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A-98-79
Le procureur général du Canada (Requérant) c.
Paul Murby, Lorne Butchart et J. David Lee, en leur qualité de membres du Comité d'appel établi en vertu de l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-32 et Ronda Lee (Intimés)
Cour d'appel, les juges Heald et Le Dain et le juge suppléant Kerr—Ottawa, 20 novembre 1979 et 14 janvier 1980.
Examen judiciaire Fonction publique Demande d'exa- men et d'annulation de la décision par laquelle le Comité d'appel a accueilli les appels formés par l'intimée Lee contre certaines nominations Bien qu'ayant été reçue aux con- cours, Lee n'a pas été nommée aux postes considérés parce qu'on lui refusait l'habilitation au secret Il y avait à déterminer si la décision du commissaire de la G.R.C. relative à l'habilitation au secret était, en application de l'art. 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, susceptible d'exa- men en appel Requête accueillie Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-32, art. 6, 8, 10, 21 Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-35, art. 90(2), 112(1),(2) Règlement sur l'emploi dans la Fonction publique, C.R.C. 1978, Vol. XIV, c. 1337, modifié, art. 7(4) Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2' Supp.), c. 10, art. 28.
Il s'agit d'une requête tendant à l'examen et à l'annulation de la décision par laquelle le Comité intimé a accueilli les appels formés par l'intimée Lee contre certaines nominations. Lee a été reçue à deux concours l'habilitation au secret était une des qualités requises. L'habilitation au secret requise lui ayant été refusée, elle n'a pas été nommée aux postes qui se trou- vaient vacants. Les appels de Lee devant le Comité intimé ont été accueillis. Le requérant fait valoir que la décision du Commissaire relative à l'habilitation au secret n'est pas suscep tible d'examen en appel sous le régime de l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique. L'article 112 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique prévoit que l'employeur n'a pas à faire quoi que ce soit à l'encontre d'une directive relative à la sécurité.
Arrêt: la requête est accueillie. Il n'appartenait pas au Comité d'appel d'examiner si le commissaire de la G.R.C. avait suivi la procédure appropriée pour refuser l'habilitation au secret. Le Comité d'appel avait pour seul mandat de déterminer si la nomination des personnes occupant les deuxième et troi- sième places sur chaque liste avait été faite selon le principe du mérite tel qu'il est prévu par l'article 10 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique et modifié par l'article 112(1) de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique. Vu l'application de l'article 112(1), le Comité d'appel n'avait pas le droit de s'enquérir des raisons pour lesquelles le Commissaire avait refusé d'accorder l'habilitation au secret. La compétence qu'a le Comité d'appel pour déterminer si le principe du mérite a été observé en matière de nominations se limite à l'examen de toutes les qualités requises pour le concours, sauf l'admissibilité à l'habilitation au secret.
Le juge Le Dain: Le Comité s'est arrogé le pouvoir de vérifier le «caractère raisonnable» du refus par le sous-chef d'accorder l'habilitation au secret. Un Comité d'appel saisi par application de l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique n'est pas investi de ce pouvoir. Il n'est pas certain que l'action envisagée par le Comité d'appel soit expres- sément interdite par l'article 112 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique qui vise surtout à expliciter l'interprétation de lois qui auraient pour effet d'obliger l'em- ployeur à faire quelque chose à l'encontre d'une directive en matière de sécurité. L'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique porte sur ce que peut ou ne peut pas faire la Commission. Le pouvoir d'assujettir la nomination à l'habilita- tion au secret et le pouvoir de déterminer s'il y a lieu d'accorder cette habilitation relèvent du pouvoir de commandement que la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique n'a ni supprimé ni confié à la Commission. La décision d'un sous-chef en matière d'habilitation au secret n'a rien à voir avec l'appréciation du mérite relatif d'un candidat.
Arrêt mentionné: Brown c. La Direction des appels de la Commission de la Fonction publique [1975] C.F. 345.
DEMANDE d'examen judiciaire. AVOCATS:
W. J. A. Hobson, c.r. pour le requérant. Personne n'a comparu pour le compte des intimés P. Murby, L. Butchart et J. D. Lee. M. W. Wright, c.r. pour l'intimée Ronda Lee.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour le requérant.
Soloway, Wright, Houston, Greenberg, O'Grady, Morin, Ottawa, pour l'intimée Ronda Lee.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE HEALD: Il s'agit en l'espèce d'une requête fondée sur l'article 28 et tendant à l'exa- men et à l'annulation de la décision en date du 29 janvier 1979 du Comité intimé qui a accueilli les appels formés par l'intimée Ronda Lee contre certaines nominations faites à la suite de concours tenus au sein de la Gendarmerie royale du Canada (ci-après appelée la G.R.C.).
L'intimée Ronda Lee a été reçue à deux con- cours tenus conformément à la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-32, et au Règlement y afférent. Il s'agissait de deux concours restreints organisés conformément au
Règlement sur l'emploi dans la Fonction publi- que, C.R.C. 1978, Vol. XIV, c. 1337, modifié, et destinés à établir des listes d'admissibilité aux postes vacants. Ces deux concours ont donné lieu à deux listes d'admissibilité, chacune portant les noms de quatre candidats reçus par ordre de mérite. L'intimée Ronda Lee occupait la première place sur l'une et l'autre listes. L'avis de concours énumérait les fonctions de chaque poste et les qualités requises, dont l'uhabilitation aux informa- tions classifiées Très secret» dans les deux cas.
A la suite de l'établissement et de la publication de ces deux listes d'admissibilité, l'intimée fut informée par la G.R.C. qu'elle ne bénéficiait pas de l'uhabilitation aux informations classifiées Très secret». Elle n'a donc pas été nommée aux postes qui se trouvaient vacants à l'époque. C'étaient les personnes occupant les deuxième et troisième places sur chaque liste qui y ont été nommées. L'intimée Ronda Lee interjeta appel de ces déci- sions au Comité intimé, établi en application de l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique'.
