A-178-78
Trans Mountain Pipe Line Company Ltd. (Appe-
lante)
c.
L'Office national de l'énergie, Dome Petroleum
Limited, Gulf Oil Canada Limited, Interprovincial
Pipe Line Limited, Shell Canada Limited, Trans-
Canada Pipelines Limited, Trans-Northern Pipe
Line Company, Air Canada, Canadian Pacific Air
Lines Limited, Japan Airlines Co. Ltd., Pacific
Western Airlines Ltd., Qantas Airways Ltd.,
United Airlines Inc., Western Airlines Inc., le
ministre de l'Énergie de l'Ontario, le procureur
général du Québec, et le procureur général de la
Colombie-Britannique (Intimés)
Cour d'appel, les juges Pratte et Ryan et le juge
suppléant Kerr—Vancouver, les 19, 20, 21 et 23
février 1979.
Couronne — Oléoducs Demande d'ordonnance déposée
par l'appelante en vue de modifier les droits imposés par elle,
au motif que ceux-ci ne constituent pas une contrepartie
suffisante pour les services qu'elle rend — Rapport présenté à
l'Office par le membre président après qu'il eut recueilli des
preuves et entendu des plaidoiries — Office adoptant par la
suite le rapport comme étant sa propre décision et ce, sans
donner à l'appelante l'occasion de se faire entendre — Appel
interjeté de la décision rendue par l'Office — Est-ce que le fait
de ne pas avoir donné à l'appelante l'occasion de se faire
entendre constitue un déni de justice naturelle? — Loi sur
['Office national de l'énergie, S.R.C. 1970, c. N-6, art. 14(1),
18, et 50.
APPEL.
AVOCATS:
D. M. M. Goldie, c.r. pour l'appelante.
P. G. Griffin pour l'intimé l'Office national de
l'énergie.
Colin L. Campbell, c.r. pour l'intimée Trans-
Canada Pipelines Limited.
L. G. Nathanson et S. R. Schachter, pour
l'intimé le procureur général de la Colombie-
Britannique.
Personne n'a comparu pour les intimés sui-
vants: Dome Petroleum Limited, Gulf Oil
Canada Limited, Interprovincial Pipe Line
Limited, Shell Canada Limited, Trans-North
ern Pipe Line Company, Air Canada, Canadi-
an Pacific Air Lines Limited, Japan Airlines
Co. Ltd., Pacific Western Airlines Ltd.,
Qantas Airways Ltd., Western Airlines Inc.,
le ministre de l'$nergie de l'Ontario et le
procureur général du Québec.
PROCUREURS:
Russell & DuMoulin, Vancouver, pour
l'appelante.
L'Office national de l'énergie, Ottawa, pour
l'intimé l'Office national de l'énergie.
Ladner Downs, Vancouver, pour l'intimée
Dome Petroleum Limited.
McCarthy & McCarthy, Toronto, pour l'inti-
mée TransCanada Pipelines Limited.
Davis & Company, Vancouver, pour l'intimé
le procureur général de la Colombie-Britanni-
que.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement prononcés à l'audience par
LE JUGE PRATTE: Il s'agit de l'appel, interjeté
conformément à l'article 18 (1) de la Loi sur l'Of-
fice national de l'énergie', d'une ordonnance de
l'Office prescrivant les droits que pouvait imposer
l'appelante à compter du ler février 1978.
L'appelante possède et exploite un oléoduc ins
tallé à partir d'un point situé près d'Edmonton
(Alberta) jusqu'à Burnaby (Colombie-Britanni-
que); un court embranchement s'étend jusqu'à
Sumas, sur la frontière internationale. L'appelante
relève de la compétence de l'Office national de
l'énergie qui a le pouvoir de réglementer les droits
qu'elle peut imposer.
Le 14 mars 1977, l'appelante a demandé à
l'Office, en vertu de l'article 50 de la Loi sur
l'Office national de l'énergie, de rendre une ordon-
nance modifiant les droits imposés par l'appelante
pour le motif qu'ils étaient injustes et déraisonna-
bles, car ils étaient fixés à un niveau trop bas pour
que l'appelante obtienne une rémunération juste et
raisonnable en contrepartie des services qu'elle
rendait.
