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T-8162-82
Le directeur des enquêtes et recherches nommé en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coali tions (requérant)
c.
La Commission sur les pratiques restrictives du commerce et O. Gerald Stoner (intimés)
Division de première instance, juge Cattanach— Ottawa, 21 et 22 octobre 1982.
Contrôle judiciaire Brefs de prérogative Mandamus Enquête sur les coalitions Demande présentée par le directeur des enquêtes et recherches nommé en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, en vue d'obtenir une ordonnance de mandamus enjoignant à la Commission sur les pratiques restrictives du commerce de notifier des citations à comparaître aux présidents des compagnies désignées Ayant examiné l'ensemble de la Loi, la Division de première instance a décidé que le directeur est responsable de la con- duite d'une enquête, notamment de l'audition tenue devant la Commission et de la production d'éléments de preuve 11 est du devoir de la Commission d'entendre et d'examiner les éléments de preuve que le directeur juge pertinents et essentiels à l'enquête Le refus de la Commission de notifier des citations à comparaître en vue d'obtenir les éléments de preuve que le directeur désire examiner équivaut à un refus d'exercer sa compétence La notification d'une citation à comparaître est analogue à celle qui est faite par les cours de justice et constitue un acte administratif Mandamus visant à obtenir l'exécution d'une obligation accordé Demande accueillie Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, S.R.C. 1970, chap. C-23, art. 8, 14, 18, 21, 27.1, 47, 48 Loi sur les enquêtes, S.R.C. 1970, chap. 1-13, art. 4, 5.
AVOCATS:
G. Henderson, c.r. et G. Kaiser pour le requérant.
B. C. McDonald et J. M. Belanger pour les intimés.
C. L. Campbell, c.r. et M. E. Barrack pour Gulf Canada et J. L. Stoik.
J. L. McDougall, c.r., pour B.P. Canada Inc. et R. W. D. Hanbidge.
A. M. Austin pour Shell Canada et C. W. Daniel.
PROCUREURS:
Gowling & Henderson, Ottawa, pour le requérant.
Lang, Michener, Cranston, Farquharson & Wright, Toronto, pour les intimés.
McCarthy & McCarthy, Toronto, pour Gulf Canada et J. L. Stoik.
Fraser & Beatty, Toronto, pour B.P. Canada Inc. et R. W. D. Hanbidge.
Weir & Foulds, Toronto, pour Shell Canada et C. W. Daniel.
Ce qui suit est la version française des motifs du jugement rendus par
LE JUGE CATTANACH: Le directeur des enquê- tes et recherches nommé en vertu de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, S.R.C. 1970, chap. C-23, (ci-après appelé le «directeur>) a demandé à la présente Cour une ordonnance de mandamus enjoignant à la Commission sur les pratiques restrictives du commerce et à son prési- dent de notifier des citations à comparaître aux présidents des sociétés pétrolières désignés dans l'avis de requête.
Le mandamus est un bref de prérogative auquel un requérant peut avoir recours contre un orga- nisme public qui fait défaut de remplir, au profit du requérant, une obligation légale ou autre qui lui est imposée.
Un bref de mandamus ne peut être délivré contre un organisme que lorsqu'une obligation lui est imposée et qu'il ne lui appartient pas de décider s'il doit la remplir ou non.
Le requérant doit en outre démontrer qu'il a le droit d'exiger de la partie visée par le mandamus l'exécution de l'obligation.
En résumé, le requérant prétend qu'en vertu de l'article 47 de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, le directeur est chargé de faire enquête sur l'existence de conditions ou pratiques de ce commerce particulier qui peuvent constituer une situation de monopole ou une restriction du com merce et que cette enquête est réputée une enquête tenue en vertu de la Loi sur les enquêtes, S.R.C. 1970, chap. I-13.
Les intimés soutiennent au contraire que lorsque le directeur a achevé son enquête prévue au para- graphe (I) de l'article 47 et qu'il a soumis à la Commission les éléments de preuve ainsi rassem- blés et incorporés au [TRADUCTION] «Livre vert», son rôle est terminé et qu'à partir de ce moment, il
appartient à la Commission de décider, dans le cadre de l'enquête, si elle doit examiner d'autres preuves ou matières. Cette assertion se fonde sur le libellé du paragraphe (2) de l'article 47.
On ne peut, à mon avis, comprendre le but visé par l'article 47 en examinant les termes de cet article dans l'abstrait; il faut plutôt considérer l'esprit et l'objet de la loi. Pour ce faire, on peut se reporter à l'ensemble de cette loi.
