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A-495-82
Allied Auto Parts Ltd. (appelante) (requérante) c.
Commission canadienne des transports et Ville de Winnipeg (intimées) (intimées)
Cour d'appel, juge en chef Thurlow, juge Heald et juge suppléant Lalande—Winnipeg, 7 octobre; Ottawa, 3 novembre 1982.
Contrôle judiciaire Demandes d'examen Transports
Demande d'examen et d'annulation d'une ordonnance du Comité des transports par chemin de fer autorisant la cons truction d'un passage à niveau et d'un passage inférieur, et appel de cette ordonnance sous le régime de l'art. 64(2) de la Loi nationale sur les transports L'appelante a demandé une audience pour exposer ses objections À deux reprises, la Commission a demandé des détails sur les objections, mais aucun n'a été fourni Il y a preuve que la Commission a examiné la demande avant la dernière demande d'observations
Les commissaires rendant l'ordonnance savaient que le président de la Commission avait indiqué au ministre des Transports que l'ordonnance serait rendue si une subvention était approuvée L'ordonnance a été rendue 18 jours après la deuxième demande d'observations, aucune audience n'ayant été tenue La demande fondée sur l'art. 28 est rejetée, et l'ordonnance certifiée valide Il n'y a pas eu dénégation de la règle audi alteram partem ni de l'obligation d'agir équitable- ment puisque, compte tenu des faits, l'appelante a eu une possibilité raisonnable de se faire entendre L'examen de la demande avant la dernière demande d'observations ne consti- tue pas une violation de justice naturelle, aucune ordonnance officielle n'ayant été rendue Il est toujours loisible au Comité d'examiner équitablement les objections pertinentes et d'y donner suite Le juge suppléant Lalande ajoute que la question des intérêts particuliers de l'appelante ne relève pas de la compétence de la Commission qui est limitée à «la protection, la sécurité et la commodité du publia. par la Loi sur les chemins de fer et la Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2 e Supp.), chap. 10, art. 28, 29 Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, chap. N-17, art. 46(1)a), 64(2) mod. par S.R.C. 1970 (2 e Supp.), chap. 10, art. 65 Loi sur les chemins de fer, S.R.C. 1970, chap. R-2, art. 196, 197, 198 Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer, S.C. 1974, chap. 12, art. 16(2) Règles générales de la Commission canadienne des transports, C.R.C., chap. 1142, art. 21, 22, 29, 30, 31, 32, 49, 51, 53, 54, 55, 56, 57, 58 65.
Contrôle judiciaire Appels prévus par la loi Loi nationale sur les transports, art. 64(2) Appel d'une ordon- nance du Comité des transports par chemin de fer autorisant la construction d'un passage à niveau et d'un passage inférieur
La Commission a demandé des détails d'objections mais aucun n'a été fourni Ordonnance rendue sans audience Aucune violation de justice naturelle Ordonnance confirmée Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, chap. N-17, art. 64(2) mod. par S.R.C. 1970 (2e Supp.), chap. 10, art. 65.
Chemins de fer Le Comité des transports par chemin de fer a autorisé la construction d'un passage à niveau provisoire et d'un passage inférieur permanent Demande formulée par Winnipeg contestée par un groupe de citoyens Audience demandée par le groupe Le groupe n'a pas tenu compte de la possibilité d'exposer des objections Le Comité a conclu que la sécurité, la protection et la commodité du public exigeaient la construction d'un croisement étagé La demande d'examen et l'appel de l'ordonnance sont rejetés En vertu de l'art. 197(2) de la Loi sur les chemins de fer et de l'art. 16(2) de la Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer, la fonction de la Commission porte uniquement sur la protection, la sécurité et la commodité du public Les intérêts particuliers de l'appelante ne relèvent pas de la compétence de la Commission Loi sur les chemins de fer, S.R.C. 1970, chap. R-2, art. 197(2) Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer, S.C. 1974, chap. 12, art. 16(2).
L'appel formé sous le régime de l'article 64(2) de la Loi nationale sur les transports contre une ordonnance du Comité des transports par chemin de fer a été suivi d'une demande de contrôle judiciaire sous l'empire de l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale. La ville de Winnipeg a demandé à la Commis sion canadienne des transports de rendre une ordonnance auto- risant la construction d'un passage à niveau provisoire et d'un passage inférieur permanent sous les voies ferrées. Un groupe de citoyens, dont l'appelante était le porte-parole, a écrit au Comité pour s'opposer au projet et pour demander la tenue d'une audience afin d'exposer ses objections. Le Comité a répondu que «À moins d'autres objections importantes, il n'y a pas lieu de retarder ni de rejeter la requête de la ville relative aux travaux projetés.» Le groupe de citoyens a réitéré la demande d'audience, mais n'a pas tenu compte de la possibilité d'exposer ses objections. Par la suite, le président de la Com mission a recommandé au ministre des Transports d'approuver une subvention de construction. Il a ajouté que «Si une subven- tion était approuvée, le Comité des transports par chemin de fer rendrait une ordonnance autorisant la construction ...» Le Comité a réitéré sa demande d'objections précises. Dix-huit jours plus tard, le Comité a prononcé l'ordonnance contestée, n'ayant pas reçu de demande sollicitant le report de sa décision à une date particulière ou pour permettre la rédaction d'un exposé d'observations. L'appelante fait valoir que le Comité, ayant demandé à la ville et à l'appelante de soumettre des observations, a omis de respecter la règle audi alteram partem ou ne s'est pas acquitté de son obligation d'agir équitablement en rendant l'ordonnance sans avoir entendu les observations de l'appelante. On a fait valoir en outre que le Comité a violé les règles de justice naturelle en examinant et en approuvant la requête de la ville avant la demande finale d'observations. Ce dernier argument reposait sur une recommandation non datée du Comité, savoir l'approbation d'une subvention pour la cons truction du passage inférieur après un examen approfondi de la demande. La recommandation a conclu que «la sécurité, la protection et la commodité du public» exigeaient la construction du croisement étagé.
Arrêt (le juge Heald dissident): la demande fondée sur l'article 28 devrait être rejetée, et, dans l'appel, l'ordonnance du Comité des transports par chemin de fer est certifiée valide.
Le juge en chef Thurlow: La plainte de l'appelante selon laquelle elle n'a pas eu une possibilité raisonnable de se faire
entendre est malvenue. L'appelante n'a ni envoyé un exposé d'objections ni indiqué au Comité qu'elle le ferait après deux demandes formulées par le Comité. Le fait que les demandes de construction et de subvention formulées par la ville aient été examinées et approuvées avant qu'il soit demandé une dernière fois à l'appelante de soumettre des observations ne signifie pas que le Comité ne pouvait plus examiner équitablement les objections pertinentes et y donner suite. Aucune ordonnance officielle n'avait été rendue, et jusqu'à ce qu'elle le fût, il était loisible au Comité de changer d'idée. Aucune règle de droit ou de procédure n'exige d'un tribunal qu'il reporte l'examen d'une demande et la publication de son avis au cas quelqu'un interviendrait. Bien que le Comité ait averti qu'il ne retarderait pas ni ne rejetterait la requête de la ville à moins d'objections importantes, cela ne voulait pas dire que le Comité ne prendrait pas en considération les objections pertinentes et convaincantes et qu'il n'y donnerait pas suite. De même, puisque l'appelante n'a fait valoir aucun motif d'objection devant le Comité, on ne saurait dire que le fait que le Comité ait tiré sa conclusion a eu pour effet d'empêcher toute objection de la part de l'appelante.
Le juge suppléant Lalande: Selon l'article 197(2) de la Loi sur les chemins de fer et l'article 16(2) de la Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer, la Commission s'occupe de »la protection, la sécurité et la commodité du public». Ainsi, le pouvoir décisionnel de la Commission est limité à la protection, à la sécurité et à la commodité du public. Si les intérêts particuliers de l'appelante sont touchés par l'abaissement du niveau de la rue, c'est une affaire entre elle et la ville, et cela ne relève pas de la compétence de la Commission. De plus, dans sa deuxième demande d'observations, la Commission rappelait son invitation antérieure, et il faut donc, pour évaluer l'équité de la procédure, tenir compte de dix-sept jours de plus. Étant donné les possibili- tés que l'appelante avait de faire des observations, la Commis sion n'a pas violé son obligation d'équité.
Le juge Heald (dissident): En ne présentant pas d'observa- tions écrites, l'appelante ne s'est pas conformée aux Règles générales de la Commission canadienne des transports relati ves à l'intervention. Toutefois, la Règle 49 autorise la Commis sion à ne pas suivre, totalement ou en partie, les formes de procédures. En réitérant sa demande d'observations, le Comité accordait en fait une prorogation de délai à l'appelante pour qu'elle fasse d'autres observations. Ce qui s'était passé avant cette prorogation n'est pas pertinent pour déterminer si le Comité, en rendant sa décision dix jours ouvrables après l'octroi de cette prorogation, a agi de façon appropriée et dans l'exer- cice de sa compétence. Dix jours ouvrables est une période de temps déraisonnablement courte si l'on considère que l'appe- lante n'était qu'une entreprise parmi tant d'autres qui seraient touchées par les changements et qui agissaient par l'entremise de procureurs et devaient leur donner des instructions avant la préparation et la soumission des observations. Appliquant le critère adopté dans The Committee for Justice and Liberty, et autres c. L'Office national de l'énergie, et autres, [1978] 1 R.C.S. 369, on peut conclure que des personnes assez bien renseignées pouvaient avoir une crainte raisonnable de partia- lité, compte tenu du fait que les commissaires auteurs de l'ordonnance contestée savaient que le président de la Commis sion avait indiqué qu'une ordonnance prévoyant la construction serait rendue si une subvention était approuvée, et qu'une telle ordonnance avait été approuvée. Étant donné que les commis-
saires savaient cela et que le délai donné à l'appelante pour faire ses observations était relativement court, le défaut d'atten- dre les observations de l'appelante constituait une violation grave des règles de justice naturelle. Le Comité des transports par chemin de fer aurait aviser l'appelante que sa décision allait être rendue à une certaine date et que si elle désirait soumettre des observations, elle devrait les envoyer sur-le- champ.
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Le ministre du Revenu national c. Coopers and Lybrand, [1979] 1 R.C.S. 495; Gateway Packers 1968 Limited c. Burlington Northern (Manitoba) Limited et autre, [1971] C.F. 359 (C.A.).
DÉCISIONS CITÉES:
Hoffman -La Roche Limited v. Delmar Chemical Limi ted, [ 1965] R.C.S. 575; Russell v. Duke of Norfolk and others, [1949] 1 All E.R. 109 (C.A.); Committee for Justice and Liberty, et autres c. L'Office national de l'énergie, et autres, [1978] 1 R.C.S. 369.
