Jugements

Informations sur la décision

Contenu de la décision

T-2649-86
Qu'Appelle Indian Residential School Council (demandeur)
c.
Tribunal canadien des droits de la personne, Alliance de la Fonction publique du Canada et Commission canadienne des droits de la personne (défendeurs)
et
Alliance de la Fonction publique du Canada (plaignante)
c.
Qu'Appelle Indian Residential School Council (intimé)
et
Ministre des Affaires indiennes et du Nord cana- dien (partie intéressée)
RÉPERTORIÉ: QU'APPELLE INDIAN RESIDENTIAL SCHOOL COUNCIL C. CANADA (TRIBUNAL CANADIEN DES DROITS DE IA PERSONNE)
Division de première instance, juge Pinard— Ottawa, 28 septembre et 2 novembre 1987.
Droit constitutionnel Partage des pouvoirs Relations du travail Pratiques discrimatoires du Indian School Council (le «Conseil») à l'endroit des employés du pensionnat Les relations de travail sont-elles régies par l'art. 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867 qui vise les Indiens ou par l'art. 93 qui place l'éducation sous le contrôle des provinces? Critère fonctionnel La nature de l'activité détermine la question de la compétence Les activités du Conseil sont tellement directement liées au statut, aux droits et aux privilè- ges des Indiens, qu'elles font partie intégrante de la compé- tence principale fédérale sur les Indiens.
Peuples autochtones Le Conseil est accusé de pratiques discriminatoires (discrimination basée sur le sexe), contraire- ment à la Loi canadienne sur les droits de la personne Le Conseil a été constitué conformément à une loi provinciale Le Conseil dirige un pensionnat pour Indiens situé sur une réserve et financé par le gouvernement fédéral Le Conseil est composé de chefs de bandes On emploie principalement des Indiens Les relations de travail font partie de la compétence législative fédérale Les activités du Conseil sont tellement directement liées au statut, aux droits et aux privilè- ges des Indiens qu'elles font partie intégrante de la compétence principale fédérale sur les Indiens.
Relations du travail Plainte de l'Alliance de la Fonction publique du Canada alléguant que le Conseil a commis de la discrimination (basée sur le sexe dans la structure salariale), contrairement à l'art. 11 de la Loi canadienne sur les droits de
la personne Les relations de travail relèvent de la compé- tence des provinces à moins que la nature des activités soit qualifiée de fédérale Critère fonctionnel La nature des activités du Conseil est tellement liée au statut des Indiens, qu'elle fait partie intégrante de la compétence principale fédé- rale sur les Indiens Le Tribunal canadien des droits de la personne a la compétence pour instruire la plainte de l'Alliance.
Droits de la personne Le Conseil aurait commis de la discrimination (basée sur le sexe dans sa structure salariale), contrairement à l'art. 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne Le Conseil dirige un pensionnat pour Indiens sur une réserve Le Tribunal canadien des droits de la personne a la compétence pour instruire la plainte.
Le Qu'Appelle Indian Residential School Council (ci-après le «Conseil») est un organisme à but non lucratif, constitué en vertu des lois de la province de la Saskatchewan. Le Conseil, composé de chefs de bandes, dirige le Qu'Appelle Indian Resi dential School, qui éduque et loge les enfants indiens. L'École est financée par le gouvernement fédéral, elle est située sur une réserve indienne et elle emploie principalement des Indiens. L'Alliance de la Fonction publique du Canada, l'agent négocia- teur pour les employés indiens, a déposé une plainte devant la Commission canadienne des droits de la personne, alléguant que le Conseil avait commis de la discrimination, contrairement à l'article 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Cet article prévoit que le fait pour l'employeur de pratiquer la disparité salariale entre les hommes et les femmes qui exécutent des fonctions équivalentes constitue un acte discriminatoire. Le Conseil a sollicité un jugement déclarant que le Tribunal canadien des droits de la personne n'avait pas le pouvoir d'enquêter sur la plainte portée par l'Alliance. Il s'agit en l'espèce d'une demande de la Commission visant le rejet de l'action du Conseil. Ce dernier prétend que les relations de travail en l'espèce ne relèvent pas du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867 qui vise «les Indiens et les terres réservées aux Indiens» mais de l'article 93 qui place l'éducation sous le contrôle des provinces.
