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T-326-78
Le procureur général du Canada (Requérant) c.
Pierre André Lachapelle et la Commission des relations de travail dans la Fonction publique (Intimés)
et
Jean-Paul Baril (Mis-en-cause)
Division de première instance, le juge Marceau— Montréal, le 6 mars; Ottawa, le 17 mars 1978.
Compétence Brefs de prérogative Prohibition et cer- tiorari Demande de bref de prohibition pour enjoindre aux intimés de s'abstenir, vu leur défaut de compétence, de prendre en considération le grief du mis-en-cause Demande de bref de certiorari pour annuler la décision préliminaire par laquelle l'arbitre s'est déclaré compétent Le mis-en-cause après réception d'une lettre d'avertissement présente une demande d'arbitrage à la Commission intimée Lettre n'entraînant ni congédiement, ni suspension, ni peine pécuniaire L'arbitre avait-il compétence aux termes de la convention collective? Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-35, art. 91(1)a),b) et (2)a),b) Convention collective: Groupe Opérations postales (non-surveillants) Trai- tement interne du courrier et Services postaux complémentai- res, article 10.01.
Le requérant demande un bref de prohibition enjoignant aux intimés de s'abstenir de prendre en considération au mérite le grief présenté à l'arbitrage par le mis-en-cause aux motifs que les intimés n'ont pas compétence. Il demande aussi un bref de certiorari pour annuler la décision préliminaire par laquelle l'arbitre s'est déclaré compétent pour entendre l'affaire. Le mis-en-cause, un employé des postes, a présenté un grief après avoir reçu une lettre d'avertissement qui devait être déposée à son dossier. Non satisfait des résultats obtenue aux divers paliers de son grief, il a présenté une demande d'arbitrage à la Commission-intimée. L'employeur a fait valoir que la Commis sion n'avait pas compétence étant donné que la lettre n'entraî- nait ni congédiement, ni suspension, ni peine pécuniaire. L'arbi- tre désigné a rendu une décision préliminaire statuant que le grief était susceptible d'arbitrage aux termes de l'article 91 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique étant donné que le texte d'un article de la convention collective portait que dans les «cas de congédiement et de discipline= il incombe à l'employeur de prouver qu'il a pris des dispositions pour une juste cause.
Arrêt: le bref de prohibition sera émis. Seul l'alinéa b) de l'article 91(1) s'applique pour déterminer le droit du mis-en- cause de soumettre son grief à l'arbitrage et partant le pouvoir de l'arbitre de s'en saisir. Un article de la convention collective régissant les relations de travail des parties ne permet pas aux intimés d'invoquer les dispositions de l'alinéa a) de l'article 91(1) pour prétendre à une juridiction que cet alinéa b) leur dénie manifestement. Le Parlement a voulu envisager globale- ment tous les griefs ayant trait à des mesures disciplinaires
imposées à des individus pour ne retenir que ceux relatifs à des mesures ayant entraîné le congédiement, la suspension ou une peine pécuniaire. La disposition de l'alinéa b) en est une précise, complète par elle-même, qui s'applique à tout employé régi ou non par une convention collective. C'est la seule appli cable lorsque le grief porte sur l'imposition d'une mesure disciplinaire. Ce grief n'a pas »[trait à] l'interprétation ou [à] l'application, en ce qui le concerne, d'une disposition [de la] convention collective», au sens ces termes sont utilisés dans l'alinéa a) de l'article 91(1).
DEMANDE. AVOCATS:
Annie Côté-Pistono pour le requérant.
Aucun pour les intimés.
M. Beaulieu pour le mis-en-cause.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour le
requérant.
Aucun pour les intimés.
Trudel, Nadeau, Létourneau, Lesage &
Cleary, Montréal, pour le mis-en-cause.
Voici les motifs de l'ordonnance rendus en fran- çais par
LE JUGE MARCEAU: Le procureur général du Canada demande ici par sa requête l'émission d'un bref de prohibition enjoignant aux intimés—un membre arbitre de la Commission des relations de travail dans la Fonction publique et la Commission elle-même—de s'abstenir, vu leur défaut de com- pétence, de prendre en considération au mérite le grief présenté à l'arbitrage, le 3 mars 1977, par le mis-en-cause, un employé du ministère des Postes du Canada. L'arbitre-intimé ayant déjà affirmé, par décision préliminaire, l'existence de sa compé- tence, la requête demande, en même temps, l'émis- sion d'un bref de certiorari en vue d'obtenir l'an- nulation de cette décision.