AVOCATS:
W. R. De Graves, c.r. et Gavin Wood pour l'appelante (requérante).
K. Margaret Bloodworth pour la Commission canadienne des transports, intimée (intimée).
W. R. Stovel pour la ville de Winnipeg, inti- mée (intimée).
PROCUREURS:
Christie, De Graves, MacKay, Winnipeg, pour l'appelante (requérante).
Contentieux, Commission canadienne des transports, Saskatoon, pour la Commission canadienne des transports, intimée (intimée). Contentieux, Ville de Winnipeg, Winnipeg, pour la ville de Winnipeg, intimée (intimée).
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE EN CHEF THURLOW: Le présent appel, fondé sur le paragraphe 64(2) de la Loi nationale sur les transports [S.R.C. 1970, chap. N-17, mod. par S.R.C. 1970 (2° Supp.), chap. 10, art. 65], est formé contre l'ordonnance R-33625 rendue le 22 mars 1982 par le Comité des transports par chemin de fer. Conformément à un ordre de la Cour à cet effet, le présent appel et la demande introduite par l'appelante en vertu de l'article 28
de la Loi sur la Cour fédérale [S.R.C. 1970 (2 e Supp.), chap. 10] et tendant à l'examen et à l'annulation de la même ordonnance ont été réunis et entendus en même temps. L'ordonnance en question autorisait la ville de Winnipeg à cons- truire un passage provisoire et un passage inférieur permanent sous les voies ferrées du Canadien National et du Canadien Pacifique qui traversent la rue King Edward, dans la ville de Winnipeg. La question qui se pose tant dans le présent appel que dans la demande fondée sur l'article 28 est de savoir si en rendant l'ordonnance, le Comité a omis d'observer les principes de justice naturelle.
Les requêtes que la ville a soumises à la Com mission pour obtenir l'approbation de ses projets ont été introduites le 17 août 1981 et le 22 octobre 1981 la suite de quelques mois de discussions et de plusieurs audiences publiques l'appelante a été représentée et elle a fait valoir certaines objections. L'appelante n'a pas reçu de notification officielle de la requête présentée par la ville à la Commission, mais elle l'a appris le 13 janvier 1982 d'un procureur qui l'en a informée et qui, par la suite, s'est rendu aux bureaux de la Commission et a obtenu des copies des requêtes. Le 26 janvier, la lettre suivante a été envoyée au Comité des trans ports par chemin de fer par The Concerned Citi zens of Vopni Avenue, organisme dont l'appelante était membre.
[TRADUCTION] Messieurs,
Objets: (1) Demande relative à la construction d'un passage à niveau provisoire, rue King Edward, franchissant les voies ferrées du CP près du point milliaire 3.6 de la subdivision Carberry et celles du CN près du point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point;
(2) Demande relative au projet de construction d'un
croisement étagé à l'endroit ci-dessus.
Vos dossiers n°' 27365.27 et 27367.1601
Sachez que nous représentons des habitants et des hommes d'affaires de la région des travaux projetés susmentionnés.
Soyez informés en outre que nous nous opposons à ce projet.
Nous demandons la tenue d'une audience afin de pouvoir exposer nos objections.
Nous attendons avec impatience la tenue de cette audience et vous demandons de nous aviser de l'heure et de la date de celle-ci.
Nous vous prions d'agréer, Messieurs, l'expression de nos senti ments distingués.
Voici ce que le Comité a répondu à cette lettre le 15 février 1982:
[TRADUCTION] Messieurs,
Objets: (1) Demande relative à la construction d'un passage à niveau provisoire, rue King Edward, au point mil- liaire 3.6 de la subd. Carberry et au point milliaire 5.74 de la subd. Oak Point.
(2) Demande relative à la construction d'un passage à
niveau provisoire à l'endroit ci-dessus.
Nous accusons réception de votre lettre du 26 janvier 1982 et nous vous envoyons sous pli copie de la lettre du 2 février 1982 de la ville de Winnipeg concernant la question citée sous rubrique.
Vous n'avez pas exposé la nature de vos objections aux travaux de construction que la ville projette d'entreprendre, mais il ressort de la lettre de la ville en date du 2 février 1982 que vous vous êtes opposés au plan initial de la ville consistant à inter- rompre la communication directe entre la route 90 et l'extré- mité ouest de l'avenue Vopni, empêchant les véhicules d'y entrer ou d'en sortir directement à cet endroit.
Il est à noter que vous avez assisté à plusieurs réunions organi sées par la ville en 1980 et en 1981 pour discuter de ce problème, et vous avez effectivement assisté à une réunion tenue le 5 mars 1981 la ville a présenté une modification approuvée du projet: l'ajout d'une rampe d'accès du nord de la route 90 à l'extrémité ouest de l'avenue Vopni.
Il semble donc que la ville ait apaisé votre appréhension au sujet de l'accès à l'avenue Vopni.
À moins d'autres objections importantes, il n'y a pas lieu de retarder ni de rejeter la requête de la ville relative aux travaux projetés.
Nous vous prions d'agréer, Messieurs, l'expression de nos senti ments respectueux.
À la même date, le Comité a avisé la ville de l'objection et il l'a invitée à faire des commentai- res. Entre-temps, le 1°r février 1982, le procureur de la ville avait écrit au Comité pour demander l'accélération de l'approbation de la requête, et, le 2 février 1982, le gestionnaire de la ville responsa- ble de la voirie et de la circulation avait écrit au Comité une lettre précisant les mesures prises par la ville pour aviser le public du projet, les objec tions soulevées par The Concerned Citizens of Vopni Avenue et la suggestion faite à l'égard de celles-ci.
Le 17 février, The Concerned Citizens of Vopni Avenue a répondu à la lettre du Comité comme suit:
[TRADUCTION] Monsieur O'Hara,
Objets: (1) Demande relative à la construction d'un passage à niveau provisoire, rue King Edward, franchissant les voies ferrées du CP près du point milliaire 3.6 de la subdivision Carberry et celles du CN près du point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point; (2) Demande relative au projet de construction d'un croisement étagé à l'endroit ci-dessus.
Vos dossiers nOS 27365.27 et 27367.1601
Nous accusons réception de votre lettre du 15 février 1982. Nous venons tout juste de la recevoir et nous avons pris note de sa teneur.
Une audience serait de nature à nous permettre d'exposer nos objections relatives à la demande susmentionnée.
Nous vous demandons de fixer la date et l'heure d'une telle audience, et nous nous arrangerons pour y assister.
Nous attendons avec impatience la tenue d'une telle audience.
Nous vous prions d'agréer, Monsieur, l'expression de nos senti ments distingués.
Voici la réponse faite par la ville le 23 février 1982:
[TRADUCTION] Messieurs,
OBJET: Projet de construction d'un croisement étagé, rue King Edward (route 90)—voies ferrées du CN au point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point et du CP au point milliaire 3.6 de la subdivision Carberry—Votre
dossier 27365.27 _
Nous accusons réception de votre lettre du 15 février 1982 invitant la ville à faire des remarques sur la lettre que M. A. Gillman, au nom de «The Concerned Citizens of Vopni Avenue», a envoyée au Comité des transports par chemin de fer le 26 janvier 1982.
Étant donné que M. Gillman, dans sa lettre du 26 janvier 1982, n'a pas donné de détails sur les raisons pour lesquelles «The Concerned Citizens of Vopni Avenue» s'est opposé au projet de construction d'un croisement étagé, la ville doit présumer que les préoccupations de «The Concerned Citizens of Vopni Avenue» sont celles qui ont déjà été exposées par M. Gillman devant le comité des travaux et opérations et devant d'autres comités du Conseil de la ville de Winnipeg.
Comme vous le savez, ces préoccupations ont déjà été étudiées à fond par lesdits comités et par le Conseil de la ville de Winnipeg, ainsi qu'il ressort d'une lettre que M. L.R. Camp- bell, le gestionnaire de la ville responsable de la voirie et de la circulation, a écrite le 2 février 1982 à M. G.P. Beach, chef, passages à niveau et programmes de construction, de votre bureau de Winnipeg.
Nous vous prions de nous faire savoir si votre Comité a besoin d'autres renseignements concernant cette question.
Nous vous prions d'agréer, Messieurs, l'expression de nos senti ments respectueux.
Le 4 mars 1982, le Comité des transports par chemin de fer a écrit à la fois au procureur de la ville et à Gillman de The Concerned Citizens of Vopni Avenue:
[TRADUCTION] Messieurs,
Objets: Demande relative à la construction d'un passage à niveau provisoire, rue King Edward, au point milliaire 3.6 de la subdivision Carberry et au point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point.
Demande relative au projet de construction d'un
croisement étagé à l'endroit ci-dessus
Nous accusons réception de la lettre du 23 février 1982 de la ville de Winnipeg et de la lettre du 17 février 1982 de M. Gillman—porte-parole de «The Concerned Citizens of Vopni Avenue» relativement au projet susmentionné.
Il est à noter que M. Gillman n'a pas encore précisé la nature de son opposition à la proposition de la ville. Notre lettre du 15 février 1982 visait à obtenir des précisions sur toute autre objection importante qu'il pourrait avoir. Nous demandons encore une fois à M. Gillman d'exposer ses objections.
À la lettre de M. Gillman est jointe copie de la lettre de la ville du 23 février, et à celle-ci, copie de la lettre de M. Gillman du 17 février 1982.
Nous demandons aux deux parties de faire d'autres observations.
Nous vous prions d'agréer, Messieurs, l'expression de nos sentiments distingués.
Le 12 mars, le procureur de la ville a répondu en ces termes:
[TRADUCTION] Messieurs,
OBJET: Projet de construction d'un croisement étagé, rue King Edward (route 90)—voies ferrées du CN, au point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point, et du CP au point milliaire 3.6 de la subdivision Carberry
Nous accusons réception de votre lettre du 4 mars 1982 conte- nant une copie de la lettre de M. Gillman datée du 17 février 1982 et invitant la ville à faire des observations sur celle-ci.
Étant donné que ladite lettre de M. Gillman n'ajoute rien de plus à ce qu'il a exposé dans sa première lettre du 26 janvier 1982 et à laquelle la ville a déjà répondu (voir la lettre que nous vous adressions le 23 février 1982), la ville n'a pas d'autres observations à faire pour l'instant à ce sujet.
Il est extrêmement urgent pour la ville que le Comité des transports par chemin de fer approuve la construction de ce croisement étagé et, de nouveau, la ville prie respectueusement votre Comité d'instruire la présente requête d'une façon aussi expéditive que possible.