Jugement: La demande est accueillie.
La compétence constitutionnelle fondée sur l'article 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne dépend des mêmes principes qui s'appliquent aux autres législations en matière de relations de travail. Règle générale, les relations de travail relèvent de la compétence législative des provinces car elles touchent à la propriété et aux droits civils. Toutefois, la Cour suprême du Canada a établi des exceptions à cette règle, montrant que le Parlement du Canada possède la compétence pour légiférér, dans certaines situations, à l'égard des relations de travail. Essentiellement, la position de la Cour suprême est qu'un ouvrage, une entreprise ou une affaire peut être qualifié de fédéral si la nature de l'activité forme une «partie intégrante de la compétence principale fédérale sur une autre matière fédérale». Il s'agit du critère fonctionnel. La question de la compétence sera donc tranchée par la nature de l'activité.
En se servant du critère fonctionnel, il faut conclure que les employés du Conseil sont tellement directement liés aux activi- tés relatives au statut, aux droits et aux privilèges des Indiens que leurs relations de travail avec le Conseil forment une partie intégrante de la compétence principale fédérale sur les Indiens
et les terres réservées aux Indiens, en vertu du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867. Cette conclusion est étayée par les faits, les règlements et les objets énoncés dans le certificat de constitution du Conseil. La Cour est convaincue que les relations de travail de l'École ont toujours relevé de la compétence fédérale. Au départ, l'École était dirigée par le ministre responsable des Affaires indiennes; plus tard, la res- ponsabilité a été transférée au Conseil composé des chefs des bandes. Depuis sa fondation, l'École a été financée par le gouvernement fédéral vis-à-vis duquel elle était responsable en fin de compte, conformément aux articles 114 à 123 de la Loi sur les Indiens. Le fait que le Conseil n'ait formulé aucun argument d'ordre constitutionnel devant le Conseil canadien des relations du travail contre l'accréditation a aussi été pris en considération. L'École est, par conséquent, sujette à la législa- tion fédérale concernant les relations du travail et le Tribunal a compétence pour instruire la plainte portée contre le Conseil.
LOIS ET RÈGLEMENTS
Code canadien du travail, S.R.C. 1970, chap. L-1, art. 119 (mod. par S.C. 1972, chap. 18, art. 1).
Loi canadienne sur les droits de la personne, S.C. 1976-77, chap. 33, art. 2, 11(1), 21, 35(1).
Loi constitutionnelle de 1867, 30 & 31 Vict., chap. 3 (R.-U.) [S.R.C. 1970, Appendice II, 5] (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitutionnelle de 1982, 1), art. 91(24), 92(13), 93.
Loi sur la Cour fédérale, S.R.C. 1970 (2' Supp.), chap. 10, art. 18.
Loi sur les Indiens, S.R.C. 1970, chap. I-6, art. 114-123. Règles de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663, Règle 341.
The Non-profit Corporations Act, S.S. 1979, chap. N-4.1.
The Societies Act, R.S.S. 1965, chap. 142 (abrogée par S.S. 1983-84, chap. 52).
JURISPRUDENCE
DÉCISIONS SUIVIES:
Francis c. Conseil canadien des relations du travail, [1981] 1 C.F. 225 (C.A.); infirmé pour d'autres motifs dans [1982] 2 R.C.S. 72; Whitebear Band Council v. Carpenters Prov. Council of Sask., [1982] 3 W.W.R. 554 (C.A. Sask.).
DÉCISIONS APPLIQUÉES:
Reference re Industrial Relations and Disputes Act, [1955] R.C.S. 529; Conseil canadien des relations du travail et autre c. Yellowknife, [1977] 2 R.C.S. 729; Commission canadienne des droits de la personne c. Haynes (1983), 46 N.R. 381 (C.A.F.).
DISTINCTION FAITE AVEC:
Four B Manufacturing Ltd. c. Travailleurs unis du
vêtement d'Amérique et autre, [1980] 1 R.C.S. 1031.
