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T-5408-79
Forrest F. Walkem (Demandeur) c.
Reginald Draney, Jimmy Billy, Dempsey Albert et Sa Majesté la Reine et l'honorable procureur général du Canada (Défendeurs)
Division de première instance, le juge Gibson— Vancouver, 7 et 10 novembre 1980.
Indiens Élection Élection du chef d'une bande indienne par suite du vote prépondérant du président d'élection Le président d'élection inadmissible à voter selon l'art. 77 de la Loi sur les Indiens L'élection est-elle valide? Loi sur les Indiens, S.R.C. 1970, c. I-6, art. 76(1) et 77 Règlement sur les élections au sein des bandes d'Indiens, C.R.C. 1978, Vol. X, c. 952, art. 9 Règle 475 de la Cour fédérale.
Il s'agit d'un mémoire spécial en vue de faire statuer sur certains points pour remplacer une instruction conformément à la Règle 475. Il y avait trois questions à trancher: A) l'élection du chef d'une bande indienne à la suite du vote prépondérant du président d'élection, qui n'a pas, selon l'article 77 de la Loi sur les Indiens, qualité pour voter, est-elle valide? B) si elle ne l'est pas, qui peut exercer les pouvoirs du conseil? C) la Cour est-elle alors autorisée à exiger une nouvelle élection ou à donner des directives relatives à une nouvelle élection?
Arrêt: la question A doit recevoir une réponse affirmative. Il n'y a rien dans le Règlement sur les élections au sein des bandes d'Indiens, adopté par le gouverneur en conseil en appli cation de l'article 76 de la Loi sur les Indiens, ni dans la Loi sur les Indiens elle-même, qui exige que le président d'élection (que nomme la bande avec l'agrément du Ministre) soit un électeur qualifié conformément à l'article 77 de cette Loi. Parmi les raisons pour qu'il en soit ainsi, il y a que le président d'élection, en sa capacité officielle, doit, selon le Règlement, agir en toute indépendance et impartialité. Une de ces fonc- tions, qu'il a exercée, est celle de voter pour rompre un vote égal. L'article 9 du Règlement lui donnait ce pouvoir. Il n'y a rien d'ultra vires dans les dispositions réglementaires et légales pertinentes en cause ni aucun conflit entre les articles 76(1)b) et 77 de la Loi sur les Indiens.
MÉMOIRE SPÉCIAL en remplacement de l'ins- truction.
AVOCATS:
W. J. Worrall pour le demandeur. R. G. Morgan pour les défendeurs.
PROCUREURS:
Worrall, Page & Company, Vancouver, pour le demandeur.
Davis & Company, Vancouver, pour les défendeurs.
Ce qui suit est la version française des motifs de la décision sur mémoire spécial rendus par
LE JUGE GIBSON: Il s'agit en l'espèce d'un mémoire spécial en vue de faire statuer sur cer- tains points à décider pour remplacer une instruc tion conformément à la Règle 475 de la Cour fédérale, mémoire inscrit au rôle pour débat sur autorisation de la Cour, laquelle a été donnée le 22 septembre 1980, par le juge Collier. Le mémoire spécial dont ont convenu les parties porte la date du 8 septembre 1980 et a été déposé devant la Cour. Voici les questions à trancher:
[TRADUCTION] A. L'élection de Reginald Draney comme chef de la bande indienne de Cook's Ferry le 31 mars 1979 la suite du vote prépondérant du préposé ou président d'élection, Tony Harding, qui n'a pas qualité pour voter selon l'article 77 de la Loi sur les Indiens, est-elle valide selon la Loi sur les Indiens?
B. Si la réponse à la question A est «Non», Jimmy Billy et Dempsey Albert peuvent-ils continuer d'agir et d'exercer les pouvoirs du conseil de la bande indienne de Cook's Ferry en l'absence d'un chef dûment élu?
C. Si la réponse à la question A est «Non», la Cour est-elle autorisée à:
(i) exiger une nouvelle élection ou,
(ii) donner des directives relatives à la nouvelle élection devant se tenir pour le poste de chef de la bande indienne de Cook's Ferry?