Nous vous prions de croire à nos sentiments distingués.
Gillman n'avait pas encore répondu lorsque le 22 mars, l'ordonnance dont s'agit fut rendue. On a dit qu'un exposé était en voie d'être rédigé, mais on n'avait ni sollicité de délai précis ni demandé au Comité de ne pas rendre une ordonnance avant que l'exposé ait pu être rédigé et envoyé.
Dans son exposé des moyens soumis à la Cour, l'avocat de l'appelante a invoqué deux arguments. Selon le premier argument, le Comité des trans ports par chemin de fer, après avoir demandé, le 4 mars 1982, à la ville et aux Concerned Citizens de soumettre des observations, a omis de respecter la
règle audi alteram partem, d'agir de bonne foi et d'entendre équitablement les deux parties en ren- dant l'ordonnance le 22 mars 1982 sans avoir entendu l'appelante ni reçu ses observations. Pour ce qui est du deuxième moyen, on allègue qu'en n'accordant pas à l'appelante la possibilité d'être entendue malgré la demande de celle-ci à cet effet, le Comité a violé les règles de justice naturelle ou, à tout le moins, n'a pas respecté son obligation d'agir équitablement envers l'appelante, et a, par conséquent, outrepassé sa compétence.
À ce stade-ci, il est à propos de citer ce qu'a dit le juge en chef Jackett au sujet de la Commission canadienne des transports dans l'affaire Gateway Packers 1968 Limited c. Burlington Northern (Manitoba) Limited et autre':
Premièrement, la Gateway n'a droit, à mon avis, qu'à ce que lui garantit expressément ou implicitement les Règles de la Commission. Il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'une cour administrative d'archives traitant un très grand volume d'affai- res et dotée d'un ensemble de Règles qui ont été très soigneuse- ment élaborées. Le fonctionnement des tribunaux est fondé sur le fait que les règles donnent à chaque partie tous les moyens pour qu'elle obtienne justice, mais ces règles laissent aux parties le soin de veiller à leurs propres intérêts. Si une partie désire savoir ce qui est inscrit dans les dossiers de la Cour, elle peut les inspecter. Si elle désire des documents, elle peut faire les démarches nécessaires. Si elle désire une audition, elle peut faire une demande d'audition. Telle est la position d'une partie aux termes des Règles de la Commission. Chaque partie fournit ses documents de base accompagnés des documents justificatifs. Si cela la satisfait, elle peut alors en rester là. Si elle pense qu'il y a autre chose à prévoir ou à ajouter, elle peut faire les démarches appropriées conformément aux Règles. Dans la présente affaire, la Gateway, représentée par des procureurs compétents, a apparemment été satisfaite de sa démarche initiale. Elle ne s'est pas prévalue des autres mesures qu'elle pouvait prendre et ne peut pas se plaindre maintenant d'avoir été privée d'une juste audience.
En vertu des Règles [Règles générales de la Commission canadienne des transports, C.R.C., chap. 1142], l'appelante et The Concerned Citi zens of Vopni Avenue n'étaient pas parties aux requêtes introduites par la ville et n'avaient pas droit à un avis de leur présentation, à moins que le Comité ne l'ordonne. Mais, en tant que personnes dont les intérêts peuvent être touchés par le projet de construction, ils avaient le droit d'intervenir dans les requêtes en envoyant au secrétaire et en signifiant à la requérante et aux autres parties un exposé écrit faisant état de leurs intérêts et de leurs objections au projet. Si l'appelante avait
' [1971] C.F. 359 (C.A.), à la p. 376.
déposé un tel exposé à un stade ultérieur, une fois les points litigieux définis, la tenue d'une audience aurait pu être ordonnée soit du propre chef du Comité, soit sur requête d'une partie. Le Comité n'était toutefois pas tenu d'organiser ni de tenir une audition des requêtes sur demande d'un intervenant.
Au lieu de suivre la procédure prévue aux Règles, les Concerned Citizens, ayant entendu parler des requêtes, n'ont fait qu'envoyer au secré- taire du Comité la lettre du 26 janvier 1982 qui n'informait ce dernier ni de leurs intérêts particu- liers ni de ce qu'étaient leurs objections; il est simplement demandé dans la lettre la tenue d'une audience «afin de pouvoir exposer nos objections». Et même si la réponse donnée par le Comité le 15 février 1982 se terminait par le paragraphe disant «A moins d'autres objections importantes, il n'y a pas lieu de retarder ni de rejeter la requête de la ville relative aux travaux projetés», les Concerned Citizens, dans leur lettre du 17 février 1982, n'ont pas tenu compte de la possibilité qui leur était offerte d'exposer leurs objections; ils n'ont fait que réitérer leur demande d'audience, insistant ainsi, à mon avis, sur une procédure que ne prévoient pas les Règles.
Le 4 mars 1982, le Comité a de nouveau demandé aux Concerned Citizens, et à Gillman en particulier, en sa qualité de porte-parole de ces derniers, d'exposer leurs objections, et a demandé tant à Gillman qu'à la ville de faire d'autres observations. La ville a répondu le 12 mars, mais, bien que plus de deux semaines se soient écoulées entre la date de la lettre du Comité et le 22 mars, date à laquelle l'ordonnance a été rendue, aucun exposé d'objections ou d'observations n'a été envoyé au secrétaire par l'appelante ni par les Concerned Citizens, ni ont-ils fait savoir au Comité qu'un exposé était en voie de rédaction et serait envoyé. Compte tenu de ce qui précède, la plainte de l'appelante selon laquelle elle et les autres citoyens intéressés n'ont pas eu une possibi- lité raisonnable de se faire entendre est, à mon sens, malvenue. Par lettre en date du 15 février, le Comité les avait avertis qu'à moins d'objections importantes, il n'y avait pas lieu de retarder ni de rejeter la requête de la ville relative aux travaux projetés, et même après la lettre du 4 mars, ils ont eu deux semaines pour présenter leurs motifs
importants, si motifs il y avait. Or, au cours de cette période, ils n'ont ni envoyé un exposé de leurs objections ni fourni au Comité des motifs de croire qu'ils le feraient, soit en avisant le Comité que la rédaction de cet exposé était en cours, soit en demandant quel délai serait accordé pour l'envoi de cet exposé. À mon sens, leur prétention que le Comité ne leur a pas donné une possibilité raison- nable de se faire entendre et n'a donc pas observé les principes de justice naturelle et l'obligation d'équité doit être rejetée.
Un autre point a toutefois été soulevé au cours des débats. On a fait valoir, si je comprends bien, qu'il y avait eu déni de justice naturelle à l'égard de l'appelante et des Concerned Citizens, car il ressort de la preuve que le Comité avait déjà pris en considération les requêtes de la ville et décidé de les accueillir avant d'envoyer la lettre du 4 mars 1982, excluant ainsi toute observation ou objection utile que l'appelante et les Concerned Citizens auraient pu présenter.
La preuve sur laquelle s'est appuyée l'appelante consiste dans un résumé et une recommandation non datés et signés par deux membres du Comité des transports par chemin de fer et une lettre en date du 23 février 1982 adressée au ministre des Transports par le président de la Commission canadienne des transports. Quelque temps après le dépôt, en vertu de la Loi sur les chemins de fer [S.R.C. 1970, chap. R-2], des requêtes aboutissant à l'ordonnance dont appel, la ville avait, en vertu de l'article 16 de la Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer', demandé à la Commission une subvention pour couvrir une partie des frais de construction du passage inférieur. Le paragraphe 16(2) de cette Loi est ainsi rédigé:
16. ...
(2) Lorsqu'une demande lui est présentée en vertu du para- graphe (1), la Commission peut faire enquête sur la construc tion ou la reconstruction projetée du croisement étagé et, si elle est convaincue que la protection, la sécurité et la commodité du public exigent la construction ou la reconstruction de ce pas sage étagé, ou que cette construction ou reconstruction accroî- tra sensiblement la protection, la sécurité et la commodité du public, elle peut recommander au ministre des Transports d'accorder une subvention spéciale destinée à couvrir une partie des frais de celle-ci.
2 S.C. 1974, chap. 12.
Le résumé et la recommandation du Comité, après avoir exposé les grandes lignes du projet, disent ceci en reproduisant le langage du paragra- phe 16(2):
[TRADUCTION] La ville de Winnipeg s'est, dans sa requête, conformée aux conditions de l'article 16 de la Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer. Le Comité des transports par chemin de fer a examiné à fond la demande et est convaincu que la sécurité, la protection et la commodité du public exigent la construction du croisement étagé.
Ledit document recommande en outre qu'une sub- vention soit autorisée en vue de couvrir une partie des frais des travaux.
La lettre du président est ainsi rédigée:
[TRADUCTION] Monsieur le Ministre,
La ville de Winnipeg, de la province du Manitoba, a, par lettre en date du 22 octobre 1981, demandé l'autorisation de cons- truire deux passages inférieurs permettant à la rue King Edward de passer sous les voies ferrées du Canadien Pacifique Limitée au point milliaire 3.6 de la subdivision Carberry et de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada au point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point; elle a demandé en outre, en vertu de l'article 16 de la Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer, une subven- tion destinée à couvrir une partie des frais de construction. Vous trouverez sous pli les détails de la requête.
La ville s'est, dans sa requête, conformée à toutes les conditions de l'article 16 de la Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer. Ayant examiné la requête et étant convaincue que la protection, la sécurité et la commodité du public exigent la construction du croisement étagé, la Com mission recommande maintenant qu'une subvention soit autori- sée en vue de couvrir une partie des frais des travaux.
Si une subvention était approuvée, le Comité des transports par chemin de fer rendrait une ordonnance autorisant la contruc- tion des passages inférieurs.
Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de nos sentiments respectueux.
Je ne vois aucune raison de douter qu'à l'époque de la rédaction de la lettre, le Comité des trans ports par chemin de fer avait pris en considération tant la requête de la ville présentée sous le régime de la Loi sur les chemins de fer en vue de l'appro- bation de la construction du passage provisoire et du passage inférieur que la requête présentée en vertu de la Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer en vue de l'octroi de fonds, et avait conclu, soit à titre provisoire, soit à titre final, que les conditions posées tant par l'article 198 de la Loi sur les chemins de fer que par l'article 16 de la Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer
portant sur la protection, la sécurité et la commo- dité du public avaient été remplies et que le Comité devrait approuver la construction. A mon avis, il ne s'ensuit pas, toutefois, que le Comité s'était par rendu incapable d'examiner équita- blement toute objection pertinente ou importante qui pourrait par la suite être formée contre une ordonnance d'approbation, et d'y donner suite, ou qu'on avait causé à l'appelante ou aux Concerned Citizens un préjudice ou les avait privés de tout droit de nature procédurale ou autre.