Devant le Comité d'appel, le requérant a sou- tenu que ce Comité n'avait pas compétence pour s'enquérir des motifs qui avaient poussé le service
L'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publi- que porte:
21. Lorsque, en vertu de la présente loi, une personne est nommée ou est sur le point de l'être et qu'elle est choisie à cette fin au sein de la Fonction publique
a) à la suite d'un concours restreint, chaque candidat non reçu, ou
b) sans concours, chaque personne dont les chances d'avan- cement, de l'avis de la Commission, sont ainsi amoindries,
peut, dans le délai que fixe la Commission, en appeler de la nomination à un comité établi par la Commission pour faire une enquête au cours de laquelle il est donné à l'appelant et au sous-chef en cause, ou à leurs représentants, l'occasion de se faire entendre. La Commission doit, après avoir été infor- mée de la décision du comité par suite de l'enquête,
c) si la nomination a été faite, la confirmer ou la révoquer, ou
d) si la nomination n'a pas été faite, la faire ou ne pas la
faire,
selon ce que requiert la décision du comité.
employeur à refuser d'accorder à l'intimée Ronda Lee le niveau requis d'habilitation au secret. En conséquence, le requérant n'a fourni aucune justi fication pour cette décision, autre que les docu ments authentiques suivants:
a) un exemplaire de la directive 35 du Cabi net en date du 18 décembre 1963; et
b) une lettre adressée le 9 janvier 1979 par le commissaire de la G.R.C. au commandant de la G.R.C. de Vancouver, dans laquelle il déclarait: [TRADUCTION] «Conformément à la procédure prévue à la directive 35 du Cabinet, j'ai conclu qu'il n'y a pas lieu d'accorder à Ronda Lynn Lee l'habilitation au secret».
Par décision en date du 29 janvier 1979, le Comité d'appel a accueilli l'appel formé par Ronda Lee au sujet des nominations faites à la suite de ces deux concours.
C'est cette décision du Comité d'appel que vise la requête du requérant, fondée en l'espèce sur l'article 28.
La Cour de céans a jugé que le pouvoir de commandement d'un ministre embrassait le droit de stipuler les qualités requises d'une personne nommée à un poste de son ministère 2 . En règle générale cependant, les ministres ont été depuis longtemps privés du pouvoir de nomination, qui est maintenant confié à la Commission de la Fonction publique par l'article 8 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique. Par ailleurs, l'article 6 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique habi- lite la Commission à déléguer ce pouvoir au sous- chef d'un ministère ou organisme. Il est constant en l'espèce que le sous-chef (c.-à-d. le commissaire de la G.R.C.) a procédé aux nominations en cause en vertu du pouvoir délégué que prévoit l'article 6.
Je conviens avec le Comité d'appel qu'en l'es- pèce, le service employeur (c.-à-d. la G.R.C.) a établi que les fonctions des postes à pourvoir ne pouvaient pas être proprement exercées par des gens qui n'avaient pas l'«habilitation aux informa- tions classifiées Très secret», et qu'en conséquence,
2 Voir: Brown c. La Direction des appels de la Commission de la Fonction publique [1975] C.F. 345, aux pp. 350 et 357.
l'habilitation au secret était l'une des conditions requises pour les postes en question.
Par conséquent, en l'absence de toute disposition contraire de la loi ou de la jurisprudence, j'estime que le Comité d'appel pourrait bien, dans une enquête tenue conformément à l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, pré- cité, avoir compétence pour prendre en considéra- tion le critère de l'habilitation au secret, au même titre que les autres qualités requises afin de s'assu- rer de l'observation de l'impératif de la sélection au mérite, tel qu'il est établi par l'article 10 de cette Loi. Vu cependant la conclusion à laquelle je suis arrivé, il n'échet pas de trancher cette question.
Pour soutenir que la décision du Commissaire en matière d'habilitation au secret n'est pas suscep tible d'appel sous le régime de l'article 21, l'avocat du requérant fait valoir ce qui suit:
[TRADUCTION] 15. La directive 35 du Cabinet et la déclara- tion en date du 9 janvier 1979 du commissaire de la Gendar- merie royale du Canada tirent leur force de l'article 112 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, selon lequel rien dans cette Loi ou toute autre loi, notamment la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, ne doit s'interpréter comme enjoignant à Sa Majesté la Reine représentée par le Conseil du Trésor de faire ou de s'abstenir de faire quoi que ce soit à l'encontre de cette directive ou de cette déclaration. Si Sa Majesté la Reine représentée par le Conseil du Trésor ne peut retenir les services d'une personne contrairement à la directive ou à la déclaration, il s'ensuit nécessairement que l'intimée n'est pas fondée à contester son élimination des concours au motif qu'on ne lui a pas accordé l'habilitation au secret requise.
L'article 112 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-35, porte:
112. (I) Rien dans la présente loi ou toute autre loi ne doit s'interpréter comme enjoignant à l'employeur de faire ou de s'abstenir de faire quoi que ce soit de contraire à quelque directive ou instruction donnée ou règlement établi par le gouvernement du Canada ou pour son compte dans l'intérêt de la sûreté ou de la sécurité du Canada ou de tout État allié ou associé du Canada.
(2) Aux fins du paragraphe (1), tout décret du gouverneur en conseil constitue une preuve péremptoire de ce qui y est énoncé au sujet de l'établissement des directives, instructions ou règle- ments pour le compte du gouvernement du Canada dans l'inté- rêt de la sûreté ou de la sécurité du Canada ou de tout État allié ou associé du Canada.
Pour bien saisir la situation, il me paraît néces- saire de prendre en considération le contenu de la directive 35 du Cabinet qui est reproduite à
l'annexe «A». Il ressort d'une lecture attentive de cette directive 35 qu'il s'agit là, à mon avis, d'une «directive» ou «instruction» donnée pour le compte du gouvernement du Canada dans l'intérêt de la sûreté ou de la sécurité du Canada, au sens de l'article 112(1) susmentionné et qu'à ce titre, elle s'applique aux dispositions de la Loi sur l'em- ploi dans la Fonction publique.
Le paragraphe 1 de la directive porte:
POSITION DE PRINCIPE
1. La sécurité dans la Fonction publique du Canada constitue un élément essentiel de la saine administration du personnel, et relève par conséquent de la responsabilité de chaque ministère et organisme. La sécurité des informations classifiées conser vées par un ministère ou un organisme peut être compromise par des personnes qui peuvent être déloyales envers le Canada et son régime de gouvernement, ou par des personnes auxquel- les on ne peut se fier en raison de certains défauts de leur caractère.