L'article 76 de la Loi sur les Indiens, S.R.C. 1970, c. I-6, autorise le gouverneur en conseil à adopter des règlements; le voici:
76. (1) Le gouverneur en conseil peut établir des décrets et règlements sur les élections au sein des bandes et, sans restrein- dre la généralité de ce qui précède, il peut établir des règle- ments concernant
a) les assemblées pour la présentation de candidats;
b) la nomination et les fonctions des préposés aux élections;
c) la manière dont la votation doit avoir lieu;
d) les appels en matière électorale; et
e) la définition de l'expression «résidence» aux fins de déter- miner si une personne est habile à voter.
L'article 76(1) autorise donc le gouverneur en conseil, entre autres choses, à prendre des règle- ments portant sur les élections des bandes indien- nes et, sans restreindre le sens général de cette expression, portant notamment sur «la nomination et les fonctions des préposés aux élections».
En application de cette attribution, le gouver- neur en conseil a adopté le Règlement sur les élections au sein des bandes d'Indiens [C.R.C. 1978, Vol. X, c. 952] cité dans le mémoire spécial
et, ce qui importe quant aux questions posées, a défini, entre autres, l'expression «président d'élec- tion», donnant les devoirs de cet officier d'élection, et a aussi, particulièrement à l'article 9, prévu la marche à suivre pour résoudre le problème, lors- qu'il se pose, de deux ou plusieurs candidats obte- nant un nombre égal de voix dans une élection, en donnant à ce président d'élection le pouvoir de voter afin de rompre l'égalité. Ce faisant, l'article 9 retire aussi le droit audit président d'élection de voter au cours de l'élection elle- même.
Il n'y a rien dans le Règlement en matière d'élections au sein des bandes d'Indiens, adopté par le gouverneur en conseil en application de l'article 76 de la Loi sur les Indiens, ni dans la Loi sur les Indiens elle-même, qui exige que le prési- dent d'élection (que nomme la bande avec l'agré- ment du Ministre) soit un électeur qualifié confor- mément à l'article 77 de la Loi sur les Indiens, que voici:
77. (1) Un membre d'une bande, qui a vingt et un ans révolus et réside ordinairement dans la réserve, a qualité pour voter en faveur d'une personne présentée comme candidat au poste de chef de la bande et, lorsque la réserve, aux fins d'élection, ne comprend qu'une section, pour voter en faveur de personnes présentées aux postes de conseillers.
(2) Un membre d'une bande, qui a vingt et un ans révolus et réside ordinairement dans une section établie aux fins de votation, a qualité pour voter en faveur d'une personne présen- tée au poste de conseiller pour représenter cette section.
On comprend pourquoi il en est ainsi.
Parmi les raisons qui font que c'est compréhen- sible, on le notera, il y a que le président d'élection, selon le Règlement sur les élections au sein des bandes d'Indiens, a plusieurs fonctions officielles et, en cette capacité officielle, il doit agir en toute indépendance et impartialité. Une de ces fonctions officielles, que le président d'élection en cause a exercée, est celle de voter pour rompre un vote égal. Comme il a été dit, l'article 9 du Règlement sur les élections au sein des bandes d'Indiens, adopté en application de l'article 76(1) de la Loi sur les Indiens, lui donnait ce pouvoir et c'est uniquement à cause de ce pouvoir réglementaire statutaire qu'il a pu le faire.
Le Parlement et le gouverneur en conseil déte- naient l'autorité pour ainsi légiférer; il n'y a rien d'ultra vires dans les dispositions réglementaires et légales pertinentes en cause. (Cf. Rogers on Elec-
tions, 20e édition, Stevens and Sons, Limited, Lon- dres et Ex Parte Tuttle (1860) 9 N.B.R. 615, Cour d'appel du Nouveau-Brunswick.)
En adoptant ces dispositions on n'entrait pas en conflit avec les articles 76(1)b) et 77 de la Loi sur les Indiens, ce dernier article visant et prescrivant les conditions d'admissibilité à voter pour un can- didat au poste de chef de bande.
En conséquence il est répondu à la question A ci-dessus par l'affirmative.
Il s'ensuit qu'il n'est pas nécessaire de répondre aux questions B et C.
L'une ou l'autre partie rédigera un jugement déclaratoire en exécution de la présente décision, y incluant une disposition disant que les dépens de l'instance selon le mémoire spécial vont aux défen- deurs; jugement sera rendu dès que la Cour en aura réglé la forme.
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