A-633-80
Francisco Humberto Gonzalez Galindo (Requé-
rant)
c.
Le ministre de l'Emploi et de l'Immigration
(Intimé)
Cour d'appel, les juges Unie et . Ryan, le juge
suppléant Kelly—Toronto, 23 février 1981.
Examen judiciaire — Immigration — Demande d'examen et
d'annulation d'une décision de la Commission d'appel de
l'immigration qui, compte tenu du peu d'importance des acti-
vités politiques du requérant, a considéré comme exagéré le
témoignage de celui-ci quant à sa détention et à sa mise à la
torture — Demande accueillie — Il n'y a aucun lien de cause à
effet entre le degré d'activité politique du requérant et les
nouvelles détentions et persécutions que les troubles tant phy
siques que psychiques dont il a souffert peuvent l'amener à
craindre — Le requérant a le droit de contester certains
renseignements recueillis lors d'autres audiences et sur les-
quels la Commission s'est fondée — Loi sur la Cour fédérale,
S.R.C. 1970 (2' Supp.), c. 10, art. 28 — Loi sur l'immigration
de 1976, S.C. 1976-77, c. 52, art. 71(2).
DEMANDE d'examen judiciaire.
AVOCATS:
Nancy Goodman pour le requérant.
R. Levine pour l'intimé.
PROCUREURS:
Knazan, Jackman & Goodman, Toronto, pour
le requérant.
Le sous-procureur général du Canada pour
l'intimé.
Ce qui suit est la version française des motifs
du jugement de la Cour prononcés à l'audience
par
LE JUGE URIE: Nous sommes unanimes à
penser que la présente demande fondée sur l'article
28 doit être accueillie.
Il ressort d'une lecture attentive des motifs du
jugement de la Commission d'appel de l'immigra-
tion que celle-ci a considéré comme exagéré, [TRA-
DUCTION] «compte tenu du peu d'importance de
ses activités politiques avant septembre 19730, le
témoignage du requérant quant à sa détention et à
sa mise à la torture pendant une période de deux
ans suivie, dans les années subséquentes, de plus
courtes périodes de détention deux fois par année.
Pour en arriver à cette conclusion, la Commission
semble avoir fait abstraction des dépositions des
témoins médicaux indépendants quant à la nature
des troubles tant physiques que psychiques dont a
souffert le requérant et qui, toujours selon ces
témoins, sont compatibles avec les tortures et la
détention relatées par le requérant. A notre avis,
ces dépositions démontrent qu'il n'y a aucun lien
de cause à effet entre le degré d'activité politique
du requérant et les nouvelles détentions, tortures et
persécutions que les troubles dont il a souffert
peuvent l'amener à craindre. Ce motif, à lui seul,
suffirait à justifier un réexamen de la question.
Or, en l'espèce, la Commission s'est en outre
fondée, de façon préjudiciable au requérant, sur
certains renseignements recueillis lors d'autres
audiences ayant trait au Chili. Il ne s'agit pas de
renseignements dont on pouvait, à l'occasion de
procédures devant un tribunal, prendre connais-
sance judiciaire. Il ne s'agit pas non plus de rensei-
gnements généraux, bien connus de la Commission
et du public, du genre mentionné dans l'affaire
Maslej'. Si la Commission, lors d'une audience
tenue en vertu du paragraphe 71(2) de la Loi sur
l'immigration de 1976, S.C. 1976-77, c. 52, doit se
fonder sur le genre de renseignements dont il est
question en l'espèce, renseignements auxquels un
requérant pourrait, semble-t-il, très bien s'opposer,
la justice naturelle exige que le requérant ait le
droit de les contester de la même façon qu'il
contesterait les preuves présentées lors de l'au-
dience.
Par ces motifs, la demande sera accueillie. L'or-
donnance de la Commission d'appel de l'immigra-
tion datée du 8 septembre 1980 sera annulée et
l'affaire renvoyée à la Commission pour que cel-
le-ci, de préférence autrement constituée, l'ins-
truise et la juge d'une manière conforme aux
présents motifs.
' [1977] 1 C.F. 194.
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