Le paragraphe 9 porte:
FAÇON DE PROCÉDER
9. Les méthodes suivantes, au moyen desquelles la présente politique doit être mise en œuvre, visent à assurer le filtrage le plus minutieux possible, surtout en ce qui concerne les person- nes appelées à avoir accès à des informations classifiées à un niveau élevé. Il continue d'incomber à chaque ministère et organisme du gouvernement de faire en sorte que sa sécurité demeure intacte.
Le paragraphe 13 porte:
13. Si un jugement favorable est porté, le ministère ou l'orga- nisme peut accorder l'habilitation au secret au niveau requis pour l'exécution efficace des fonctions du poste en cause. Si, au contraire, il existe, de l'avis du sous-ministre du ministère ou du directeur de l'organisme intéressé, un doute raisonnable quant à l'ampleur de la confiance pouvant être accordée au candidat, l'octroi de l'habilitation sera différé jusqu'à ce que le doute soit dissipé à la satisfaction du sous-ministre ou du directeur de l'organisme.
Le paragraphe 25(iv) porte:
25....
(iv) De qui relève l'octroi des diverses habilitations au secret Il incombera au sous-chef de tout ministère ou organisme d'accorder ou de refuser une habilitation au secret, et c'est de lui que relèvera en tout temps la responsabilité inhérente à l'accès qu'une personne pourra avoir à des informations classifiées Très secret, Secret et Confidentiel.
Il ressort de ces extraits de la directive 35 qu'il incombe à chaque ministère et organisme de veiller de façon constante à la sécurité et au sous- chef d'accorder ou de refuser l'habilitation au secret. Les modalités de l'octroi ou du refus de
l'habilitation au secret sont exposées en détail aux paragraphes 9 à 20 inclusivement.
En l'espèce, l'intimée Lee n'a pas obtenu l'habi- litation au secret requis. Il n'appartenait pas au Comité d'appel d'examiner si le commissaire de la G.R.C. a suivi la procédure appropriée lorsqu'il refusait à l'intimée Lee l'habilitation au secret. Il me semble que le Comité d'appel avait pour seul mandat de déterminer si la nomination des person- nes occupant les deuxième et troisième places sur chaque liste a été faite selon le principe du mérite tel qu'il est prévu par l'article 10 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique et modifié par l'article 112(1) de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, précité. J'es- time par conséquent que, vu l'application de l'arti- cle 112(1), le Comité d'appel n'avait pas le droit de s'enquérir des raisons pour lesquelles le Com- missaire a refusé d'accorder l'habilitation au secret. La question de l'observation par le Com- missaire des modalités prévues à la directive 35 pourrait faire l'objet d'un recours devant une autre juridiction, pour une autre cause d'action, mais elle ne saurait être abordée par le Comité d'appel en l'espèce. La compétence que le Comité d'appel tient de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique pour déterminer si le principe du mérite a été observé en matière de nominations se limite en l'espèce, à mon avis, à l'examen de toutes les qualités requises pour le concours, sauf l'admissibi- lité à l'habilitation au secret. Par conséquent, lors- que le Comité se disait en droit de s'enquérir des raisons pour lesquelles l'intimée s'est vu refuser l'habilitation au secret, il n'a pas, à mon avis, correctement appliqué aux faits de la cause les dispositions de l'article 112(1) de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique, précité.
A mon avis, l'article 112(1) met l'employeur à l'abri de l'obligation de faire quoi que ce soit à l'encontre des dispositions de la directive 35. Il ressort des passages précités de la directive 35 que le sous-chef a pour responsabilité permanente d'accorder ou de refuser l'habilitation au secret et, lorsqu'il existe, à son avis, un doute raisonnable, l'octroi de l'habilitation sera différé jusqu'à ce que le doute soit dissipé à la satisfaction du sous-chef. Il ressort de sa lettre en date du 9 janvier 1979 qu'en l'espèce, ce doute n'a pas été dissipé à la
satisfaction du sous-chef. Par conséquent, em ployer l'intimée dans ces circonstances irait à l'en- contre des dispositions de la directive 35, ce qui contreviendrait à celles de l'article 112(1).
Par ces motifs, je conclus que la décision du Comité d'appel intimé doit être infirmée.
Toutefois, certains faits de la cause se révèlent troublants. Rien dans le dossier n'indique que l'in- timée Ronda Lee constitue un danger au point de vue de la sécurité. Par lettre en date du 8 décem- bre 1978, le surintendant Maidens, chef de l'Ad- ministration et du Personnel de la G.R.C. de Van- couver, l'a informée qu'elle n'allait pas recevoir l'habilitation au secret requise, ce qu'a confirmé la lettre susmentionnée en date du 9 janvier 1979 du Commissaire. Dans son intimation d'appel en date du 14 décembre 1978, l'intimée déclare qu'elle voulait connaître la raison du refus mais qu'on lui [TRADUCTION] «... a refusé tout renseignement.» Le paragraphe 15 de la directive 35 prévoit la procédure à suivre lorsque la personne demandant l'habilitation au secret est déjà employée dans la Fonction publique. Ce paragraphe porte: «... on tentera de dissiper le doute avec l'aide de l'em- ployé en cause . ..». Ce paragraphe précise en outre que: «. .. un fonctionnaire supérieur . .. con- voquera l'employé à une entrevue et l'informera des motifs du doute et ce, dans toute la mesure du possible sans compromettre les sources importan- tes et confidentielles de renseignements afférents à la sécurité, et fournira à l'employé la possibilité de le dissiper à la satisfaction des autorités du minis- tère ou organisme responsable.» Or, il ressort du dossier que l'intimée Ronda Lee n'a pas été convo- quée à une entrevue ni ne s'est vu donner la possibilité de résoudre le problème. Il ressort de la directive 35 et du «Mémoire aux sous-ministres et chefs d'organismes» en date du 27 décembre 1973 de R. G. Robertson, secrétaire du Cabinet (Dossier, pages 46 et 47), que la directive 35 a pour objet de faire en sorte que l'employé soit informé, autant que faire se peut, des motifs du doute qui plane sur son compte en matière de sécurité et ce, sans que soient compromises les sources importantes de renseignements afférents à la sécurité, et qu'il lui soit donné l'occasion de dissiper ce doute avant que l'habilitation ne soit
refusée. Dans le cas de l'intimée Ronda Lee, il ne semble pas que ces formalités aient été suivies. Toutefois, comme je l'ai indiqué plus haut, si la question de l'observation ou de l'inobservation par le Commissaire des modalités prévues par la direc tive 35 pouvait donner lieu à un recours devant une autre juridiction, elle ne relevait pas du Comité saisi d'un appel prévu à l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique.