L'article 8 prévoit que c'est le directeur qui doit demander la tenue d'une enquête en vue de déter- miner les faits pertinents.
En vertu de l'article 14, le directeur peut mettre fin à l'enquête s'il est convaincu que la preuve est insuffisante mais il doit obtenir l'assentiment de la Commission lorsque des éléments de preuve ont été soumis à cette dernière.
L'article 15 permet au directeur de mettre fin à l'enquête à toute étape et d'intenter des procédu- res.
Aux termes de l'article 27.1, le directeur est chargé de faire des observations aux offices fédé- raux relativement au maintien de la libre concurrence.
Le directeur est donc chargé de veiller à la libre entreprise et à la libre concurrence.
Il ne fait, par conséquent, aucun doute que cette Loi est conçue de façon telle que le directeur est responsable de la conduite d'une enquête et ce, pendant toute la durée de l'audience tenue devant la Commission conformément à l'article 47. La responsabilité du directeur ne se termine pas au début de l'audience tenue devant la Commission puisque l'enquête doit se poursuivre sous sa direction.
La tâche du directeur n'est pas terminée.
Cela étant, il s'agit alors de savoir si la notifica tion de citations à comparaître est un acte pure- ment administratif ou un acte de nature judiciaire ou quasi judiciaire.
Dans le premier cas, il y aura possibilité d'obte- nir un bref de mandamus pour obliger l'organisme à notifier les documents en question, celui-ci ne jouissant d'aucune discrétion à cet égard.
Dans le second cas, étant donné que l'organisme jouit d'un pouvoir discrétionnaire, on ne pourra avoir recours au mandamus.
Aux termes de l'article 21 de la Loi relative aux enquêtes sur la coalition, la Commission ou l'un de ses membres possède les pouvoirs d'un commis- saire nommé en vertu de la Loi sur les enquêtes.
En vertu de l'article 4 de cette Loi, les commis- saires peuvent assigner des témoins et les contrain- dre à témoigner, et l'article 5 leur confère un pouvoir de contrainte identique à celui dont dispo- sent les cours d'archives en matières civiles.
Il s'ensuit que la notification de citations à comparaître par la Commission ou l'un de ses membres est analogue à celle qui est faite par les cours de justice.
Il s'agit d'un acte administratif.
L'article 48 de la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions autorise le gouverneur en conseil à établir les règlements nécessaires à la mise à l'exé- cution et à l'application de la Loi.
En réponse à une question que j'ai moi-même posée, on m'a appris qu'il n'existait pas de règle- ments concernant la procédure à suivre au cours d'une enquête tenue devant la Commission en application de l'article 47 mais qu'un code de procédure qui avait été établi pouvait s'appliquer à la conduite de la présente enquête et que les parties y avaient consenti.
On a cité comme exemple la notification de citations à comparaître assortie de conditions qui devaient être préalablement remplies. J'ai des doutes quant à la validité de cette procédure et quant à savoir si elle lie les parties.
On a répliqué que le directeur n'avait pas con- senti à l'application de la procédure, ce qui vou- drait dire que la Commission aurait adopté cette procédure unilatéralement.
Je tiens pour acquis que la décision d'ouvrir une enquête appartient au directeur, de même que celle d'ordonner la production d'éléments de preuve.
Il est du devoir de la Commission d'entendre et d'examiner les éléments de preuve qui lui sont soumis.
Le refus de la Commission de notifier des cita tions à comparaître à des témoins et de les con- traindre à témoigner au sujet de questions que le directeur juge importantes et essentielles à l'en- quête est plus qu'un simple rejet d'éléments de preuve; il équivaut à un refus par la Commission de s'acquitter de son obligation de tenir une enquête. Bref, il s'agit d'un refus d'exercer sa compétence.
Par ces motifs, la demande est accueillie.
ORDONNANCE
La Cour ordonne à la Commission sur les prati- ques restrictives du commerce ou à son président de notifier des citations à comparaître aux person- nes suivantes, conformément à la demande du requérant:
1. J. L. Stoik,
Président-directeur général,
Gulf Canada Limited;
2. R. W. D. Hanbidge,
Président-directeur général,
BP Canada Inc.;
3. Andrew Janisch,
Président et chef des opérations,
Petro -Canada;
4. C. William Daniel,
Président-directeur général, Shell Canada Limited, et
5. Laurie Woodruff,
Président,
Ultramar Canada Inc.
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