Cet argument est fondé sur deux raisons. Pre- mièrement, l'ordonnance officielle n'avait pas été rendue et jusqu'à ce qu'elle le soit, il était toujours loisible au Comité de changer d'idée et de modifier la conclusion qu'il avait tirée. À mon sens, il n'est pas concevable qu'un tel tribunal, étant saisi de la requête de la ville fût obligé, du 22 octobre 1981 au 26 janvier 1982, de différer son examen au cas quelqu'un interviendrait ou formerait une objection, et je ne connais aucune règle de droit ou de procédure qui exigerait du Comité qu'il reporte l'examen de la requête et la publication de son avis au cas quelqu'un interviendrait. Si telle était la règle, la capacité du Comité à exercer ses fonctions se trouverait paralysée. En vertu de la Règle 21 3 , le Comité pouvait décider à qui avis des requêtes devait être donné, et aucune ordonnance n'avait été rendue exigeant la signification à quiconque de l'une ou de l'autre requête ou un avis public de celles-ci. À mon avis, on doit présumer qu'étant donné ce qui s'était passé depuis le premier avis public du projet, le Comité a considéré qu'il n'était pas nécessaire de donner, aux particuliers ou au public, avis des demandes d'approbation de la construction, et il n'est donc pas surprenant que la lettre écrite par le Comité aux Concerned Citizens le 15 février 1982 doive indiquer, comme elle le fait, qu'une conclusion a été tirée et qu'à moins d'objections importantes autres que celles mention- nées dans la lettre, il n'y avait pas lieu de retarder ni de rejeter la requête de la ville. Toutefois, cela ne voulait nullement dire que le Comité ne pren-
3 21. La Commission peut, en tout cas, donner ou faire donner un avis public ou tel autre avis qui lui semble raisonna- ble dans les circonstances de toute requête qui lui est faite, et lorsque la Commission exige qu'un avis soit donné, le requérant devra déposer auprès du secrétaire preuve qu'un avis a été donné tel que requis.
drait pas en considération les objections pertinen- tes et convaincantes et qu'il n'y donnerait pas suite. À mon avis, il n'y a pas lieu de croire que le Comité n'aurait pas statué équitablement sur toute objection pertinente et importante et n'y aurait pas donné suite, même à ce stade, si l'appelante ou les Concerned Citizens en avaient soulevé une.
Pour ce qui est de l'autre raison, on ne saurait dire que le fait que le Comité ait, le 23 février 1982, déjà tiré sa conclusion compte tenu des éléments dont il disposait, a eu pour effet d'empê- cher toute objection de la part des Concerned Citizens, puisqu'ils n'ont fait valoir aucun motif d'objection devant le Comité.
À mon sens, l'argument doit donc être repoussé.
J'estime qu'il y a lieu de rejeter la demande fondée sur l'article 28 de la Loi sur la Cour fédérale et, à propos de l'appel, de certifier à la Commission canadienne des transports que, de l'avis de la Cour, l'ordonnance R-33625 du Comité des transports par chemin de fer est valide.
*
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE HEALD (dissident): Appel est formé, par suite d'une autorisation accordée par la Cour en vertu du paragraphe 64(2) de la Loi nationale sur les transports, contre l'ordonnance R-33625 rendue le 22 mars 1982 par le Comité des trans ports par chemin de fer (C.T.C.F.). La Cour a aussi ordonné la jonction dudit appel, une fois formé, et de la demande fondée sur l'article 28 de l'appelante (n° de greffe A-259-82), et la poursuite de ces deux procédures comme s'il s'agissait d'une seule procédure.
Voici les faits pertinents. Le 17 août 1981, la ville intimée a demandé à la Commission cana- dienne des transports de rendre une ordonnance autorisant la construction d'un passage provisoire au passage à niveau de la rue King Edward, dans la ville de Winnipeg, cette rue coupe l'avenue Vopni. Ledit passage à niveau traverse à la fois les voies ferrées du CP et du CN à cet endroit. Le 22 octobre 1981, la ville intimée a également sollicité une ordonnance autorisant la construction d'un croisement étagé au même endroit. Le but du
croisement étagé était de permettre la construction de deux ponts de chemin de fer enjambant un passage inférieur à quatre voies à cette intersec tion. Selon la ville intimée, ces travaux s'impo- saient pour alléger le grave problème d'embouteil- lage causé par l'accroissement du volume de circulation automobile et l'utilisation intense du passage à niveau par les deux compagnies de chemin de fer.
Le «Concerned Citizens of Vopni Avenue» (ci- après appelé le Comité des citoyens) a été formé pour examiner le projet de construction du passage inférieur et pour prendre les mesures nécessaires. La requérante, qui fait partie du Comité des citoyens, possède et occupe des biens-fonds et immeubles à l'angle de l'avenue Vopni et de la rue King Edward oit elle a, entre autres, une entreprise de recyclage de pièces d'automobile. Les autres membres du Comité des citoyens possèdent et exploitent des entreprises situées avenue Vopni, dans la région du passage à niveau provisoire et du croisement étagé projetés. Le 26 janvier 1982, le comité exécutif du Comité des citoyens a écrit au secrétaire du C.T.C.F. à Ottawa pour l'aviser que le Comité des citoyens s'opposait à ces projets. Il y est dit ceci:
Nous demandons la tenue d'une audience afin de pouvoir exposer nos objections.
Le 15 février 1982, le secrétaire du C.T.C.F. a écrit une lettre à la ville intimée pour l'informer des objections du Comité des citoyens. Cette lettre contenait une copie de la lettre écrite le 26 janvier 1982 par le Comité des citoyens et invitait la ville à faire des remarques sur l'opposition du Comité. Le 15 février 1982, le secrétaire du C.T.C.F. a également écrit au Comité des citoyens. Les par ties pertinentes de cette lettre sont ainsi rédigées (D.A. p. 122):
Vous n'avez pas exposé la nature de vos objections aux travaux de construction que la ville projette d'entreprendre, mais il ressort de la lettre de la ville en date du 2 février 1982 que vous vous êtes opposés au plan initial de la ville consistant à inter- rompre la communication directe entre la route 90 et l'extré- mité ouest de l'avenue Vopni, empêchant les véhicules d'y entrer ou d'en sortir directement à cet endroit.
Il est à noter que vous avez assisté à plusieurs réunions organi sées par la ville en 1980 et en 1981 pour discuter de ce problème, et vous avez effectivement assisté à une réunion tenue le 5 mars 1981 la ville a présenté une modification approuvée du projet: l'ajout d'une rampe d'accès du nord de la route 90à l'extrémité ouest de l'avenue Vopni.
Il semble donc que la ville ait apaisé votre appréhension au sujet de l'accès à l'avenue Vopni.
À moins d'autres objections importantes, il n'y a pas lieu de retarder ni de rejeter la requête de la ville relative aux travaux projetés.
Le 17 février 1982, le Comité des citoyens a répondu en ces termes au secrétaire du C.T.C.F. (D.A. p. 124):
Une audience serait de nature à nous permettre d'exposer nos objections relatives à la demande susmentionnée.
Nous vous demandons de fixer la date et l'heure d'une telle
audience, et nous nous arrangerons pour y assister.
Nous attendons avec impatience la tenue d'une telle audience.
Le 23 février 1982, le président de la Commission canadienne des transports a écrit comme suit au ministre des Transports du Canada (D.A. p. 125):
La ville de Winnipeg, de la province du Manitoba, a, par lettre en date du 22 octobre 1981, demandé l'autorisation de cons- truire deux passages inférieurs permettant à la rue King Edward de passer sous les voies ferrées du Canadien Pacifique Limitée au point milliaire 3.6 de la subdivision Carberry et de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada au point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point; elle a demandé en outre, en vertu de l'article 16 de la Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer, une subven- tion destinée à couvrir une partie des frais de construction. Vous trouverez sous pli les détails de la requête.
La ville s'est, dans sa requête, conformée à toutes les conditions de l'article 16 de la Loi 'sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer. Ayant examiné la requête et étant convaincue que la protection, la sécurité et la commodité du public exigent la construction du croisement étagé, la Com mission recommande maintenant qu'une subvention soit autori- sée en vue de couvrir une partie des frais des travaux.
Si une subvention était approuvée, le Comité des transports par chemin de fer rendrait Une ordonnance autorisant la construc tion des passages inférieûrs.
Le 4 mars 1982, le C.T.C.F. a envoyé une lettre à la fois à la ville intimée et au Comité des citoyens. Cette lettre est ainsi rédigée (D.A. p. 129):
Nous accusons réception de la lettre du 23 février 1982 de la ville de Winnipeg et de la lettre du 17 février 1982 de M. Gillman—porte-parole de «The Concerned Citizens of Vopni Avenue» relativement au projet susmentionné.
Il est à noter que M. Gillman n'a pas encore précisé la nature de son opposition à la proposition de la ville. Notre lettre du 15 février 1982 visait à obtenir des précisions sur toute autre objection importante qu'il pourrait avoir. Nous demandons encore une fois à M. Gillman d'exposer ses objections.
À la lettre de M. Gillman est jointe copie de la lettre de la ville du 23 février, et à celle-ci, copie de la lettre de M. Gillman du 17 février 1982.
Nous demandons aux deux parties de faire d'autres observations.
La ville intimée a, le 12 mars 1982, répondu à la lettre du 4 mars 1982. Il y est dit ceci (D.A. p. 133):
Étant donné que ladite lettre de M. Gillman n'ajoute rien de plus à ce qu'il a exposé dans sa première lettre du 26 janvier 1982 et à laquelle la ville a déjà répondu (voir la lettre que nous vous adressions le 23 février 1982), la ville n'a pas d'autres observations à faire pour l'instant à ce sujet.
Le Comité des citoyens n'a pas répondu. Le 22 mars 1982, le C.T.C.F. a rendu l'ordonnance con- testée en l'espèce.
La requérante fait valoir que le C.T.C.F. a agi sans compétence ou a outrepassé sa compétence parce qu'il n'a pas donné [TRADUCTION] «... à l'appelante la possibilité de se faire entendre, a) commettant ainsi envers l'appelante un déni de justice naturelle et b) violant son obligation d'agir équitablement». (Voir page 5, exposé des moyens de l'appelante.)