Par ces motifs, je suis d'avis d'accueillir la requête fondée sur l'article 28 et d'annuler la décision et l'ordonnance en date du 29 janvier 1979 du Comité d'appel.
ANNEXE oA»
CE DOCUMENT EST LA PROPRIÉTÉ DU GOUVERNEMENT DU
CANADA
Le 18 décembre 1963
DIRECTIVE DU CABINET (N o 35)
La sécurité dans la Fonction publique du Canada
POSITION DE PRINCIPE
1. La sécurité dans la Fonction publique du Canada constitue un élément essentiel de la saine administration du personnel, et relève par conséquent de la responsabilité de chaque ministère et organisme. La sécurité des informations classifiées conser vées par un ministère ou un organisme peut être compromise par des personnes qui peuvent être déloyales envers le Canada et son régime de gouvernement, ou par des personnes auxquel- les on ne peut se fier en raison de certains défauts de leur caractère.
2. Les employés de la Fonction publique du Canada, y compris les membres des Forces armées et de la Gendarmerie royale du Canada, qui, dans l'exercice de leurs fonctions, sont appelés à avoir accès à des informations classifiées, doivent être des personnes loyales envers le Canada et à qui le gouvernement peut accorder son entière confiance. Il a été amplement prouvé qu'on ne peut accorder cette confiance à des personnes dont la loyauté envers le Canada et son régime de gouvernement est affaiblie par leur loyauté envers une organisation communiste, fasciste ou toute autre organisation politique légale ou illégale dont les buts sont inconciliables avec les opérations d'une démocratie parlementaire. L'un des facteurs essentiels de la politique de sécurité du Canada doit donc être que les person- nes décrites au paragraphe 3 ci-après ne soient pas, lorsqu'elles sont connues, admises au sein de la Fonction publique, et que, si elles y sont déjà employées, on ne leur permette pas d'avoir accès à des informations classifiées. Si une telle personne occupe un poste qui lui donne accès à des informations classi fiées, on doit au moins la muter à un poste elle sera moins tenue au secret. Il peut aussi s'avérer nécessaire, si le ministre intéressé juge qu'il y va de l'intérêt public, de renvoyer cette personne, sous réserve des conditions énumérées au paragraphe 17 ci-dessous.
3. Les personnes dont il est question au paragraphe 2 ci-dessus sont les suivantes:
a) toute personne membre d'un parti communiste ou fasciste ou d'un groupement affilié à un parti communiste ou fasciste et dont la nature et les objectifs sont semblables;
b) toute personne qui, par ses paroles ou ses actes, fait preuve de sympathie à l'endroit d'un parti communiste ou fasciste ou d'un groupement affilié à un parti communiste ou fasciste et dont la nature et les objectifs sont semblables;
c) toute personne qui, ayant une compréhension suffisante de sa nature et de ses objectifs véritables, est membre ou fait preuve par ses paroles ou ses actes, de sympathie à l'égard d'une organisation dont l'objectif véritable est l'avancement et la propagation de la politique et des objectifs communistes ou fascistes (groupements communément appelés ((organisa- tions-couvertures»);
d) toute personne qui agit en tant qu'agent secret ou en tant qu'informateur d'une puissance étrangère, ou qui, délibéré- ment, prête son concours à un tel agent ou informateur;
e) toute personne qui, par ses paroles ou ses actes, fait preuve de sympathie à l'égard d'une organisation qui, ouvertement ou clandestinement, préconise ou emploie la force pour modi fier la forme de gouvernement.
4. Il est important de se rappeler qu'il peut exister des motifs de douter de la loyauté d'une personne qui, par le passé, a appar- tenu à l'une des catégories décrites au paragraphe 3 ci-dessus, même si des renseignements récents obtenus à propos de cette personne ne viennent pas confirmer ces doutes.
5. Si la loyauté est importante, il est également essentiel que l'on puisse avoir confiance en toute personne qui doit avoir accès à des informations classifiées. On peut ne pas avoir confiance en une personne pour un certain nombre d'autres raisons qui n'ont rien à voir avec la loyauté. Pour protéger dans toute la mesure du possible la sécurité de l'État, on ne devrait pas permettre aux personnes décrites au paragraphe 6 ci-après d'avoir accès à des informations classifiées, à moins que, après un examen approfondi des circonstances, y compris la valeur de leurs services, on juge que le risque de les employer serait justifié.
6. Les personnes dont il est question au paragraphe 5 ci-dessus sont les suivantes:
a) toute personne en qui on ne peut avoir confiance, non par suite de sa déloyauté, mais par suite de certaines caractéristi- ques de sa personnalité qui pourraient l'amener à être indis- crète ou malhonnête, ou la rendre vulnérable au chantage ou à la contrainte. Ces caractéristiques comprennent la cupidité, l'endettement, les aberrations sexuelles, l'alcoolisme, la toxi- comanie, le déséquilibre mental ou tout autre trait de carac- tère qui risque d'ébranler son honnêteté;
b) toute personne qui, par suite de sa famille ou de relations fréquentes avec des personnes tombant dans les catégories décrites aux paragraphes 3a) à e) ci-dessus, serait disposée, sciemment ou inconsciemment, à agir de façon préjudiciable aux intérêts et à la sécurité du Canada. Ce n'est pas à la nature de la relation (familiale, matrimoniale ou amicale) qu'il faut attacher le plus d'importance, mais à son intensité et aux circonstances qui l'entourent; en particulier, il faut porter un jugement sur la confiance qu'on peut lui accorder en fonction du degré de l'influence qu'on pourrait exercer sur une telle personne, mais ce jugement doit être porté avec le plus grand soin; et
c) toute personne qui, tout en étant loyale et digne de confiance, est étroitement attachée par des liens familiaux ou des sentiments d'affection à des personnes vivant à l'intérieur des frontières de certains pays étrangers qui pourraient exer- cer sur elle des pressions intolérables.