C'est le mis-en-cause qui a comparu pour con- tester la requête. Son procureur a fait valoir prin- cipalement des arguments de fond: ils doivent être examinés. Il a aussi prétendu subsidiairement que la requête était, à ce stade-ci des procédures arbi- trales, prématurée et inopportune: c'est une prétention qui ne saurait tenir et dont il convient de disposer préliminairement.
Le procureur reconnaît que les conditions d'exercice du pouvoir de surveillance attribué à la
Cour par l'article 18 de sa loi constitutive existent et que ni l'article 28 de cette loi ni la clause restrictive contenue dans l'article 100(2) de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publi- que, S.R.C. 1970, c. P-35, ne font obstacle à l'émission des ordonnances recherchées, puisque d'une part la décision attaquée n'est qu'interlocu- toire (In re la Loi antidumping et in re Danmor Shoe Company Ltd. [ 1974] 1 C.F. 22), et que d'autre part l'attaque porte sur une prétention d'absence de juridiction (voir parmi bien d'autres, Québec Téléphone c. La Compagnie de Téléphone Bell du Canada [1972] R.C.S. 182; British Columbia Packers Limited c. Le Conseil canadien des relations du travail [1974] 2 C.F. 913). Il soutient néanmoins qu'il serait inopportun pour la Cour d'intervenir à ce stade-ci parce que de toute façon la prise de position initiale de l'arbitre- intimé pourra éventuellement faire l'objet d'un examen en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale lorsqu'elle sera confirmée dans la décision finale à intervenir. On verra cependant que les faits mis en cause sont simples et non contestés, que les données du problème de compé- tence à résoudre sont d'ores et déjà clairement établies, que la prise de position de l'arbitre-intimé peut avoir dès maintenant un impact certain sur les relations des parties et qu'une clarification immédiate de la situation est d'un intérêt évident. Tout milite en faveur d'un exercice immédiat par cette cour du pouvoir et du devoir de surveillance qui lui incombe. Le procureur général a raison de demander que la question de compétence soit tran- chée sans délai. (Voir entre autres: Bell c. Ontario Human Rights Commission [1971] R.C.S. 756; Maritime Telegraph & Telephone Company Limited c. Le Conseil canadien des relations du travail [1976] 2 C.F. 343.) La requête doit être examinée à son mérite.'
J'ai dit que les faits étaient simples; ils ont même peu d'importance en somme, car la question à résoudre est facile à poser par-delà les particula- rités des cas d'espèce; ils permettront néanmoins— ce qui s'impose dans le cadre de procédures judi- ciaires—de concrétiser le problème. C'est l'affida-
' Je parle ici, à ce stade préliminaire, de la requête dans son ensemble, non eu égard à ses conclusions spécifiques. Je dirai en effet, à la fin, qu'une demande de certiorari me semble a priori irrecevable à l'égard d'une décision comme celle ici mise en cause.