Si je comprends bien ses arguments, l'avocat de la requérante invoque un déni de justice naturelle et une violation de l'équité dans la procédure et ce, à un double point de vue. Son premier argument peut être ainsi résumé. La lettre du Comité des citoyens au C.T.C.F. en date du 26 janvier 1982 informait, d'une façon générale, le C.T.C.F. des objections du Comité des citoyens aux deux requê- tes de la ville intimée. La lettre du C.T.C.F. en date du 15 février 1982 équivalait à une invite au Comité de présenter toutes «autres objections importantes» aux requêtes de la ville. Le Comité, dans sa réponse du 17 février 1982, a demandé la tenue d'une audience il exposerait en détail ses préoccupations et objections. Par lettre du 4 mars 1982 au Comité des citoyens, le C.T.C.F. a demandé d'autres observations. Pendant que les observations du Comité des citoyens étaient en voie de rédaction par ses procureurs, et avant l'écoulement d'une période de temps raisonnable, le C.T.C.F. rendit l'ordonnance contestée datée du 22 mars 1982. Après un examen de la réalité concrète, on arrive à la conclusion suivante sur l'élément temporel: la demande d'observations ayant été envoyée d'Ottawa par le C.T.C.F. le 4 mars 1982, un jeudi, dans le cours normal du service postal, cette lettre n'aurait pas été reçue à Winnipeg avant le lundi 8 mars 1982. L'ordon- nance étant datée du 22 mars 1982, un lundi, ce court délai a eu pour résultat que la requérante et le Comité n'ont eu que dix jours ouvrables pour
faire rédiger leurs observations par leurs procu- reurs et les soumettre au C.T.C.F. à Ottawa. La requérante et le Comité des citoyens font valoir que le C.T.C.F., en décidant d'obtenir des observa tions, en les demandant et en rendant son ordon- nance sans leur avoir accordé une période raison- nable de temps pour déposer leurs observations et sans s'être appuyé sur celles-ci pour rendre sa décision, a violé l'obligation, qui incombait à la Commission, d'agir de bonne foi et d'entendre équitablement les deux parties.
La ville intimée répond que la requérante n'avait pas droit à une audition orale, et à l'appui de sa prétention, la ville a invoqué la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Hoff- man -La Roche Limited v. Delmar Chemical Limited 4 . Dans cette affaire, il s'agit d'une déci- sion du commissaire des brevets octroyant une licence autorisant l'intimée à employer, en liaison avec la production de certains médicaments, une invention brevetée de l'appelante. Le juge Mart - land, qui a rédigé le jugement de la Cour, dit qu'en l'absence de règlements régissant la pratique visée par l'article applicable de la loi, le commissaire avait le droit d'établir les procédures et n'était pas tenu de tenir une audition, de permettre des con- tre-interrogatoires sur les affidavits, ou de permet- tre un débat oral. Toutefois, malgré cette conclu sion, il est intéressant de souligner que le juge Martland, en examinant les faits de cette affaire, a fait remarquer que le commissaire avait demandé à l'intimée de signifier à l'appelante une copie de la demande et de l'affidavit, et qu'il avait donné à l'appelante [TRADUCTION] «... amplement la pos- sibilité de présenter ses moyens de défense par écrit, et l'appelante a effectivement soumis des observations écrites au Commissaire». [C'est moi qui souligne.]
Ainsi, les faits de l'affaire Hoffman -La Roche (susmentionnée) diffèrent considérablement de ceux en l'espèce. La requérante se plaint essentiel- lement de ce que, bien que le C.T.C.F. l'eût invitée à faire des observations écrites, elle ait eu, en pratique, l'équivalent de dix jours ouvrables pour les soumettre. Je souligne en passant que dans l'affaire Hoffman -La Roche (susmentionnée), le commissaire avait, au début, donné à l'appelante soixante jours pour présenter ses observations et,
4 [1965] R.C.S. 575, la p. 581.
plus tard, accordé un autre délai de deux mois.
Pour évaluer la validité du premier argument de la requérante, je crois qu'il est nécessaire d'exami- ner les dispositions législatives sur lesquelles repo- sent les requêtes en question. La C.C.T. et, par son entremise, le C.T.C.F. tiennent leur pouvoir de rendre les ordonnances contestées en l'espèce des dispositions de l'alinéa 46(1)a) de la Loi nationale sur les transports, S.R.C. 1970, chap. N-17, qui est ainsi rédigé:
46. (1) La Commission peut rendre des ordonnances ou établir des règlements
a) à l'égard de toute affaire, action ou chose que la Loi sur les chemins de fer ou la loi spéciale autorise, prescrit ou défend;
Les requêtes qu'examine la Cour en l'espèce sont clairement des «affaires» qu'«autorisent» les articles 196 198 inclusivement de la Loi sur les chemins de fer, S.R.C. 1970, chap. R-2. Ces articles sont ainsi conçus:
196. (1) Le chemin de fer de la compagnie peut, après qu'autorisation en a été préalablement obtenue de la Commis sion ainsi qu'il est prévu ci-après, mais non sans cette autorisa- tion, passer sur une voie publique existante et la longer ou la croiser; l'indemnité, s'il en est, payable par la compagnie aux propriétaires des immeubles qui avoisinent ou touchent le chemin de fer doit être établie sous le régime des articles de la présente loi qui se rapportent à l'arbitrage, dans la mesure pareils articles sont applicables, et la Commission ne doit autoriser aucune compagnie à mettre en opération un chemin de fer urbain ou tramway, ou un chemin de fer qui fait ou doit faire le service de chemin de fer urbain ou de tramway, sur le parcours d'une voie publique située dans les limites d'une cité ou d'une ville constituée en corporation, avant que consente- ment à cet effet n'ait d'abord été obtenu par la compagnie dans un règlement de l'autorité municipale de cette cité ou ville constituée en corporation; et lorsque autorisation a été obtenue de mettre en opération un chemin de fer sur le parcours d'une voie publique, la Commission, si elle le juge à propos, peut enjoindre à la compagnie d'indemniser la municipalité, cette indemnité devant être établie sous le régime des articles de la présente loi qui se rapportent à l'arbitrage, dans la mesure pareils articles sont applicables.
(2) La compagnie ne doit faire aucuns travaux de nature à obstruer une voie publique, sans la détourner de manière à ménager un bon passage pour les voitures, et sans remettre la voie publique, à l'achèvement des travaux, en aussi bon état qu'auparavant, autant qu'il est possible.
(3) Rien au présent article ne prive pareille compagnie de droits à elle conférés par une loi spéciale du Parlement du Canada, ou par les amendements à cette loi, dont l'adoption a eu lieu avant le 12 mars 1903.
197. (1) En demandant la permission de construire un chemin de fer sur une voie publique ou le long ou en travers
d'une voie publique, ou d'établir une voie publique le long ou en travers d'un chemin de fer, la requérante doit soumettre à la Commission un plan et un profil faisant voir la partie concernée du chemin de fer et de la voie publique.
(2) La Commission peut, par ordonnance, accorder cette demande en totalité ou en partie, et aux termes et conditions qu'elle juge convenables relativement à la protection, à la sûreté et à la commodité du public, ou elle peut ordonner de construire le chemin de fer au-dessus, au-dessous ou le long de la voie publique, ou d'établir la voie publique au-dessus, au-dessous ou le long du chemin de fer, ou de détourner le chemin de fer ou la voie publique provisoirement ou d'une manière permanente, ou d'exécuter tels autres ouvrages, d'employer tels gardiens ou telles autres personnes, ou de prendre telles mesures qui, dans les circonstances, au jugement de la Commission, serviront le mieux à faire disparaître ou à diminuer le danger ou l'obstruc- tion résultant à ses yeux, ou devant vraisemblablement résulter de ce qu'elle accorde en totalité ou en partie la demande faite, relativement au passage désiré ou à un passage existant.
(3) Lorsque la requête a pour objet la construction du chemin de fer sur une voie publique ou le long ou en travers d'une voie publique, toutes les dispositions de la loi alors applicables à l'appropriation des terrains par la compagnie, à l'estimation de leur valeur, à leur vente et cession à la compa- gnie, et à l'indemnisation du propriétaire, y compris l'indemnité devant être payée aux propriétaires des immeubles qui avoisi- nent ou touchent le chemin de fer ainsi que le prescrit l'article 196, s'appliquent au terrain, abstraction faite de la traversée de la voie publique, qui est nécessaire à l'exécution convenable d'une ordonnance rendue par la Commission.
(4) La Commission peut surveiller la construction de tout ouvrage dont elle ordonne l'exécution sous le régime du présent article, ou elle peut donner des instructions relatives à cette surveillance.
(5) Lorsque la Commission ordonne que le chemin de fer passe au-dessus ou au-dessous de la voie publique, ou que la voie publique passe au-dessus ou au-dessous du chemin de fer, ou que le chemin de fer ou la voie publique soit détourné provisoirement ou d'une manière permanente, ou que soient exécutés certains ouvrages sous le régime du présent article, elle peut exiger que des plans détaillés, des profils, dessins et devis descriptifs lui soient remis.
(6) La Commission peut établir des règles au sujet des plans, profils, dessins et devis descriptifs dont le présent article exige la production.
198. (1) Lorsqu'un chemin de fer est déjà construit sur une voie publique ou le long ou en travers d'une voie publique, la Commission peut, de son propre chef ou sur une plainte ou demande faite par ou pour le compte de la Couronne ou d'une municipalité ou autre corporation, ou d'une personne lésée, ordonner à la compagnie de lui soumettre, dans un délai déterminé, un plan et un profil de la partie du chemin de fer concernée, et elle peut faire faire une inspection de cette partie, et peut instruire une enquête sur toutes matières et choses se rapportant à cette partie du chemin et au passage, s'il en est, et déterminer ces matières et choses; et elle peut rendre l'ordon- nance qu'elle juge utile pour la protection, la sûreté et la commodité du public, ou ordonner que le chemin de fer passe au-dessus, au-dessous ou le long de la voie publique, ou que cette dernière passe au-dessus, au-dessous ou le long du chemin
de fer, ou que le chemin de fer ou la voie publique soit détourné provisoirement ou d'une manière permanente, et que tout autre ouvrage soit exécuté, que des gardiens ou autres personnes soient employés, ou qu'il soit pris certaines mesures qui, dans les circonstances et au jugement de la Commission, serviront le mieux à faire disparaître ou à diminuer le danger ou l'obstruc- tion qui, à ses yeux, se produit ou vraisemblablement se pro- duira sur cette partie du chemin de fer ou à ce passage, s'il en est, ou à tout autre passage directement ou indirectement concerné.
(2) Lorsque la Commission, de son propre chef ou sur une plainte ou une demande, ordonne qu'un chemin de fer traverse ou suive une voie publique, ou qu'il soit détourné, toutes les dispositions de la loi alors applicables à la prise de possession de terrains par la compagnie, à l'estimation de leur valeur, à leur vente et cession à la compagnie, et à l'indemnisation du proprié- taire, s'appliquent au terrain, abstraction faite de la traversée de la voie publique, qui est nécessaire à l'exécution convenable d'une ordonnance rendue par la Commission.
