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A-378-80
Le procureur général du Canada (Requérant)
c.
Normand Loiselle (Intimé)
Cour d'appel, les juges Pratte, Ryan et Le Dain— Ottawa, 25 septembre et 31 octobre 1980.
Examen judiciaire Fonction publique Demande en annulation de la décision du Comité d'appel qui a ordonné à la Commission de la Fonction publique d'ignorer la recomman- dation de renvoi de l'employé intimé pour cause d'incompé- tence Il échet d'examiner si le Comité d'appel a excédé sa compétence en décidant qu'il ne fallait pas donner suite à la recommandation par ce motif que le sous-chef n'avait pas d'abord envisagé la possibilité d'une mutation plutôt que d'un renvoi L'incompétence de l'intimé ne faisait pas de doute Demande accueillie Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-32, art. 31 Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10, art. 28.
DEMANDE d'examen judiciaire. AVOCATS:
R. W. Côté pour le requérant.
J. D. Richard, c.r. pour l'intimé.
PROCUREURS:
Le sous-procureur général du Canada pour le
requérant.
Gowling & Henderson, Ottawa, pour l'intimé.
Voici les motifs du jugement rendus en français par
LE JUGE PRATTE: Cette requête faite en vertu de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2e Supp.), c. 10, a été entendue en même temps que la requête de même nature faite dans le dossier A-334-80, La Reine c. Larsen.'
A l'audience les avocats des parties en cause nous ont représenté que les deux affaires étaient, à toutes fins pratiques, semblables et soulevaient le même problème. Si tel était bien le cas, il suffirait, pour trancher ce litige, de se reporter à la décision rendue dans l'affaire Larsen. Pour les motifs donnés à l'appui de cette décision-là, cette requê- te-ci devrait être accueillie et la décision attaquée devrait être cassée. Il suffit cependant de lire
' Voir supra à la page 199.
attentivement le dossier pour voir qu'il existe entre ces deux affaires, malgré leur similitude, une diffé- rence capitale.
Les deux affaires, il est vrai, présentent plu- sieurs points de ressemblance. Toutes deux mettent en cause la validité d'une décision prononcée sui- vant l'article 31 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique, S.R.C. 1970, c. P-32, par un Comité établi par la Commission de la Fonction publique. Dans les deux cas, le Comité était saisi de l'appel d'un employé dont on avait recommandé le renvoi pour cause d'incompétence. Dans les deux cas, aussi, malgré que l'incompétence de l'employé en cause ne faisait pas de doute, le Comité n'a pas rejeté l'appel.
Mais, alors que le Comité, dans l'affaire Larsen, avait ordonné à la Commission de muter l'employé incompétent, le Comité, dans la décision attaquée, a fait droit à l'appel de l'employé et a ordonné à la Commission d'ignorer la recommandation du sous- chef. Si le Comité en a décidé ainsi c'est qu'il a considéré que la recommandation de renvoi n'était pas raisonnable parce qu'elle avait été faite par le sous-chef sans avoir d'abord envisagé la possibilité d'une mutation plutôt que d'un renvoi. La question que soulève cette affaire-ci est donc celle de savoir si un comité saisi d'un appel d'une recommanda- tion de renvoi pour cause d'incompétence peut faire droit à l'appel et décider qu'il ne faut pas donner suite à cette recommandation pour le seul motif que le sous-chef qui l'a faite n'a pas consi- déré (ou suffisamment considéré) la possibilité de muter l'employé incompétent plutôt que de le renvoyer.
Pour pouvoir répondre de façon affirmative à cette question, il faut supposer, comme semble l'avoir fait l'auteur de la décision attaquée, que l'article 31 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique impose au sous-chef l'obligation, avant de recommander le renvoi d'un employé incompétent, de considérer sérieusement la possibilité d'une mutation plutôt que d'un renvoi. Je ne peux inter- préter ainsi l'article 31 qui, à mon avis, prescrit seulement que la recommandation de renvoi ou de mutation d'un employé incompétent soit fondée sur l'opinion du sous-chef, d'une part, que l'em- ployé est incompétent et, d'autre part, qu'il doit être soit muté, soit renvoyé, suivant que le sous- chef recommande la mutation ou le renvoi. Rien
dans l'article 31, tel que je le comprends, n'oblige les autorités d'un ministère, avant de recomman- der le renvoi d'un employé incompétent, à se demander s'il ne serait pas possible de le nommer à un autre poste plutôt que de le renvoyer. Et cela me semble normal. Le renvoi d'un employé incom- pétent n'est pas une sanction disciplinaire. Si un employé est incompétent, il doit quitter son poste. Il me semble qu'il appartient aux autorités du ministère, et à elles seules, de décider si l'employé incompétent doit être renvoyé ou nommé ailleurs.
Pour ces motifs, je ferais droit à la requête, je casserais la décision attaquée et je renverrais l'af- faire au Comité pour qu'il la décide en prenant pour acquis qu'un comité saisi, en vertu de l'article 31 de la Loi sur l'emploi dans la Fonction pu- blique, d'un appel d'une recommandation de renvoi pour cause d'incompétence n'a pas le pou- voir de se prononcer sur l'opportunité de renvoyer l'employé jugé incompétent.
* * *
LE JUGE RYAN: Je suis d'accord.
* * *
LE JUGE LE DAIN: Je suis d'accord.
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