AVOCATS:
Niel Halford pour le demandeur.
Russell Juriansz pour la Commission cana-
dienne des droits de la personne, défenderesse.
Andrew J. Raven, pour l'Alliance de la Fonc- tion publique du Canada, défenderesse.
PROCUREURS:
Halford Law Office, Fort Qu'Appelle (Saska- tchewan), pour le demandeur.
Services juridiques de la Commission cana- dienne des droits de la personne pour la Com mission canadienne des droits de la personne, défenderesse.
Soloway, Wright, Houston, Greenberg, O'Grady, Morin (Ottawa), pour l'Alliance de la Fonction publique du Canada, défende- resse.
Ce qui suit est la version française des motifs de l'ordonnance rendus par
LE JUGE PINARD: Il s'agit d'une demande pré- sentée par la défenderesse la Commission cana- dienne des droits de la personne, sur le fondement de la Règle 341 [Règles de la Cour fédérale, C.R.C., chap. 663], en vue d'obtenir un jugement rejetant l'action du demandeur. Une demande ana logue a également été présentée dans le dossier T-2421-85 comportant le même point en litige et les parties ont accepté que ces deux demandes soient débattues en même temps et jugées sur la même preuve. Par conséquent, les motifs en l'es- pèce seront applicables mutatis mutandis à l'or- donnance portant sur la demande similaire dans l'autre dossier.
Les parties, par leurs procureurs, ont également convenu que les documents suivants formeraient le dossier de l'argumentation:
1. L'exposé conjoint des faits déposé par les par ties devant le Tribunal canadien des droits de la personne;
2. L'affidavit du chef Irvin Starr assermenté le 28 novembre 1986;
3. L'affidavit de Daniel J. Russell assermenté le 6 avril 1987.
L'exposé conjoint des faits déposé par les parties devant le Tribunal canadien des droits de la per- sonne énonçait les faits suivants et renvoyait à plusieurs documents pertinents annexés qu'il ne sera pas nécessaire de reproduire dans les motifs en l'espèce, quoique la Cour puisse juger à propos d'en citer à l'occasion des extraits. Il est donc approprié et suffisant pour l'instant de reprendre l'exposé conjoint des faits» tel qu'il a été rédigé:
1. L'Alliance de la Fonction publique du Canada (ci-après appelée l'«AFPC») est l'agent négociateur représentant tous les employés du Qu'Appelle Indian Residential School, sauf l'administrateur du pensionnat.
2. La Commission canadienne des droits de la personne (ci-après appelée la «Commission») est un organisme créé par l'article 21 de la Loi cana- dienne sur les droits de la personne, S.C. 1976-77, chap. 33, et ses modifications, (ci-après appelée la «Loi»). (Une copie certifiée conforme de la Loi canadienne sur les droits de la personne constitue l'annexe «A».)
3. L'intimé, Qu'Appelle Indian Residential School Council, (ci-après appelé le «Conseil») a été consti- tué conformément aux dispositions de la Societies Act de la Saskatchewan [R.S.S. 1965, chap. 142], en date du 23 août 1972. (Une copie du certificat de constitution prévu par la Societies Act et la demande jointe à ce certificat constituent l'annexe «B».) Par une résolution spéciale en date du 22 novembre 1974, les règlements de la société ont été annulés et remplacés par de nouveaux règlements en vigueur à compter du 18 novembre 1974. (Une copie de la résolution spéciale et des règlements modifiés constitue l'annexe «C».) La Societies Act a été remplacée par la Non-profit Corporations Act de la Saskatchewan [S.S. 1979, chap. N-4.1] et officiellement abrogée en 1984 [S.S. 1983-84, chap. 52]. Le Conseil a continué d'exister sous le régime de la Non-profit Corporations Act de la Saskatchewan, en tant que société constituée en vertu des lois de la Saskatchewan et dont le bureau principal se trouve à Regina (Saskatchewan). (Une copie du certificat de continuation en date du 28 septembre 1982 constitue l'annexe «D».)
4. L'intimé dirige le Qu'Appelle Indian Residen tial School (ci-après appelé l'«École») dans le dis trict de Lebret (Saskatchewan).
