleure méthode compta- ble soit de considérer ces paiements comme un passif éventuel, en les signalant par des notes, comme le propose Bonham. Quand le film rappor- tera des bénéfices, s'il en rapporte, et que des paiements seront effectués sur le passif, ce qui paraît maintenant possible vu que la distribution du film est en train de commencer, la société en commandite pourra alors comptabiliser ces paie- ments en tant que partie du coût en capital, et le demandeur pourra en bénéficier, en réclamant à ce titre une allocation à l'égard du coût en capital pour l'année, (ou les années) au cours de laquelle, ce coût en capital supplémentaire est créé. Toute- fois, comme je l'ai déjà dit, je ne juge pas correct de mettre sur le même pied le coût en capital de $577,892 supporté ou engagé par les vendeurs et le coût en capital du film supporté par les acheteurs qui, tout en assumant le paiement de cette somme, n'ont en réalité versé que $150,000, le solde étant conditionnel à la production de bénéfices par le film.
Pour les motifs qui précèdent, l'appel est rejeté avec dépens; le même jugement s'applique aux onze autres appels interjetés par les demandeurs. Toutefois, les actions ayant été entendues en même temps sur preuve commune, je n'accorde qu'un seul décompte de frais afférents à l'audition de l'action et, pour les onze autres actions, je n'ac- corde les frais et dépens que jusqu'à la date l'ordonnance relative à leur audition sur preuve commune a été rendue.
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