7. En outre, il faut reconnaître la sérieuse menace à la sécurité que comporte le fait d'employer ou de permettre que soient employées des personnes tombant dans les catégories décrites aux paragraphes 3 ou 6 ci-dessus:
a) à certains postes, dans des sociétés industrielles et entre- prises associées, qui prennent part à la production ou à l'étude d'un matériel de défense classifié qui doit être protégé pour des raisons de sécurité; ou
b) à des postes, au sein d'organismes gouvernementaux exé- cutant des travaux dont la nature est essentielle à la sécurité nationale, postes qui, bien qu'ils ne comportent pas normale- ment l'accès à des informations classifiées, peuvent fournir à leurs titulaires des occasions d'accéder sans autorisation à de telles informations.
8. Pour s'acquitter de leurs responsabilités concernant la pro tection des secrets du gouvernement du Canada et de ses alliés, les ministères et organismes doivent, en tout premier lieu, obtenir des renseignements suffisants à propos de toute per- sonne qui doit avoir accès à ces secrets, afin de porter un jugement raisonnable sur la question de savoir si cette personne est loyale et digne de confiance. En portant ce jugement d'ordre administratif, il faut toujours se rappeler que, si les intérêts afférents à la sécurité nationale doivent prévaloir lorsqu'il existe un doute raisonnable, la sauvegarde des intérêts de l'individu est aussi essentielle à la préservation de la société que nous visons à protéger. Les renseignements concernant le statut sécuritaire d'un employé seront traités de façon confidentielle.
FAÇON DE PROCÉDER
9. Les méthodes suivantes, au moyen desquelles la présente politique doit être mise en oeuvre, visent à assurer le filtrage le plus minutieux possible, surtout en ce qui concerne les person- nes appelées à avoir accès à des informations classifiées à un niveau élevé. Il continue d'incomber à chaque ministère et organisme du gouvernement de faire en sorte que sa sécurité demeure intacte.
10. Les renseignements concernant les personnes susceptibles d'avoir accès à des informations classifiées doivent, à tout le moins, être obtenus de ces personnes elles-mêmes, des person- nes dont celles-ci se sont recommandées, ainsi qu'au moyen d'enquêtes menées par des organismes d'enquête autorisés. Les ministères et organismes informeront les personnes susceptibles d'avoir accès à des informations classifiées des motifs justifiant l'enquête relative à leurs antécédents, et leur expliqueront les dangers qu'elles encourraient elles-mêmes tout en exposant la sécurité de l'État si elles tentaient de dissimuler tout renseigne- ment de nature à influer sur l'ampleur de la confiance pouvant leur être accordée.
11. Les fonctions d'un organisme d'enquête consistent à mener de façon prompte et efficace les enquêtes réclamées par les ministères ou organismes afin de les aider à déterminer si la personne qui fait l'objet de l'enquête est loyale et digne de confiance; et à informer les ministères et organismes des résul- tats de leurs enquêtes au moyen de rapports concrets compor- tant une appréciation minutieuse quant à la sûreté des sources auprès desquelles ils ont obtenu des renseignements.
12. En se fondant sur ces rapports et sur tout autre renseigne- ment pertinent obtenu de la personne intéressée, des personnes dont elle s'est recommandée et de toute autre source de rensei- gnement qui pourra avoir été utilisée, le ministère ou organisme employeur portera un jugement éclairé sur la question de savoir si la personne en cause est loyale et digne de confiance, ainsi que sur l'ampleur de la confiance pouvant lui être accordée en vue de l'exécution sûre et efficace des fonctions à remplir.
13. Si un jugement favorable est porté, le ministère ou l'orga- nisme peut accorder l'habilitation au secret au niveau requis pour l'exécution efficace des fonctions du poste en cause. Si, au contraire, il existe, de l'avis du sous-ministre du ministère ou du directeur de l'organisme intéressé, un doute raisonnable quant à l'ampleur de la confiance pouvant être accordée au candidat, l'octroi de l'habilitation sera différé jusqu'à ce que le doute soit dissipé à la satisfaction du sous-ministre ou du directeur de l'organisme.
14. Lorsqu'un candidat à un emploi dans la Fonction publique, et non une personne qui est déjà employée, est susceptible d'être nommé à un poste l'obligeant à avoir accès à des informations classifiées, et qu'un doute a surgi quant à l'habilité de cette personne au secret, les mesures suivantes peuvent être prises dans le but de dissiper ce doute:
a) on peut demander à un organisme d'enquête autorisé d'effectuer une nouvelle enquête précise; ou
b) le ministère ou l'organisme peut, en tout temps, demander l'avis du Conseil de sécurité interministériel.
15. Lorsqu'une personne est déjà employée dans la Fonction publique et qu'un doute surgit quant à son habilité à avoir accès à des informations classifiées, l'agent de sécurité du ministère ou de l'organisme intéressé doit prendre les dispositions qui s'imposent pour protéger la sécurité, et peut avoir recours aux mesures mentionnées au paragraphe 14 dans le but de dissiper ce doute. Si ces mesures ne permettent pas de dissiper le doute ou si, de l'avis des autorités du ministère ou organisme, elles semblent peu appropriées à la situation, on tentera de dissiper le doute avec l'aide de l'employé en cause. Après s'être mis en rapport avec l'organisme d'enquête ou toute autre personne ayant fourni le renseignement qui est à l'origine du doute, un fonctionnaire supérieur nommé par le sous-ministre ou le direc- teur de l'organisme convoquera l'employé à une entrevue et l'informera des motifs du doute et ce, dans toute la mesure du possible sans compromettre les sources importantes et confiden- tielles de renseignements afférents à la sécurité, et fournira à l'employé la possibilité de le dissiper à la satisfaction des autorités du ministère ou organisme responsable.
16. Pour le cas aucune des mesures exposées au paragraphe 15 ci-dessus ne permettrait de dissiper de façon satisfaisante un doute concernant un employé de l'État, le ministère ou orga- nisme responsable refusera d'accorder l'habilitation au secret, prendra les mesures qui s'imposent afin de protéger la sécurité, et consultera le secrétariat du Comité de sécurité dans le but d'obtenir l'aide de ce dernier pour tenter de déterminer:
a) si la personne peut, en toute sécurité et de façon utile, être nommée à un poste elle sera moins tenue au secret au sein du ministère ou organisme en cause ou ailleurs dans la Fonction publique, tout en étant informée et consentante dans toute la mesure du possible compte tenu des circonstances;
b) à supposer qu'il ne soit pas possible de la nommer ailleurs, s'il y aurait lieu de lui demander de résigner ses fonctions au sein du ministère ou organisme; ou
c) à supposer qu'elle refuse de résigner ses fonctions, s'il y aurait lieu de recommander au Ministre responsable que cette personne soit renvoyée.