5. Le 9 septembre 1981, 1'AFPC a déposé une plainte devant la Commission conformément à la Loi, alléguant que le Conseil avait commis de la discrimination basée sur le sexe aux termes de l'article 11 de ladite Loi. La plainte précise que, suivant la structure salariale de l'employeur, la majorité des postes à prédominance masculine se trouvent dans la première moitié de l'échelle sala- riale et la majorité des postes à prédominance féminine dans la seconde moitié, sauf pour les postes supérieurs comblés par des femmes. On y affirme de plus que plusieurs des postes à prédomi- nance féminine dans la seconde moitié ont une valeur égale aux postes à prédominance masculine dans la première moitié. Le titre des postes fourni dans le manuel des employés de l'École (School Employee Manual) ne montre aucune différence notable depuis le dépôt de la plainte. (Une copie de la plainte de l'AFPC constitue l'annexe «E» et une copie du manuel des employés de l'École repré- sente l'annexe «F».)
6. Après le dépôt de la plainte, la Commission a nommé un enquêteur le 31 mai 1982, conformé- ment au paragraphe 35(1) de la Loi, pour enquêter sur ladite plainte.
7. À la suite du rapport de l'enquêteur, la Com mission a demandé au président, par lettre en date du 24 octobre 1985, de constituer un tribunal des droits de la personne. (Une copie de cette lettre constitue l'annexe «G».)
8. L'École éduque et loge les enfants indiens des districts de Touchwood-File Hills-Qu'Appelle et de Yorkton sur les réserves indiennes délimitées par le ministre des Affaires indiennes et du Nord cana- dien. La majeure partie de ces districts est située dans la province de la Saskatchewan mais une petite portion desdits districts se trouve dans la province du Manitoba.
9. À compter de sa fondation en 1887, l'École a été dirigée par les pères Oblats et financée par le ministre canadien responsable des Affaires indien- nes. Vers 1968, le ministre ou ses délégués ont pris la direction des opérations et nommé les membres du conseil de l'École. En 1973, le [TRADUCTION]
«conseil consultatif local» composé des membres concernés de la bande indienne qui étaient consul tés par le conseil de l'École et lui donnaient son avis, s'est vu confier la responsabilité de l'adminis- tration des résidences de l'École. En 1981, le ministre a transféré au «conseil consultatif local» la responsabilité de l'administration de l'École. A l'heure actuelle, le Conseil est composé des 24 chefs de bande des 24 bandes qui forment les districts de Touchwood-File Hills-Qu'Appelle et de Yorkton.
10. Par décret C.P. 1983-2071 en date du 7 juillet 1983, les terres sur lesquelles sont érigés les immeubles de l'école ont été mises de côté à l'usage et au profit de la réserve indienne de Starblanket connue sous le nom de réserve indienne Wa-Pii-Moos-Toosis (White Calf), 83A, en reconnaissance partielle des droits fonciers qu'elle a acquis en vertu du traité 4. (Une copie du décret transférant les terres à la réserve de Starblanket constitue l'annexe «H» et une copie du traité 4 représente l'annexe «I».)
11. En 1981, le Conseil commença à louer du Board of Education of the Indian Head School Division No. 19 de la Saskatchewan un immeuble qui avait servi d'école primaire. Ledit immeuble est situé à environ un quadrilatère de la réserve. (Une copie du certificat de titre du Board of Education of the Indian Head School Division No. 19 constitue l'annexe «J» et les baux intervenus entre le Conseil et ledit Board of Education pour les années 1981, 1983, 1984 et 1985 constituent les annexes «K», «L», «M» et «N».)
12. Les professeurs du Qu'Appelle Indian Resi dential School sont rémunérés d'après la même échelle salariale que les professeurs qui travaillent pour le ministère de l'Éducation de la Saskatche- wan. Il n'y a aucun contrat officiel entre les pro- fesseurs et le Conseil. Le programme de l'École est le même que celui du ministère de l'Éducation de la Saskatchewan, sauf que l'École offre en plus des cours de langue crie et de culture indienne. Les étudiants de l'École qui sont au nombre d'environ 200 ne paient aucuns frais de scolarité. L'École
pourvoit à l'enseignement primaire et secondaire des autochtones.