(3) La Commission peut surveiller la construction de tout ouvrage qu'elle a ordonné d'exécuter sous l'autorité du présent article, ou peut donner des instructions relatives à cette surveillance.
La procédure que doivent suivre la C.C.T. et le C.T.C.F. est prévue dans les Règles générales de la Commission canadienne des transports (chap. 1142 de la Codification des règlements du Canada de 1978). En vertu de la Règle 21, la Commission peut donner «... un avis public ou tel autre avis qui lui semble raisonnable dans les circonstances de toute requête qui lui est faite ...0 En l'espèce, le dossier ne révèle nullement qu'un avis public ait été donné. Toutefois, la requérante à l'instance a, en temps utile, effectivement entendu parler des requêtes en question et a porté à la connaissance de la Commission son intérêt dans les ordonnances sollicitées et ses objections à celles-ci. L'avocat de la ville intimée fait valoir que la requérante à l'instance avait la qualité d'un intervenant, que la Commission a, conformément aux Règles généra- les, invité la requérante à soumettre des observa tions, et que puisque celle-ci tardait à donner suite à cette requête, la Commission était en droit de rendre les ordonnances sans attendre davantage une réponse de la requérante. Je conviens que la requérante ne s'est pas conformée aux Règles générales concernant l'intervention. Il s'agit des Règles numéros 29 32 inclusivement, lesquelles sont ainsi rédigées:
29. Toute personne intéressée à une requête à laquelle elle n'est pas partie peut cependant intervenir en vue d'appuyer cette requête, de s'y opposer ou de la faire modifier.
30. Tout intervenant doit expédier par la poste ou remettre au secrétaire une déclaration écrite dans laquelle il expose ses
intérêts et donne son approbation de la requête, ou son opposi tion à celle-ci, ou encore des modifications qu'il désire y voir apporter; il doit y joindre tout document susceptible d'aider à la compréhension de l'intervention ou de l'appuyer et faire tenir copie de son intervention et des documents au requérant et aux intimés, s'il y en a, ou à leurs procureurs respectifs et à toutes autres personnes que peut indiquer la Commission.
31. L'intervention doit être divisée en alinéas numérotés consécutivement; elle devra être signée par la personne qui la fait ou par son procureur; elle devra porter sous forme d'anno- tation le nom et l'adresse de l'intervenant ou de son procureur ainsi qu'un avis relatif à la signification d'une réplique rédigée suivant la formule d'annotation donnée à l'annexe II.
32. Une intervention ne sera pas déposée, sans l'autorisation de la Commission, après l'expiration d'un délai de 30 jours à partir de la date de la première publication de l'avis de la requête ou de tout autre délai stipulé dans l'avis.
Je fais toutefois remarquer que la Règle générale 49 autorise la Commission à ne pas suivre, totale- ment ou en partie, les formes de procédure men- tionnées dans les Règles. Cette Règle est ainsi conçue:
49. Dans toute procédure, la Commission peut dispenser totalement ou en partie, de la forme de procédure mentionnée dans les présentes.
Il est vrai que la première invitation du C.T.C.F. à faire des observations date du 15 février 1982, et qu'il ressort d'une lettre du 17 février 1982 qu'on n'a pas donné suite à cette requête, la requé- rante et le Comité des citoyens essayant toujours d'obtenir une audition. Toutefois, lorsque le C.T.C.F. a écrit sa lettre du 4 mars 1982 pour insister encore sur la soumission d'autres observa tions, cela constitue, à mon avis, une prorogation de délai accordée à la requérante pour qu'elle fasse d'autres observations 5 . Ce qui s'était passé avant cette prorogation n'est pas particulièrement perti nent, à mon avis, pour déterminer si le Comité, en rendant sa décision dix jours ouvrables après l'oc- troi de cette prorogation, a agi de façon appropriée et dans l'exercice de sa compétence. La requérante n'est qu'une entreprise parmi tant d'autres qui exploitaient des entreprises aux environs de l'inter- section en question et dont les affaires seraient probablement touchées par la construction proje- tée. Elles agissaient par l'entremise de procureurs dans l'opposition à ces requêtes. Une période de
5 La Règle 32 portant sur le délai de dépôt d'une intervention ne peut s'appliquer aux faits de l'espèce, puisque rien dans le dossier ne donne la preuve d'une publication de l'avis de requête.
temps de dix jours ouvrables ne suffit pas pour recevoir des instructions et préparer et transmettre des observations au C.T.C.F. A mon humble avis, il s'agit d'une période de temps déraisonnablement courte étant donné les faits de l'espèce 6 . Dans l'affaire Russell v. Duke of Norfolk and others 7 , lord Tucker dit ceci:
[TRADUCTION] À mon sens, il n'existe pas de texte qui puisse s'appliquer, de façon générale, à tout genre d'enquête et à toutes les sortes de tribunaux existant au pays. Les exigences de justice naturelle dépendent des faits de l'affaire, de la nature de l'enquête, des règles en vertu desquelles le tribunal agit, de la question à trancher et ainsi de suite. En conséquence, je ne trouve pas d'un grand secours les définitions de justice naturelle auxquelles on a eu recours de temps à autre; mais, quelle que soit la norme adoptée, l'essentiel est que la personne intéressée ait une possibilité raisonnable de présenter ses arguments.
Le second moyen invoqué par l'avocat de la requé- rante selon lequel le C.T.C.F. a violé les règles de justice naturelle et l'équité dans la procédure se rapporte à la lettre écrite par le président de la C.C.T. au ministre des Transports le 23 février 1982. A la fin de cette lettre, au-dessous de la signature de M. Benson figurent plusieurs para- phes accompagnés de la date «17/2/82». A l'audi- tion tenue devant la Cour, les avocats s'accordent pour dire que deux des paraphes étaient ceux de John Magee et de B. R. Wolfe, les deux membres du Comité des transports par chemin de fer qui ont pris les décisions dont appel. Il semble donc clair que bien avant la lettre du 4 mars 1982 invitant la requérante à faire des observations, les commissai- res auteurs des ordonnances du 22 mars 1982 avaient pris connaissance de la lettre écrite par M. Benson le 23 février 1982 il disait notamment:
Si une subvention était approuvée, le Comité des transports par chemin de fer rendrait une ordonnance autorisant la construc tion des passages inférieurs. [C'est moi qui souligne.]
Par conséquent, ils étaient conscients que le prési- dent de la Commission s'était engagé à ce que, pourvu que la subvention dans le cadre du Pro gramme d'aide au transport urbain du gouverne- ment du Canada fût disponible, le C.T.C.F. rende les ordonnances qu'il a effectivement rendues le 22
6 Bien que, ainsi qu'il est exposé ci-dessus, la Règle 32 ne s'applique pas aux faits de l'espèce, il convient de souligner qu'au cas elle s'appliquerait, un délai de 30 jours est accordé pour le dépôt d'une intervention. A mon avis, il est également révélateur que la Règle 22 accorde, dans les circonstances normales, un délai de 30 jours aux parties ayant un intérêt contraire pour répondre à un avis de requête.
7 [1949] I All E.R. 109 (C.A.), à la p. 118.
mars 1982. Il est significatif, à mon avis, que le ministre des Transports ait avisé, le 12 mars 1982, le président de la C.C.T. de ce qui suit:
[TRADUCTION] Je conviens par la présente que ce projet qui est inclus dans la liste 1981/82 UTAP du Manitoba a l'agrément du gouvernement fédéral. Le transfert de fonds fédéraux pour couvrir une partie des frais du projet ne saurait être effectué avant la signature des accords de contribution au projet entre la requérante et le gouvernement fédéral. La C.C.T. est donc invitée à rendre une ordonnance de construction pour ce projet.
La condition préalable mentionnée par le président de la C.C.T. avait donc été remplie le 12 mars 1982. Puis, le 22 mars 1982, les ordonnances contestées sont rendues par les deux commissaires du C.T.C.F. qui connaissaient l'engagement pris par le président.
Le critère exposé dans les motifs qu'a prononcés le juge en chef Laskin, qui rendait le jugement majoritaire de la Cour suprême du Canada dans l'affaire The Committee for Justice and Liberty, et autres c. L'Office national de l'énergie, et autres$, s'applique aux faits de l'espèce. Dans cette affaire, le juge en chef a dit que lorsqu'il est important de ne pas avoir de préjugé ni d'opinion préconçue sur les questions en litige à l'égard de la décision en question, et que lorsque la participation d'un particulier à cette décision «... ne peut .. que donner naissance, chez des personnes assez bien renseignées, à une crainte raisonnable de partialité dans l'appréciation des questions à tran- cher ...», une telle situation répond au critère de crainte raisonnable de partialité. Le juge en chef dit en outre à la page 391 du recueil: «Ce critère se fonde sur la préoccupation constante qu'il ne faut pas que le public puisse douter de l'impartialité des organismes ayant un pouvoir décisionnel, et je considère que cette préoccupation doit se retrouver en l'espèce puisque l'Office national de l'énergie est tenu de prendre en considération l'intérêt du public 9 .»
Appliquant ce critère aux faits de l'espèce, je conclus que des personnes assez bien renseignées pouvaient avoir une crainte raisonnable de partia- lité, compte tenu de l'échange de correspondance entre le président de la C.C.T. et le ministre des
8 [1978] 1 R.C.S. 369, la p. 391.
9 Je souligne en passant que dans l'espèce aussi, la Commis sion est tenue, en vertu des dispositions pertinentes, de tenir compte de «, .. la protection, la sécurité et la commodité du public ...» Voir paragraphes 197(2) et 198(1).
Transports le 23 février 1982 et le 12 mars 1982, et de l'état de connaissance de cette situation de la part des deux commissaires du C.T.C.F. auteurs de l'ordonnance dont appel en l'espèce. L'espèce présente ressemble à l'affaire Committee for Jus tice (susmentionnée) en ce qu'en l'espèce, comme dans cette affaire, rien n'indique un gain ou une perte possibles de la part des commissaires qui ont pris la décision. Il s'agirait probablement d'un cas de partialité réelle, et aucune allusion de ce genre n'a été faite en l'espèce. Toutefois, comme l'a souligné le juge en chef Laskin à la page 387 de ses motifs, il n'est nullement question de partialité réelle.