vit déposé à l'appui de la requête qui en fait état. Le 11 mai 1976, le mis-en-cause, un manieur de dépêches du ministère des Postes, recevait une lettre dont copie devait être déposée à son dossier, lettre qui lui reprochait d'avoir le 2 mai précédent, selon les conclusions d'un rapport interne, brisé une clé du démarreur d'une gerbeuse, et lui rappe- lait qu'une telle action, présumément préméditée, pouvait constituer un délit criminel. Le 8 juin, il logeait un grief contre la lettre, grief qui suivit son cours et fut régulièrement présenté à chacun des paliers que prévoit la convention collective régis- sant ses conditions de travail, soit celle intervenue le 12 décembre 1975 entre le Conseil du Trésor d'une part et le Syndicat des postiers du Canada pour le groupe «Opérations postales (non-surveil- lants) Traitement interne du courrier et Services postaux complémentaires», d'autre part (je m'y référerai ci-après en parlant de la convention applicable ou en vigueur). Non satisfait des résul- tats obtenus, le mis-en-cause, le 3 mars 1977, s'adressait à la Commission-intimée et requérait un arbitrage. La Commission donna suite à la demande et désigna l'intimé comme arbitre. L'em- ployeur aussitôt donna avis de ses objections quant au pouvoir de la Commission et de l'arbitre dési- gné de donner suite à la demande d'arbitrage, objections fondées sur ce que le grief avait pour objet une simple lettre d'avertissement n'ayant entraîné ni congédiement, ni suspension, ni peine pécuniaire. Le 9 juin l'arbitre désigné entendait les parties quant à cette question de compétence et, le 16 décembre, il rendait une décision préliminaire statuant que, étant donné les conditions d'emploi prévues dans la convention collective applicable, le grief soumis en était un susceptible d'arbitrage aux termes de l'article 91 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, et que partant il avait compétence pour en disposer.
Le procureur général requérant soutient que cette décision est erronée, que le grief du mis-en- cause n'est pas susceptible d'arbitrage et que par conséquent les intimés n'ont pas compétence pour s'en saisir et en décider. C'est cette prétention qu'il s'agit de confirmer ou d'infirmer.
Il est évident qu'il faut se demander au départ d'où vient ce droit d'un employé de soumettre un grief à arbitrage devant la Commission-intimée ou
plus précisément devant un arbitre ou un conseil arbitral agissant dans le cadre de règles établies par elle. La réponse ne fait pas de doute. C'est la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique qui a organisé ce régime d'arbitrage et a chargé la Commission qu'elle créait d'en surveiller la mise en oeuvre. C'est donc dans cette loi seule qu'on peut trouver la source du droit d'un employé de recourir à la procédure d'arbitrage et en consé- quence celle du pouvoir de la Commission ou de l'arbitre désigné par elle de se saisir d'un grief qui lui est soumis. Or, un article de cette loi, l'article 91, s'emploie à préciser le cas un grief peut être renvoyé à arbitrage, et il le fait de façon exhaus tive, sans déléguer à qui que ce soit le pouvoir de décider autrement à cet égard: c'est lui seul qui doit en conséquence être considéré. Le raisonne- ment peut paraître simpliste; il méritait néanmoins d'être exprimé pour contrer à l'avance toute tenta tive de chercher ailleurs que dans la Loi, soit dans la convention collective applicable et spécialement dans la clause 9.23 de cette convention portant sur la procédure de grief et d'arbitrage, la source du droit de l'employé et partant de la compétence de la Commission ou de l'arbitre. En fait, l'arbitre- intimé ici a rapidement rejeté l'argument qu'on avait tenté de faire valoir devant lui à cet effet et le procureur du mis-en-cause n'a pas insisté devant moi. Je ne m'y attarde pas: les parties dans leur convention ne pouvaient prétendre stipuler à l'en- contre de ce que le Parlement a prescrit, dans cet article 91 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, quant au droit d'un employé de recourir à la procédure d'arbitrage.
Cet article 91 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique se lit comme suit:
91. (1) Lorsqu'un employé a présenté un grief jusqu'au dernier palier de la procédure applicable aux griefs inclusive- ment, au sujet
a) de l'interprétation ou de l'application, en ce qui le con- cerne, d'une disposition d'une convention collective ou d'une décision arbitrale, ou
b) d'une mesure disciplinaire entraînant le congédiement, la suspension ou une peine pécuniaire,
et que son grief n'a pas été réglé d'une manière satisfaisante pour lui, il peut renvoyer le grief à l'arbitrage.
(2) Lorsqu'un grief qui peut être présenté par un employé à l'arbitrage est un grief relatif à l'interprétation ou l'application, en ce qui le concerne, d'une disposition d'une convention collec tive ou d'une décision arbitrale, l'employé n'a pas le droit de renvoyer le grief à l'arbitrage à moins que l'agent négociateur
de l'unité de négociation à laquelle s'applique la convention collective ou la décision arbitrale ne signifie de la manière prescrite
a) son approbation du renvoi du grief à l'arbitrage; et
b) son acceptation de représenter l'employé dans les procé- dures d'arbitrage.