Le noyau de l'École est constitué d'une large bâtisse abritant les salles de classes, les résidences et les bureaux de l'administration. Il existe d'au- tres immeubles pour l'enseignement de divers sujets comme, par exemple, la mécanique. Un principal à la retraite du système scolaire public de la province exerce cette charge à l'École. Celle-ci n'est d'aucune façon réglementée par le ministère de l'Éducation de la Saskatchewan. (Des copies du manuel de l'étudiant et du rapport annuel pour 1984-85 constituent les annexes «O» et «P».)
13. L'École est entièrement financée par Sa Majesté la Reine du chef du Canada en confor- mité avec les ententes annuelles signées par le ministre canadien responsable des Affaires indien- nes. (Des copies des ententes annuelles pour les années 1981-82, 1983-84, 1984-85, 1985-86 et 1986-87 constituent les annexes «Q», «R», «S», «T» et «U». Des copies des états financiers de l'École
pour les années 1981 1986 inclusivement repré- sentent les annexes «V», «W», «X», «Y», «Z» et «AA».)
14. Le Conseil a été officiellement avisé de la plainte portée contre lui par une lettre datée du 30 juillet 1982. (Une copie de cette lettre constitue l'annexe «BB».) Le Conseil n'a toutefois pas con testé la compétence de la Commission pour enten- dre la plainte sauf par des termes vagues et impré- cis. (Une copie d'une note de service de la Commission en date du 28 octobre 1983 portant sur les doutes du Conseil quant à la compétence de la Commission constitue l'annexe «CC» et une lettre du Conseil en date du 21 mars 1985 adressée à la Commission, lettre qui soulevait aussi la ques tion de la compétence de cette dernière, constitue l'annexe «DD».) Le Conseil n'a pas prétendu rele- ver de la compétence de la province ni à l'une ni à l'autre de ces occasions.
15. Vers le 13 avril 1973, l'AFPC a déposé une demande d'accréditation à titre d'agent négocia- teur devant le Conseil canadien des relations du travail [CCRT], conformément à la Partie V du Code canadien du travail [S.R.C. 1970, chap. L-1 (mod. par S.C. 1972, chap. 18, art. 1)], à l'égard d'une unité de négociation proposée composée de tous les employés du Conseil. Le Conseil n'a
jamais prétendu que le Code canadien du travail ne lui était pas applicable. L'accréditation a été accordée par le CCRT le 4 mars 1974. (Des copies de la demande d'accréditation par l'AFPC, de la réponse du Conseil en date du 31 juillet 1973 et de l'accréditation accordée par le CCRT en date du 4 mars 1974 constituent les annexes «EE», «FF» et «GG» respectivement.)
16. Vers le 7 octobre 1982, soit plus d'un an après le dépôt de la plainte devant la Commission, le Conseil a présenté au Conseil canadien des rela tions du travail [CCRT], en vertu de l'article 119 de la Partie V du Code canadien du travail, une demande en vue de modifier la description de l'unité de négociation figurant dans l'accréditation du 4 mars 1974. La compétence du CCRT aux fins d'examiner la demande du Conseil a évidem- ment été acceptée. Le 7 février 1983, la demande de révision du Conseil a été accueillie et l'étendue de l'unité de négociation a été modifiée. (Des copies de la demande de révision du Conseil, du rapport d'enquête du CCRT en date du 16 novem- bre 1982 et de la décision de ce dernier en date du 17 février 1983 constituent les annexes «HH», «II» et «JJ».)