J'aborde maintenant la question de savoir si le raisonnement de la majorité dans l'affaire Com mittee for Justice (susmentionnée) s'applique aux faits de l'espèce, puisque dans cette affaire, on a posé un principe que l'Office national de l'énergie statuant sur une demande fondée sur l'article 44 de la Loi sur l'Office national de l'énergie [S.R.C. 1970, chap. N-6] jouait un rôle quasi judiciaire ou, du moins, un rôle qui doit être exercé conformé- ment aux règles de justice naturelle, à un degré suffisant pour être tenu de manifester l'intégrité de sa procédure et de son impartialité 10 .
Me fondant sur les critères énoncés par le juge Dickson dans l'affaire Le ministre du Revenu national c. Coopers and Lybrand", j'estime que le C.T.C.F. avait à tout le moins un rôle qui exigeait l'observation des règles de justice naturelle, à un degré suffisant pour être tenu de manifester l'inté- grité de sa procédure et son impartialité. Bien que la loi n'exige pas d'audition, elle prévoit des avis publics et des avis à donner aux parties ayant un intérêt contraire. Les Règles de la Commission prévoient en détail la procédure relative au dépôt de réponses de la part de parties ayant un intérêt contraire et au dépôt d'interventions de la part de «Toute personne intéressée à une requête à laquelle elle n'est pas partie...» La décision ou l'ordon- nance du C.T.C.F. touche aussi, directement ou indirectement, les droits et obligations de person- nes. Les intérêts du CN et du CP sont directement affectés. Les personnes telles que la requérante et
10 Le critère précédent est extrait des commentaires faits par
le juge en chef Laskin à la page 385 du jugement.
" [1979] 1 R.C.S. 495, la p. 504 et aux pp. 506 et 507.
le Comité des citoyens, qui exploitent des entrepri- ses situées dans le proche voisinage, sont égale- ment touchées, l'accès à leurs établissements allant être considérablement modifié. Les personnes utili- sant l'actuel passage à niveau et les clients des entreprises situées dans la région seront aussi tou- chés. A mon avis, on peut dire qu'il s'agit de procédure contradictoire, puisque les «règle[s] de procédure judiciaire» sont imposées par les Règles générales de la Commission.
La Règle 51 autorise la Commission à suspendre la procédure dans l'affaire dont elle a été saisie lorsque, de l'avis de la Commission, il conviendrait de trancher une question préliminaire de droit. En vertu de la Règle 53, la Commission peut ordonner la tenue d'une «conférence avant l'audience» qui ressemble beaucoup aux conférences préalables à l'instruction que prévoient les règles de la plupart des cours supérieures. La Règle 54 prévoit la production et l'examen de documents, alors que les Règles 55 et 56, des avis de production et des avis de reconnaissance de documents. La Commission tient de la Règle 57 le pouvoir de citer des témoins à comparaître. Les Règles 58 65 inclusivement exposent les procédures d'audience dans les cas la Commission a ordonné la tenue d'une audience. À cause de la procédure détaillée établie en vertu des Règles, j'estime que ces Règles sont des règles de fond qui doivent être observées dans les cas individuels portés devant la Commission.
Il me semble que lorsqu'on considère le délai relativement court qui a été donné à la requérante pour rédiger et déposer ses observations dans le contexte de la connaissance, de la part des com- missaires qui ont pris la décision, de la situation existant entre la C.C.T., le ministère des Trans ports et la ville de Winnipeg, savoir que, la subven- tion ayant été approuvée, le seul obstacle restant à la mise en chantier du projet était l'approbation du C.T.C.F., les actions du C.T.C.F., en rendant sa décision sans attendre les observations de la requé- rante, constituent une violation même plus grave des règles de justice naturelle et d'équité dans la procédure. Si le facteur temps était si important compte tenu de toutes les circonstances entourant les requêtes, je pense qu'il aurait été raisonnable pour le C.T.C.F. d'informer la requérante, avant de rendre la décision, que celle-ci allait être rendue à une certaine date et que si la requérante désirait
soumettre ses observations à l'examen du C.T.C.F. avant la prise de la décision, elle devrait les envoyer sur-le-champ. Mais on ne l'a pas fait.
Pour les motifs invoqués ci-dessus, j'estime donc qu'il y a lieu d'accueillir l'appel et de certifier à la Commission canadienne des transports que, de l'avis de la Cour, l'ordonnance R-33625 du Comité des transports par chemin de fer est nulle. En vertu de l'article 29 de la Loi sur la Cour fédérale, je rejetterais la demande fondée sur l'ar- ticle 28 de cette Loi.
* * *
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE SUPPLÉANT LALANDE: J'ai pris con- naissance des motifs de jugement rédigés par le juge Heald, mais je ne suis pas d'accord avec sa conclusion.
L'ordonnance dont appel a fait droit à une requête, introduite par la ville de Winnipeg, pour la construction d'un passage inférieur au passage à niveau la rue King Edward croise les voies ferrées du CN et du CP. L'entreprise et les biens- fonds de l'appelante sont situés aux intersections de la rue King Edward, de l'avenue Vopni et de la route 90, tout juste au nord du passage, et seraient, à l'évidence, touchés par l'abaissement de la rue King Edward sous les ponts de chemin de fer projetés enjambant la route élargie. Ces travaux font partie d'un projet d'amélioration de rues com- mençant à un point situé au sud des voies ferrées et s'étendant vers le nord sur une distance de deux milles.
En vertu du paragraphe 197(2) de la Loi sur les chemins de fer (S.R.C. 1970, chap. R-2), la Com mission canadienne des transports pouvait accueil- lir la requête «... aux termes et conditions qu'elle juge[ait] convenables relativement à la protection, à la sûreté et à la commodité du public ...»
Pour couvrir une partie importante des frais de construction de ce croisement étagé, la province du Manitoba, au nom de la ville, a demandé à la Commission d'accorder une subvention spéciale en vertu de la Loi sur le déplacement des lignes et sur les croisements de chemin de fer [S.C. 1974, chap. 12]. La subvention devait être autorisée par le ministre des Transports, et en vertu du paragraphe
16(2), la Commission pouvait recommander l'oc- troi de la subvention spéciale au Ministre «... si elle [était] convaincue que la protection, la sécu- rité et la commodité du public exige[aient] la construction ... de ce passage étagé, ou que cette construction ... accroîtra[it] sensiblement la pro tection, la sécurité et la commodité du public ...»
Dans le cadre de ces pouvoirs, je ne vois pas comment la Commission peut statuer sur toute question qui n'est pas susceptible de se rattacher à la protection, à la sécurité et à la commodité du public qui utilise le passage. Si les intérêts particu- liers de l'appelante sont touchés par l'abaissement du niveau de la rue King Edward, c'est une affaire entre elle et la ville, et cela ne relève pas de la compétence de la Commission.
À compter de novembre 1980, la ville a donné largement à l'appelante et aux autres intéressés la possibilité de faire connaître leurs points de vue et de formuler leur opposition au projet. Le 2 février 1982, la ville a fait rapport de tout ceci à la Commission dans la lettre suivante:
[TRADUCTION] Messieurs,
OBJET: Avis donné par la ville de Winnipeg de la prévision et de la gestion du projet d'investissement de 1981— «Route 90—Avenue Pacific à... Boulevard Inkster», et audition des réactions s'y rapportant.
Entre le 21 et le 25 novembre de 1980, la ville de Winnipeg a fait donner un avis écrit du projet ci-dessus (voir copie ci-jointe) à toutes les entreprises (entre autres) situées avenue Vopni, entre la rue King Edward (communément connue sous le nom de route 90) et la rue Keewatin, dans la ville de Winnipeg, et ce, conformément à la politique du Conseil de la ville de Winnipeg à l'égard de ces questions.
Par la suite, A. Gillman, qui, d'après le dossier, était le porte-parole principal de l'association qu'il a appelée «the Con cerned Citizens of Vopni Avenue» et qui, d'après lui, comprend la plupart, sinon la totalité, des entreprises situées avenue Vopni, a, le 9 décembre 1980, comparu à la fois devant le comité de la collectivité St. James-Assiniboia et devant celui de la collectivité Lord Selkirk-West Kildonan. Sans doute par suite de l'avis donné et des observations faites par Gillman lors de sa comparution devant lesdits comités, ce porte-parole a ensuite comparu devant le comité des travaux et opérations le 15 décembre 1980 et, au nom de l'association susmentionnée, a présenté un résumé portant principalement sur l'interruption projetée de la communication directe entre la route 90 et l'extrémité ouest de l'avenue Vopni, empêchant les véhicules d'y entrer ou d'en sortir directement à cet endroit, interruption découlant de la construction du croisement étagé de la route 90 et des voies ferrées du CN (subdivision Oakpoint) et du CP (subdivision Carberry), lequel croisement étagé est inclus dans le projet sous la forme alors recommandée. En réponse aux
instructions données par le comité des travaux et opérations, la ville a rédigé un rapport portant sur des solutions de rechange qui ont été présentées au comité des travaux et opérations le 26 janvier 1981, la réunion duquel A. Gillman a assisté. Aucune décision n'a été alors prise à l'égard de la question. Le 9 février 1981. Gillman a comparu devant le comité des travaux et opérations et a présenté la position des Concerned Citizens de l'avenue Vopni concernant les solutions de rechange définies et discutées dans le rapport établi par la ville au sujet de la communication directe entre la route 90 et l'extrémité ouest de l'avenue Vopni.
Le 9 février 1981, le comité des travaux et opérations a décidé de recommander l'adjonction à ce projet d'une rampe d'accès reliant le côté nord de la route 90 et l'extrémité ouest de l'avenue Vopni, ce qui a, par la suite, été approuvé par le Conseil de la ville de Winnipeg le 18 février 1981.
Le 27 février 1981, la ville de Winnipeg, projetant une réunion pour discuter des travaux de construction, phase 1 du projet, soit la partie du projet de construction au nord du croisement étagé et physiquement distincte de celui-ci, a fait donner un avis écrit (voir copie jointe) à, entre autres, toutes les entrepri- ses situées avenue Vopni.
Puisque j'ai assisté à la réunion tenue le 5 mars 1981 au Brooklyn Recreational Centre, je peux, par les présentes, attes- ter la présence de A. Gillman à ladite réunion.
Finalement, la ville de Winnipeg a fait donner, entre le 31 mars et le 3 avril 1981, un avis écrit (voir copie ci-jointe), de commencement de construction de la phase 1 dudit projet, à, entre autres, toutes les entreprises situées avenue Vopni.
Je crois que les renseignements précédents constituent un énoncé suffisamment complet des mesures prises par la ville de Winnipeg pour informer le public des incidences réelles et éventuelles de ce projet d'amélioration de rues et pour donner aux intéressés la possibilité de faire connaître leurs réactions à ce sujet, particulièrement ceux qui sont le plus directement et considérablement touchés, bien avant que toute décision finale n'ait été prise par le comité permanent et par le Conseil de la ville de Winnipeg.