En vertu du paragraphe 14(1) de la Loi, l'Office
a autorisé l'un de ses membres (ci-après appelé le
«membre président») à recueillir des preuves et à
entendre des plaidoiries relatives à la demande de
l'appelante en vue de présenter un rapport à l'Of-
fice. Le membre président a tenu des audiences
publiques auxquelles l'appelante et d'autres parties
' S.R.C. 1970, c. N-6, art. 18.
intéressées ont eu l'occasion de produire des preu-
ves, de contre-interroger les témoins et de présen-
ter leurs arguments; par la suite, il a présenté à
l'Office un rapport sur ses conclusions et recom-
mandations. Après avoir examiné [TRADUCTION]
«le rapport du membre président et les preuves
fournies à l'audience», l'Office a adopté le rapport
comme étant sa propre décision. C'est en fait
l'ordonnance sur laquelle porte l'appel.
L'appelante conteste en premier lieu la procé-
dure suivie par l'Office en application du paragra-
phe 14(1) dont voici le libellé:
14. (1) L'Office ou le président peut autoriser n'importe
lequel des membres à faire un rapport à l'Office sur tout sujet
ou question découlant des opérations de l'Office, et la personne
ainsi autorisAe a tous les pouvoirs de l'Office pour recueillir des
témoignages ou acquérir les renseignements nécessaires aux
fins de ce rapport. Sur présentation d'un tel rapport à l'Office,
on peut l'adopter à titre d'ordonnance de l'Office ou il peut être
autrement statué sur ledit rapport selon que l'Office l'estime
opportun.
A cet égard, la seule plainte de l'appelante se
fonde, si j'ai bien compris les avocats, sur le fait
que l'Office, avant de rendre sa décision sur le
rapport du membre président, n'a pas donné à
l'appelante l'occasion d'exposer ses vues sur le
contenu du rapport. L'appelante a fait valoir que
la justice naturelle exigeait qu'on lui permette de
le faire. Je ne partage pas cette opinion. L'appe-
lante avait le droit de se faire entendre pour
justifier sa demande, mais elle n'avait pas droit à
un type particulier d'audience. On ne peut cepen-
dant contester le fait que cette audience lui a été
accordée, étant donné que ce dossier démontre que
les preuves fournies et que les plaidoiries présen-
tées par l'appelante devant le membre président
ont été communiquées à l'Office. A mon avis, la
justice naturelle n'exigeait pas que l'on accorde à
nouveau à l'appelante le droit d'exposer ses vues
sur le rapport du membre président. La rédaction
de ce rapport faisait partie du processus de déci-
sion de l'Office et je ne pense pas que l'appelante
avait le droit de s'ingérer dans ce processus. Les
droits du requérant demeurent les mêmes, me
semble-t-il, que la décision soit rendue ou non
conformément au paragraphe 14(1): dans les deux
cas, le requérant a droit à une audience pour
justifier sa demande. Cependant, le requérant n'a
droit à aucune audience supplémentaire lorsque
l'Office choisit de recourir à la procédure prévue
au paragraphe 14(1).
Les autres motifs d'appel portent sur la méthode
suivie et sur les facteurs dont a tenu compte
l'Office pour fixer les droits que pouvait imposer
l'appelante. Je n'aurai pas à examiner isolément
chacun de ces motifs, étant donné que, à mon avis,
ils doivent tous être rejetés pour la même raison:
ils ne portent sur aucune question de droit.
En vertu des articles 50 et suivants de la Loi,
l'Office avait pour fonction de fixer les droits qu'il
estimait, dans les circonstances, «justes et raison-
nables».
De toute évidence, c'est à l'Office et non à la
Cour de décider, en vertu de la Loi, si ces droits
sont justes et raisonnables. La signification des
mots «justes et raisonnables» contenus à l'article 52
est évidemment une question de droit, qu'on peut
néanmoins très facilement résoudre, étant donné
que ces mots ne sont pas utilisés dans un sens
technique particulier: on ne peut donc dire qu'ils
sont obscurs et qu'ils nécessitent une interpréta-
tion. La difficulté vient de la méthode que l'Office
doit utiliser et des facteurs dont il doit tenir
compte pour évaluer le caractère juste et raisonna-
ble des droits. La loi n'aborde pas ces questions. A
mon avis, elles doivent être laissées à la discrétion
de l'Office qui possède, dans ce domaine, des
compétences que n'ont habituellement pas les
juges. Si l'Office porte son attention sur la bonne
question, comme il l'a manifestement fait dans la
présente affaire, c'est-à-dire sur le caractère juste
et raisonnable des droits, et s'il ne fonde pas sa
décision sur des considérations manifestement non
pertinentes, il ne commet pas d'erreur de droit
simplement parce qu'il évalue le caractère juste et
raisonnable de ces droits selon une méthode diffé-
rente de celle qu'aurait adoptée la Cour.
Pour ces motifs, je rejetterais l'appel.
* * *
LE JUGE RYAN y a souscrit.
* * *
LE JUGE SUPPLÉANT KERR y a souscrit.
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