17. Les parties ont convenu que les faits énoncés dans le présent exposé devraient être inscrits au dossier en l'espèce.
La question en l'espèce est de déterminer si le Tribunal canadien des droits de la personne a compétence sur le plan constitutionnel pour ins- truire la plainte portée par l'Alliance de la Fonc- tion publique du Canada contre le demandeur. La compétence du Tribunal pour mener une enquête tire son origine de la Loi canadienne sur les droits de la personne, S.C. 1976-77, chap. 33, et ses modifications. Les dispositions de la Loi ne visent que les questions qui sont de la compétence législa- tive du gouvernement fédéral. L'article 2 et le paragraphe 11(1) de la Loi prévoient:
2. La présente loi a pour objet de compléter la législation canadienne actuelle en donnant effet, dans le champ de compé- tence du Parlement du Canada, aux principes suivants:
11. (1) Constitue un acte discriminatoire le fait pour l'em- ployeur d'instaurer ou de pratiquer la disparité salariale entre
les hommes et les femmes qui exécutent, dans le même établis- sement, des fonctions équivalentes.
Comme l'a affirmé le juge Le Dain dans l'arrêt Commission canadienne des droits de la personne c. Haynes (1983), 46 N.R. 381 (C.A.F.), à la page 383, la compétence constitutionnelle fondée sur l'article 11 de la Loi dépendra des mêmes princi- pes qui s'appliquent aux autres législations en matière de relations de travail:
L'article 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, qui traite de discrimination dans l'emploi, établit que le fait pour un employeur d'instaurer ou de pratiquer la dispa- rité salariale entre les hommes et les femmes qui exécutent, dans le même établissement, des fonctions équivalentes consti- tue un acte discriminatoire ... Comme l'avocat des appelantes, je pense que l'article 11 porte sur les relations employeurs- employés et que son application constitutionnelle dépend des principes concernant la détermination des compétences législa- tives en ce domaine.
Le demandeur Qu'Appelle Indian Residential School Council affirme qu'il n'est pas soumis aux lois sur les relations de travail du gouvernement canadien et qu'il est une société chargée d'adminis- trer une école. Invoquant le «critère fonctionnel», comme l'exigent plusieurs précédents, il prétend décrire adéquatement ses activités en disant qu'il dirige un pensionnat. Il conclut qu'en l'espèce, les relations de travail ne devraient pas être considé- rées comme relevant du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867 [30 & 31 Vict., chap. 3 (R.-U.) [S.R.C. 1970, Appendice II, 5] (mod. par la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.), annexe de la Loi constitution- nelle de 1982, 1)] qui vise «les Indiens et les terres réservées aux Indiens» mais plutôt de l'arti- cle 93 qui place en principe l'éducation sous le contrôle des provinces.
Le demandeur a donc voulu obtenir un jugement déclarant que le Tribunal canadien des droits de la personne n'avait pas le pouvoir d'enquêter sur la plainte portée par la défenderesse, l'Alliance de la Fonction publique du Canada, et une ordonnance en vue d'empêcher ledit Tribunal de mener une telle enquête. En l'espèce, la défenderesse, la Com mission canadienne des droits de la personne, demande une ordonnance ou un jugement rejetant l'action du demandeur.
On admet généralement que la question des relations de travail relève de la compétence législa- tive des provinces car elle touche à la propriété et
aux droits civils, au sens du paragraphe 92(13) de la Loi constitutionnelle de 1982 [annexe B, Loi de 1982 sur le Canada, 1982, chap. 11 (R.-U.)]. Toutefois, on considère habituellement que cette règle comporte quatre exceptions. Dans Reference re Industrial Relations and Disputes Act (l'arrêt Stevedoring), [1955] R.C.S. 529, le juge Estey énumère ces quatre exceptions à la page 564:
[TRADUCTION] Cette jurisprudence montre que le Parlement du Canada possède la compétence pour légiférer à l'égard des relations ouvrières et de la main-d'oeuvre même si ces relations entrent dans la catégorie de la propriété et des droits civils au sens de l'art. 92(13) de l'Acte de l'A.N.B. et donc, sont soumises à la loi provinciale. Cette compétence du Parlement pour ainsi légiférer comprend ces situations la main-d'œuvre et les relations ouvrières sont a) parties intégrantes des rubri- ques énumérées dans l'art. 91 ou nécessairement incidentes; b) afférentes aux employés du gouvernement central; c) afférentes aux ouvrages et entreprises mentionnés aux art. 91(29) et 92(10); d) afférentes aux ouvrages, entreprises ou affaires situés au Canada mais à l'extérieur de toute province.