Il est acquis qu'une lettre d'avertissement comme celle dont il s'agit ici constitue une mesure disciplinaire même si elle n'entraîne aucune peine spécifique immédiate. Les parties ne le contestent pas et ainsi en a décidé l'arbitre suivant en cela des décisions arbitrales antérieures qui, à mon avis, étaient fondées. Déposée au dossier d'un employé, une lettre de cette nature joue le rôle d'une pre- mière étape dans un système de discipline gradué, établi dans le cadre de relations de travail, et elle forme une note défavorable susceptible d'avoir des répercussions sur l'avancement de l'intéressé et sur l'importance de mesures disciplinaires pouvant lui être imposées éventuellement. Le grief porte donc bien sur l'imposition d'une mesure disciplinaire et c'est de toute évidence comme telle qu'il a été présenté. La lecture de l'article 91 de la Loi paraît ainsi de prime abord concluante puisqu'en vertu de son alinéa (1)b), seule une mesure disciplinaire entraînant le congédiement, la suspension ou une peine pécuniaire peut faire l'objet d'un grief pou- vant être soumis à arbitrage devant la Commis sion. Il arrive, cependant, que la convention collec tive en vigueur du 12 décembre 1975, dans le paragraphe initial de son article 10 intitulé «disci- pline, suspension et congédiement», s'exprime comme suit:
10.01 Fardeau de la preuve
Dans les cas de congédiement et de discipline il incombe à l'employeur de prouver qu'il a pris des dispositions pour une juste cause. La preuve doit se limiter aux motifs exposés dans l'avis de congédiement ou de discipline communiqué à l'employé.
Ce texte, selon l'arbitre-intimé, change complète- ment la situation et permet d'éviter la conclusion qui semblait de prime abord inévitable. Il y a en effet, dit-il dans sa décision, une disposition «qui stipule qu'une mesure disciplinaire doit s'appuyer sur une juste cause». Or, ce que le mis-en-cause prétend c'est que la mesure disciplinaire que cons- titue la lettre versée à son dossier lui a été imposée sans juste cause. Son grief par conséquent a trait à l'application d'une disposition «spécifique» et «pré- cise» de la convention collective, et s'il n'est évi-
demment pas susceptible d'être soumis à arbitrage en vertu de l'alinéa b) de l'article 91(1) de la Loi, il l'est en vertu de l'alinéa a). En raisonnant de cette façon, l'arbitre-intimé s'opposait directement à une autre décision arbitrale rendue quelques jours plus tôt (Salter et Pursaga, 166-2-1572 et 166-2-1604), mais, à son avis, la façon de voir de son collègue n'était pas défendable et c'était le raisonnement du syndicat qu'il fallait approuver.
C'est la valeur de ce raisonnement que met en cause précisément la présente requête.
Il s'agit, à mon sens, d'un raisonnement qu'on ne peut pas accepter.
Premièrement. Je ne crois pas que l'on puisse interpréter isolément l'un de l'autre les deux ali- néas a) et b) de l'article 91(1) de cette Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique. En édictant ce texte, le Parlement entendait manifes- tement limiter et préciser les cas un employé, syndiqué ou non, aurait droit de soumettre son grief à ce mode d'arbitrage qu'il établissait d'auto- rité et dont il confiait la surveillance à cette com mission qu'il venait de créer. Il est clair que pour lui tous les cas de griefs n'exigeaient pas l'interven- tion d'un arbitre officiel par-delà les paliers de la procédure ordinaire. Il considéra d'abord, à l'ali- néa a), les cas un certain intérêt collectif peut être rejoint (d'où d'ailleurs l'exigence du paragra- phe (2) de l'article 91); puis à l'alinéa b), il en vint aux cas des mesures disciplinaires l'intérêt privé évidemment domine. En s'exprimant comme il l'a fait, le Parlement me semble avoir voulu envisager globalement tous les griefs ayant trait à des mesu- res disciplinaires imposées à des individus pour ne retenir que ceux relatifs à des mesures ayant entraîné le congédiement, la suspension ou une peine pécuniaire. A mon sens, cette disposition de l'alinéa b) en est une précise, complète par elle- même, qui s'applique à tout employé régi ou non par une convention collective, et c'est la seule applicable lorsque le grief porte sur l'imposition d'une mesure disciplinaire. A l'objection qu'inter- préter ainsi l'alinéa b) risque de conduire à limiter la portée de l'alinéa a), je réponds qu'il est fré- quent qu'une disposition précise limite la portée d'une disposition plus générale, surtout lorsque les deux sont édictés successivement et que la compré- hension du texte dans sa totalité exige qu'il en soit
ainsi.