17. Pour le cas les autorités du ministère décideraient de recommander le renvoi, cette recommandation ne sera suivie d'aucune mesure avant:
a) que le sous-ministre ou le directeur de l'organisme n'ait lui-même passé entièrement le cas en revue et interrogé personnellement l'employé en question, dans une tentative ultime de dissiper tout doute raisonnable quant à la confiance pouvant lui être accordée;
b) que l'employé n'ait été informé, dans toute la mesure du possible sans pour autant compromettre les sources impor- tantes et confidentielles de renseignements afférents à la sécurité, des motifs pour lesquels on continue de douter qu'il soit loyal ou digne de confiance, et qu'on ne lui ait donné de nouveau la possibilité de fournir tous les renseignements ou faits dont, selon lui, il doit être tenu compte en son nom par le sous-ministre ou le directeur de l'organisme; et que, à défaut d'une solution satisfaisante,
c) en se fondant sur tous les renseignements disponibles, l'on ait obtenu l'opinion d'un comité de révision composé de membres du Conseil de sécurité. (Le comité de révision se composera du président et de deux membres, au moins, du Conseil de sécurité, sous réserve qu'aucun membre directe- ment intéressé au cas ne sera appelé à faire partie du comité de révision).
18. Au moment de déterminer de façon définitive s'il recom- mandera ou non au gouverneur en conseil qu'un employé soit renvoyé pour des motifs de sécurité, le ministre responsable tiendra compte de tous les renseignements et avis pertinents qu'il aura reçus, mais il n'est pas tenu d'agir en fonction de ces avis.
19. Les chiffres relatifs à toutes les personnes qui, pour des motifs de sécurité, sont rayées des listes d'admissibilité de la Commission du service civil, ou à qui les ministères ou organis- mes refusent, d'une manière ou d'une autre, l'accès à des informations classifiées, seront communiqués trimestriellement au secrétaire du Conseil de sécurité afin que ledit Conseil puisse, périodiquement, prendre connaissance de ce nombre ou des types de cas, et évaluer l'ampleur du problème de sécurité qui se pose dans la Fonction publique. Les chiffres transmis devront être classés sous les rubriques générales qui suivent: personnes renvoyées, personnes à qui on a permis de démission- ner, personnes mutées à des postes elles ne sont pas tenues au secret, personnes à qui on a refusé l'accès à des informations classifiées, personnes qu'on a refusé d'employer. De plus, le compte rendu en question devra indiquer si les mesures en cause ont été prises parce que les personnes étaient déloyales ou parce qu'il n'était pas possible de leur faire confiance. Par contre, ces chiffres ne devront pas comprendre le nombre des personnes à qui on a cessé d'accorder l'accès à des informations classifiées parce que leurs fonctions ont changé, ou pour toute autre raison administrative similaire.
20. Il incombe à chaque sous-chef ou directeur d'organisme de nommer un fonctionnaire supérieur compétent, de préférence le premier agent du personnel, pour agir à titre d'agent de sécu-
rité, et d'informer le secrétaire du Conseil de sécurité de cette nomination et de tout changement ultérieur. Le haut fonction- naire ainsi nommé recevra l'habilitation au secret conformé- ment aux formalités exposées au paragraphe 25(i), ci-après. La personne ainsi nommée sera comptable envers le sous-chef ou le directeur d'un organisme, en ce qui concerne la mise en appli cation, au sein du ministère ou de l'organisme, de tous les règlements afférents à la sécurité. Il incombera également à l'agent de sécurité du ministère de demeurer en rapport étroit avec les organismes gouvernementaux responsables de la politi- que et des pratiques de sécurité. Il importe que, dans la mesure du possible, les agents de sécurité soient des personnes dont on peut s'attendre qu'elles occuperont leur poste pendant long- temps, vu qu'il est difficile d'assurer la sécurité de façon efficace sans une expérience notable dans un domaine spécialisé.
MÉTHODES
21. Le filtrage de sécurité des candidats à des postes au sein de la Fonction publique sera effectué par la Commission du service civil, ou par les ministères et organismes dans le cas des personnes non employées en vertu de la Loi sur le service civil. Lorsque des personnes déjà employées dans un ministère ou organisme devront se voir confier l'accès à des informations classifiées, le filtrage de sécurité sera effectué par le ministère ou organisme en cause.
22. Lorsque, pour des raisons de sécurité, la Commission du service civil juge nécessaire d'écarter un postulant ou un candi- dat à un poste comportant l'accès à des informations classifiées, ledit postulant ou candidat faisant déjà partie de la Fonction publique, la Commission consultera, au besoin, le ministère intéressé, afin d'arriver à une entente réciproque quant aux mesures qui pourront finalement être prises, compte tenu du fait que la responsabilité ultime en matière de sécurité incombe au ministère.
23. Au moment de nommer à un ministère un nouvel employé qui a fait l'objet d'un filtrage de sécurité, la Commission du service civil adressera au ministère toute la documentation et les renseignements pertinents relatifs au filtrage de sécurité.
24. Une personne qui doit être nommée à un poste permanent au sein de la Fonction publique ne sera pas normalement soumise à un filtrage de sécurité pour ce motif uniquement. Toutefois, lorsqu'une personne devant être nommée à un tel poste est, de l'avis du sous-ministre ou du directeur de l'orga- nisme intéressé, susceptible d'être appelée à avoir accès à des informations classifiées, avant de nommer cette personne en permanence, il faudra vérifier ses empreintes digitales et son dossier si cela n'a pas déjà été fait.
25. Dans le cadre des politiques et pratiques exposées ci-dessus, l'évaluation et l'habilitation sécuritaires seront établies au moyen des procédés exposés ci-après. Ceux-ci constituent des critères et méthodes de sécurité compatibles avec les services d'enquête actuellement disponibles entre les ministères; ce sont des normes minimales qui ne restreignent aucunement le droit des Forces armées d'effectuer des enquêtes sur les lieux en utilisant leurs propres moyens, concernant des personnes employées au ministère de la Défense nationale ou pour le compte de ce dernier.