Je vous prie d'agréer, Messieurs, l'expression de mes sentiments distingués.
La lettre du 26 janvier 1982, qui demande une audience pour «exposer nos objections», constitue la première fois que le comité exécutif de The Concerned Citizens of Vopni Avenue (ci-après appelé le «Comité») dont A. Gillman, qui repré- sente l'appelante, était membre communiquait avec la Commission. Cette lettre est ainsi rédigée:
Messieurs,
Objets: (1) Demande relative à la construction d'un passage à niveau provisoire, rue King Edward, franchissant les voies ferrées du CP près du point milliaire 3.6 de la subdivision Carberry et celles du CN près du point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point;
(2) Demande relative au projet de construction d'un croisement étagé à l'endroit ci-dessus.
Vos dossiers n 0 ' 27365.27 et 27367.1601
Sachez que nous représentons des habitants et des hommes d'affaires de la région des travaux projetés susmentionnés.
Soyez informés en outre que nous nous opposons à ce projet.
Nous demandons la tenue d'une audience afin de pouvoir exposer nos objections.
Nous attendons avec impatience la tenue de cette audience et vous demandons de nous aviser de l'heure et de la date de celle-ci.
Nous vous prions d'agréer, Messieurs, l'expression de nos senti ments distingués.
Le 15 février 1982, la Commission a écrit à Gillman et lui a envoyé la lettre écrite par la ville le 2 février 1982 et citée ci-dessus. La lettre de la Commission est ainsi conçue:
Messieurs,
Objets: (1) Demande relative à la construction d'un passage à niveau provisoire, rue King Edward, au point mil- liaire 3.6 de la subd. Carberry et au point milliaire 5.74 de la subd. Oak Point.
(2) Demande relative à la construction d'un passage à
niveau provisoire à l'endroit ci-dessus.
Nous accusons réception de votre lettre du 26 janvier 1982 et nous vous envoyons sous pli copie de la lettre du 2 février 1982 de la ville de Winnipeg concernant la question citée sous rubrique.
Vous n'avez pas exposé la nature de vos objections aux travaux de construction que la ville projette d'entreprendre, mais il ressort de la lettre de la ville en date du 2 février 1982 que vous vous êtes opposés au plan initial de la ville consistant à inter- rompre la communication directe entre la route 90 et l'extré- mité ouest de l'avenue Vopni, empêchant les véhicules d'y entrer ou d'en sortir directement à cet endroit.
Il est à noter que vous avez assisté à plusieurs réunions organi sées par la ville en 1980 et en 1981 pour discuter de ce problème, et vous avez effectivement assisté à une réunion tenue le 5 mars 1981 la ville a présenté une modification approuvée du projet: l'ajout d'une rampe d'accès du nord de la route 90 l'extrémité ouest de l'avenue Vopni.
Il semble donc que la ville ait apaisé votre appréhension au sujet de l'accès à l'avenue Vopni.
À moins d'autres objections importantes, il n'y a pas lieu de retarder ni de rejeter la requête de la ville relative aux travaux projetés.
Nous vous prions d'agréer, Messieurs, l'expression de nos senti ments respectueux.
Dans cette lettre, rien n'indique la possibilité d'une audience.
Le 17 février 1982, le Comité a répondu à la Commission en ces termes:
Monsieur O'Hara,
Objets: (1) Demande relative à la construction d'un passage à niveau provisoire, rue King Edward, franchissant les voies ferrées du CP près du point milliaire 3.6 de la subdivision Carberry et celles du CN près du point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point;
(2) Demande relative au projet de construction d'un
croisement étagé à l'endroit ci-dessus.
Vos dossiers n°s 27365.27 et 27367.1601
Nous accusons réception de votre lettre du 15 février 1982. Nous venons tout juste de la recevoir et nous avons pris note de sa teneur.
Une audience serait de nature à nous permettre d'exposer nos objections relatives à la demande susmentionnée.
Nous vous demandons de fixer la date et l'heure d'une telle audience, et nous nous arrangerons pour y assister.
Nous attendons avec impatience la tenue d'une telle audience.
Nous vous prions d'agréer, Monsieur, l'expression de nos senti ments distingués.
Le 23 février 1982, la ville a répondu à la Commission de la façon suivante:
Messieurs,
OBJET: Projet de construction d'un croisement étagé, rue King Edward (route 90)—voies ferrées du CN au point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point et du CP au point milliaire 3.6 de la subdivision Carber- ry—Votre dossier 27365.27
Nous accusons réception de votre lettre du 15 février 1982 invitant la ville à faire des remarques sur la lettre que M. A. Gillman, au nom de «The Concerned Citizens of Vopni Avenue», a envoyée au Comité des transports par chemin de fer le 26 janvier 1982.
Étant donné que M. Gillman, dans sa lettre du 26 janvier 1982, n'a pas donné de détails sur les raisons pour lesquelles «The Concerned Citizens of Vopni Avenue» s'est opposé au projet de construction d'un croisement étagé, la ville doit présumer que les préoccupations de «The Concerned Citizens of Vopni Avenue» sont celles qui ont déjà été exposées par M. Gillman devant le comité des travaux et opérations et devant d'autres comités du Conseil de la ville de Winnipeg.
Comme vous le savez, ces préoccupations ont déjà été étudiées à fond par lesdits comités et par le Conseil de la ville de Winnipeg, ainsi qu'il ressort d'une lettre que M. L.R. Camp- bell, le gestionnaire la ville responsable de la voirie et de la circulation, a écrite le 2 février 1982 à M. G.P. Beach, chef, passages à niveau et programmes de construction, de votre bureau de Winnipeg.
Nous vous prions de nous faire savoir si votre Comité a besoin d'autres renseignements concernant cette question.
Nous vous prions d'agréer, Messieurs, l'expression de nos senti ments respectueux.
Le 4 mars 1982, la Commission a écrit une lettre adressée à la fois à la ville et au Comité. Cette lettre est ainsi rédigée:
[TRADUCTION] Messieurs,
Objets: Demande relative à la construction d'un passage à niveau provisoire, rue King Edward, au point mil- liaire 3.6 de la subdivision Carberry et au point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point.
Demande relative au projet de construction d'un croisement étagé à l'endroit ci-dessus
Nous accusons réception de la lettre du 23 février 1982 de la ville de Winnipeg et de la lettre du 17 février 1982 de M. Gillman—porte-parole de «The Concerned Citizens of Vopni Avenue» relativement au projet susmentionné.
Il est à noter que M. Gillman n'a pas encore précisé la nature de son opposition à la proposition de la ville. Notre lettre du 15 février 1982 visait à obtenir des précisions sur toute autre objection importante qu'il pourrait avoir. Nous demandons encore une fois à M. Gillman d'exposer ses objections.
À la lettre de M. Gillman est jointe copie de la lettre de la ville du 23 février, et à celle-ci, copie de la lettre de M. Gillman du 17 février 1982.
Nous demandons aux deux parties de faire d'autres observations.
Nous vous prions d'agréer, Messieurs, l'expression de nos sentiments distingués.
p.j. 2
c.c.: Vous trouverez ci-joint,
M. J.H. Galvin pour votre information,
Directeur copie de chacune des lettres
Déplacement des voies ferrées et susmentionnées de
croisements ferroviaires la ville et de Gillman.
Transports Canada
Étage 28, Tour «C»
Place de Ville
Ottawa (Ontario)
K1A ON5
M. S.S. Yoshino, P. Ing.
Directeur des services de transportations,
de recherches et d'exploitation
Ville de Winnipeg
M. W.P. Kearns Directeur régional C.T.C.F., C.C.T. Winnipeg (Manitoba)
Il est à noter que par les pièces jointes, on a fait prendre conscience au Comité que la ville présu- mait que les préoccupations du Comité étaient celles exprimées par Gillman et que les comités de la ville et le Conseil les avaient étudiées à fond.
Pour mettre fin à cette correspondance anté- rieure à l'ordonnance du 22 mars 1982, la ville a écrit la lettre suivante à la Commission le 12 mars 1982:
Messieurs,
OBJET: Projet de construction d'un croisement étagé, rue
King Edward (route 90)—voies ferrées du CN, au point milliaire 5.74 de la subdivision Oak Point, et du CP au point milliaire 3.6 de la subdivision Carberry
Nous accusons réception de votre lettre du 4 mars 1982 conte- nant une copie de la lettre de M. Gillman datée du 17 février 1982 et invitant la ville à faire des observations sur celle-ci.
Étant donné que ladite lettre de M. Gillman n'ajoute rien de plus à ce qu'il a exposé dans sa première lettre du 26 janvier 1982 et à laquelle la ville a déjà répondu (voir la lettre que nous vous adressions le 23 février 1982), la ville n'a pas d'autres observations à faire pour l'instant à ce sujet.
Il est extrêmement urgent pour la ville que le Comité des transports par chemin de fer approuve la construction de ce croisement étagé et, de nouveau, la ville prie respectueusement votre Comité d'instruire la présente requête d'une façon aussi expéditive que possible.
Nous vous prions de croire à nos sentiments distingués.
L'invitation à faire des observations, faite par la Commission le 4 mars, constituait une répétition ou un rappel de son invitation antérieure du 15 février, ce qui fait qu'en examinant s'il y a équité dans la procédure, on doit tenir compte de 17 jours de plus.
Je tiens pour reconnu que le Comité n'avait pas droit à une audition devant la Commission. Il n'a pas cherché à intervenir et, à mon avis, n'était pas une partie dont les intérêts étaient opposés à ceux de la ville dans un sens technique.
Il ne ressort nullement du dossier que le Comité ait demandé à des procureurs de rédiger des obser vations. La correspondance me donne l'impression que le Comité a décidé de refuser de répondre et d'insister sur sa demande d'audience.
Étant donné les possibilités que le Comité avait de soumettre à la Commission des observations contre le projet de construction de passage infé- rieur de la ville, il m'est impossible de conclure que l'appelante a été victime d'une violation de l'obli- gation d'équité que la Commission aurait pu avoir envers elle à ce sujet.
Depuis la rédaction de ce qui précède, j'ai reçu les motifs rédigés par le juge en chef. Je suis d'accord avec lui.
Pour ce qui est de l'autre point soulevé par la lettre du 23 février 1982 écrite par le président de la Commission au ministre des Transports, je n'ai rien à ajouter à ce qui a été dit par le juge en chef. Sauf révérence, je trouve que l'argument n'est pas fondé.
J'estime qu'il y a lieu de trancher les questions dont la Cour est saisie de la façon proposée par le juge en chef.
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