Deuxièmement. Je doute que l'on puisse consi- dérer que le grief du mis-en-cause en l'instance a véritablement «[trait à] l'interprétation ou [à] l'ap- plication, en ce qui le concerne, d'une disposition [de la] convention collective», au sens ces termes sont utilisés dans l'alinéa a) de l'article 91(1). Qu'une mesure disciplinaire ne puisse être imposée sans juste cause est une exigence générale et de pur bon sens. En formulant la clause 10.01, les parties à la convention n'avaient certes pas l'idée de faire de cette exigence, une règle spécifi- que et précise devant particulariser leur entente, règle dont le sens et la portée étaient susceptibles de soulever en elle-même des problèmes d'interpré- tation et d'application au niveau des cas pratiques. Au reste, il ne faut pas donner à l'article une portée et un objectif qu'on n'a pas prétendu lui donner: c'est du fardeau de la preuve dont il est question à cette clause 10.01 de la convention, et même du fardeau de la preuve entendu au sens procédural. Attribuer à une telle clause (et à d'au- tres de même espèce, comme par exemple «l'em- ployeur doit être juste» ou «l'employeur ne doit pas punir un employé sans raison», qui ne précisent pas une condition d'emploi et à laquelle d'ailleurs pas un employeur ne songerait un moment ne pas souscrire), l'effet de faire tomber, dans le champ de l'arbitrage requis par la Loi et confié à la surveillance de la Commission-intimée sous l'égide de l'alinéa a) de l'article 91(1), tout grief portant sur une mesure disciplinaire—quelle qu'en soit l'importance et bien qu'aucun intérêt collectif ne soit atteint—m'apparaît inacceptable, parce que non conforme à la Loi telle que je la comprends. D'ailleurs, s'il en était autrement, il faudrait en déduire que le Parlement a laissé à la convention des parties le soin d'étendre à volonté le droit à arbitrage et partant la compétence de l'arbitre, permettant en même temps à toute fin pratique qu'une discrimination quasi automatique s'installe entre les employés syndiqués et les autres; or, on ne saurait admettre qu'une délégation de pouvoir de cet ordre ait pu être faite de façon aussi indirecte et camouflée et il n'est pas pensable qu'une discri mination entre employés de l'État ait été voulue de cette façon.
Bref, je crois que seul l'alinéa b) de l'article 91 peut s'appliquer pour déterminer le droit du mis-en-cause de soumettre son grief à l'arbitrage et partant le pouvoir de l'arbitre de s'en saisir. La présence de la clause 10.01 dans la convention collective régissant les relations de travail des par ties ne permet pas aux intimés d'invoquer les dispositions de l'alinéa a) de l'article 91(1) pour prétendre à une juridiction que cet alinéa b) leur dénie manifestement.
Le bref de prohibition demandé par le requérant sera donc émis enjoignant aux intimés de ne pas tenir d'audition pour déterminer au mérite le bien- fondé du grief présenté à l'arbitrage par le mis-en- cause le 3 mars 1977, vu leur défaut de compétence.
Je ne crois toutefois pas qu'il y ait lieu d'émettre parallèlement le bref de certiorari sollicité, la déci- sion de l'arbitre-intimé rendue préliminairement n'étant pas, prise en elle-même, une décision ayant effet juridique autonome, puisqu'il n'est pas dans les prérogatives de l'arbitre de déterminer, de façon générale et par-delà le cas d'espèce envisagé, sa propre compétence ou celle de la Commission. (Voir: Bell c. Ontario Human Rights Commission, précité; In re la Loi Antidumping et in re Danmor Shoe Company Ltd., précité.)
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