(i) Personnes devant avoir accès à des informations classi fiées Très secret
Avant qu'une personne ne soit employée à un poste l'obli- geant à avoir accès à des informations classifiées Très secret, elle doit faire l'objet d'une enquête sur les lieux menée par un organisme d'enquête approprié, il faut vérifier si son nom ne figure pas dans les dossiers de la G.R.C. relatifs à la subver sion, et ses empreintes digitales doivent également être véri- fiées par la G.R.C. Ces formalités sont obligatoires.
(ii) Personnes devant avoir accès à des informations classi fiées Secret
a) Avant qu'une personne ne soit employée à un poste l'obligeant à avoir accès à des informations classifiées Secret, il faut vérifier si son nom ne figure pas dans les dossiers de la G.R.C. relatifs à la subversion et ses empreintes digitales doivent également être vérifiées par la G.R.C. Ces deux formalités sont obligatoires.
b) Si le président de la Commission du service civil ou le sous-chef d'un ministère ou organisme ou un agent de sécu- rité nommé par eux juge qu'une enquête sur les lieux peut permettre de clarifier les renseignements obtenus par les moyens exposés au paragraphe 25(ii)a), ou qu'une telle enquête est nécessaire pour le convaincre qu'un candidat ou un employé est loyal et digne de confiance, il peut exiger que les antécédents d'une personne fassent l'objet d'une enquête sur les lieux, laquelle doit être effectuée par un organisme d'enquête approprié. S'il appert que les demandes d'un minis- tère ou organisme utilisant les services de la G.R.C. à titre d'organisme d'enquête vont au-delà de ce qu'elle considère comme des exigences normales, la G.R.C. peut demander au Comité de sécurité de répartir les priorités.
(iii) Personnes devant avoir accès à des informations classi fiées Confidentiel
Avant qu'une personne ne soit employée à un poste l'obli- geant à avoir accès à des informations classifiées Confiden- tiel, il faut vérifier si son nom ne figure pas dans les dossiers de la G.R.C. relatifs à la subversion, et ses empreintes digitales doivent également être vérifiées par la G.R.C. Ces deux formalités sont obligatoires.
(iv) De qui relève l'octroi des diverses habilitations au secret Il incombera au sous-chef de tout ministère ou organisme d'accorder ou de refuser une habilitation au secret, et c'est de lui que relèvera en tout temps la responsabilité inhérente à l'accès qu'une personne pourra avoir à des informations classifiées Très secret, Secret et Confidentiel.
26. En outre, on rappelle aux autorités des ministères et organismes que la consultation des personnes de qui un employé s'est recommandé en remplissant sa Formule de renseignements personnels peut fournir des données supplémentaires utiles en ce qui concerne son caractère. Il y a donc lieu de s'adresser directement à ces personnes lorsqu'il appert qu'une telle démar- che produirait des résultats utiles.
27. Des formalités assimilables à celles qui sont exposées au paragraphe 25, à l'exception de celles qui ont trait aux empreintes digitales, s'appliquent également aux personnes employées dans l'industrie de la défense (et certains services associés à la défense), lesquelles peuvent être appelées à avoir accès à des informations classifiées qui sont la propriété du gouvernement du Cariada, ou dont la sécurité incombe au gouvernement. Dans l'industrie de la défense (et certains servi ces associés à la défense), les formalités seront appliquées par le
ministère de la Production de défense, conformément à une directive distincte qui porte sur la sécurité dans l'industrie de la
défense.
* * *
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE LE DAIN: Je suis d'avis que la décision du Comité d'appel doit être annulée. Le Comité s'est arrogé le pouvoir de vérifier le «caractère raisonnable» du refus par le sous-chef d'accorder l'habilitation au secret, d'exiger que ce dernier vienne justifier son refus et, à défaut de justifica tion, de conclure que ce refus n'était pas raisonna- ble et que, pour cette raison, le principe du mérite n'a pas été observé dans le processus de sélection. A mon avis, un Comité d'appel saisi par applica tion de l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique n'est pas investi de ce pouvoir et, par conséquent, le Comité d'appel a outrepassé sa compétence en l'espèce.
Sauf le respect que je dois aux tenants de la thèse opposée, je ne suis pas certain que l'action envisagée par le Comité d'appel soit expressément interdite par l'article 112 de la Loi sur les rela tions de travail dans la Fonction publique qui, malgré la mention de toute «autre loi» qui y est faite, vise surtout à expliciter l'interprétation de lois qui auraient pour effet d'obliger l'employeur à faire ou à s'abstenir de faire quelque chose à l'encontre d'une directive en matière de sécurité. La référence à l'article 112 dans le paragraphe 90(2) de la même Loi, qui dispose qu'un employé n'est pas en droit de présenter un grief «relatif à quelque mesure prise en vertu d'une instruction, directive ou règlement édicté selon l'article 112», donne une idée de l'objet de cet article 112. L'arti- cle 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique porte sur ce que peut ou ne peut pas faire la Commission, qui est investie du pouvoir de nomination. Je doute qu'on puisse se fonder sur l'article 112 de la Loi sur les relations de travail dans la Fonction publique pour interpréter la com- pétence du Comité d'appel comme embrassant le pouvoir de contrôler une décision refusant l'habili- tation au secret. Un tel contrôle pourrait avoir pour effet de faire obstacle à une nomination faite par la Commission mais ne pourrait contraindre un sous-chef à accorder l'habilitation au secret dans un cas particulier. Sans cette habilitation au secret, le candidat ne peut être nommé au poste en cause.
Voilà qui nous mène au coeur du problème. Quoique, en l'espèce, l'habilitation au secret ait figuré au nombre des «qualités» requises pour les postes en cause, il ne s'agissait pas, à mon avis, d'un titre de compétence que la Commission devait déterminer selon le principe du mérite, conformé- ment aux articles 10 et 12 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique. Le pouvoir d'assujettir la nomination à l'habilitation au secret et le pou- voir de déterminer s'il y a lieu d'accorder cette habilitation relèvent du pouvoir de commandement que la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique n'a ni supprimé ni confié à la Commission. La directive du Cabinet est une directive du gouverne- ment sur l'exercice de ce pouvoir. Il incombe au sous-chef de prendre l'initiative de la décision rela tive à l'habilitation au secret dans un cas donné. Cette décision a ceci de particulier que, si après l'enquête nécessaire, il subsiste un doute quant à la question de savoir si l'intéressé doit avoir ou non accès aux informations réservées, ce doute va à l'encontre de l'intéressé et l'habilitation au secret doit être refusée. Une décision de ce genre n'a rien à voir avec le principe du mérite visé aux articles 10 et 12 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique et au paragaphe 7(4) du Règlement sur l'emploi dans la Fonction publique, DORS/67- 129 modifié par DORS/69-592, qui disposent que la Commission (ou le sous-chef exerçant, indépen- damment de son pouvoir de commandement, le pouvoir délégué de la Commission sous le régime de l'article 6 de la Loi) doit apprécier le mérite relatif des candidats conformément à la méthode et aux normes de sélection qu'elle aura établies. La décision d'un sous-chef en matière d'habilitation au secret n'a rien à voir avec l'appréciation du mérite relatif d'un candidat. Il n'y a pas de degrés de mérite lorsqu'il s'agit d'habilitation au secret. Il suffit qu'il subsiste un doute à l'égard d'un candi- dat pour que l'habilitation au secret soit refusée.
Les cours de justice ont eu à intervenir pour déterminer le domaine de l'appel prévu à l'article 21 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publi- que, à la lumière des autres dispositions de cette Loi et, en particulier, de la disposition principale de l'article 10. La Cour de céans a jugé que le Comité d'appel visé à l'article 21 avait pour tâche
de déterminer si le processus de sélection s'est déroulé, dans son ensemble, conformément au principe du mérite, mais qu'il ne pouvait substituer son opinion à celle du comité de sélection sur le mérite d'un candidat donné. En l'espèce, le mode de sélection visé à l'article 10 a été suivi par les jurys de sélection qui ont soumis leurs comptes rendus et établi des listes d'admissibilité qui tra- duisaient leur appréciation du mérite relatif des candidats en lice. C'était ce mode de sélection qui était susceptible de contrôle par le Comité d'appel. Ces jurys de sélection ne pouvaient pas se pronon- cer sur la «qualité» additionnelle ou la condition de l'habilitation au secret, laquelle, pour les raisons que j'ai indiquées, ne pouvait entrer en ligne de compte dans le processus de sélection visé à l'arti- cle 10. Elle ne saurait donc faire l'objet d'un contrôle du Comité d'appel visé à l'article 21. Je conçois qu'un Comité d'appel puisse être fondé à conclure à l'invalidité ou à la nullité d'une appré- ciation du mérite relatif faite par un jury de sélection parce que l'exclusion d'un candidat a été déterminée d'avance par un abus de pouvoir mani- feste en matière d'habilitation au secret. Mais, de toute évidence, ce n'est pas le cas en l'espèce. Si, dans un cas donné, un Comité d'appel est en droit d'examiner le refus de l'habilitation au secret, il n'a certainement pas le droit de se prononcer sur le «caractère raisonnable» de la décision et d'exiger que le sous-chef vienne la justifier. Outre les prin- cipes généraux régissant le domaine d'un appel de ce genre, il est des considérations évidentes de sécurité qui rendraient ce pouvoir de contrôle tota- lement déplacé et inacceptable. Je ne me prononce pas sur la question de savoir s'il ressort du dossier que le sous-chef s'est conformé aux formalités prévues par la directive du Cabinet, ni sur la question de savoir quel autre recours la candidate intimée pourrait faire valoir en se fondant sur les faits qu'elle a allégués.
Par ces motifs, je suis d'avis d'accueillir la requête fondée sur l'article 28 et d'annuler la décision du Comité d'appel.
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Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE SUPPLÉANT KERR: Les faits de la cause et les points litigieux ayant été relatés par les juges Heald et Le Dain dans leurs motifs respec-
tifs, je ne juge pas utile de les rappeler, sauf lorsque la clarté du texte l'exige. Je conviens que cette requête fondée sur l'article 28 doit être accueillie et que la décision du Comité d'appel doit être annulée.
Les postes à pourvoir dans la section du Fichier judiciaire de la G.R.C. à Vancouver et auxquels l'intimée Ronda Lee a posé sa candidature requé- raient l'habilitation au secret, étant donné que les titulaires auraient accès aux dossiers de la G.R.C. relatifs à des activités criminelles connues ou sus- pectes. Parmi les qualités requises pour ces postes figurait l'«habilitation aux informations classifiées Très secret». Voici l'une des définitions du mot «qualité» (en anglais qualification) dans le The Shorter Oxford English Dictionary, 3e éd.:
[TRADUCTION] ... condition nécessaire, qui doit être remplie avant l'acquisition d'un droit, avant l'occupation d'une charge, etc.
Il me semble qu'en l'espèce, l'habilitation au secret était une condition préalable à la nomination de tout candidat qui a réussi à d'autres égards après appréciation du mérite par le jury de sélection (jury de notation). Cette condition ne constituait pas un élément d'appréciation, et aucun des candi- dats n'a fait l'objet d'une appréciation par les jurys de sélection du point de vue de la sécurité. A mon avis, les attributions d'un jury de sélection n'em- brassent pas les enquêtes qui s'imposent en vue d'une décision en matière de sécurité, comme c'est le cas en l'espèce.
A la suite de l'appréciation des candidats par les jurys de sélection et l'établissement des listes d'ad- missibilité, il incombait au commissaire de la G.R.C. de déterminer s'il y avait lieu d'accorder à Ronda Lee l'habilitation au secret et, dans une lettre en date du 9 janvier 1979, il a déclaré:
Conformément à la procédure prévue à la directive 35 du Cabinet, j'ai conclu qu'il n'y a pas lieu d'accorder à Ronda Lynn Lee l'habilitation au secret.
Dans sa lettre, le Commissaire a affirmé que la procédure prévue par la directive 35 du Cabinet avait été suivie. En tout cas, je présume qu'en sa qualité de Commissaire, il était tenu de faire preuve d'un jugement juste et impartial dans sa décision en matière de sécurité.
Nous ignorons, et le Comité d'appel ignorait également, quels renseignements le Commissaire avait en sa possession, mais, à mon avis, rien au
dossier n'indique qu'il ne se soit pas acquitté pro- prement de ses responsabilités ou qu'il lui incom- bait de prouver le caractère raisonnable de sa décision devant le Comité d'appel. A mon avis, le Comité d'appel n'étant nullement fondé à accueil- lir les appels de Ronda Lee, sa décision doit donc être annulée.
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