Dans l'arrêt Conseil canadien des relations du travail et autre c. Yellowknife, [1977] 2 R.C.S. 729, la page 736, le juge Pigeon dit:
Cela étant, il reste à trancher la question de savoir si, dans le contexte du Code du travail, la définition de l'expression «entreprise, affaire ou ouvrage de compétence fédérale» englobe les activités d'une corporation municipale.
En examinant cette question, on doit se rappeler qu'il est bien établi que la compétence en matière de travail relève du pouvoir législatif sur l'exploitation et non sur la personne de l'employeur.
Le demandeur fonde son argumentation princi- palement sur l'arrêt Four B Manufacturing Ltd. c. Travailleurs unis du vêtement d'Amérique et autre, [1980] 1 R.C.S. 1031. Il s'agissait dans cette affaire d'une entreprise de fabrication de chaussures exploitée par des Indiens qui en étaient les propriétaires par l'intermédiaire d'une société constituée en vertu des lois de la province. L'entre- prise était située sur une réserve, engageait surtout des Indiens et était financée par le ministère des Affaires indiennes. Le Conseil de la bande indienne n'avait rien à voir avec la société. Dans cet arrêt, le juge Beetz, parlant au nom de la majorité (le juge en chef Laskin et le juge Ritchie étant dissidents), expose la règle comme suit à la page 1045:
À mon avis, les principes établis pertinents à cette question peuvent être résumés très brièvement. En ce qui a trait aux relations de travail, la compétence législative provinciale exclu sive est la règle, la compétence fédérale exclusive est l'excep- tion. L'exception comprend, principalement, les relations de travail relatives aux entreprises, services et affaires qui, compte
tenu du critère fonctionnel de la nature de leur exploitation et de leur activité normale, peuvent être qualifiés d'entreprises, de services ou d'affaires de compétence fédérale:
Appliquant cette règle à la situation de Four B, le juge Beetz concluait à la page 1046:
Rien dans l'affaire ou l'exploitation de Four B ne pourrait permettre de la considérer comme une affaire de compétence fédérale: la couture d'empeignes sur des souliers de sport est une activité industrielle ordinaire qui relève nettement du pou- voir législation provincial sur les relations de travail. Ni la propriété de l'entreprise par des actionnaires indiens, ni l'em- bauchage par cette entreprise d'une majorité d'employés indiens, ni l'exploitation de cette entreprise sur une réserve indienne en vertu d'un permis fédéral, ni le prêt et les subven- tions du fédéral, pris séparément ou ensemble, ne peuvent avoir d'effet sur la nature de l'exploitation de cette entreprise. Donc, compte tenu du critère fonctionnel et traditionnel, The Labour Relations Act s'applique aux faits de l'espèce et la Commission a compétence.
En examinant les prétentions de l'appelante, le juge Beetz a expliqué ainsi le sens à donner au critère fonctionnel, à la page 1047:
Le critère fonctionnel est une méthode particulière d'applica- tion d'une règle plus générale, savoir, que la compétence fédé- rale exclusive en matière de relations de travail n'existe que si l'on peut établir qu'elle fait partie intégrante de sa compétence principale sur une autre matière fédérale: l'arrêt Stevedoring.
Cet exposé du droit permet de conclure qu'aux fins de décider qui aura compétence sur les rela tions de travail dans un cas précis, il ne s'agit pas de savoir qui est l'employeur, qui sont les employés, à quel endroit sont exécutées les opéra- tions ou qui les finance. Il faut plutôt considérer le genre ou la nature des activités en cause. Dans l'arrêt Four B, la Cour suprême du Canada a décidé à la majorité que le genre d'activités prati- quées par les Indiens n'avait absolument rien à voir avec leur statut ou leurs privilèges en tant qu'Indiens, et que le fait de coudre des empeignes sur des souliers de sport doit être considéré comme une activité industrielle ordinaire. Aussi, les rela tions de travail seraient, dans ces circonstances, soumises aux lois provinciales.
Dans l'arrêt Francis c. Conseil canadien des relations du travail, [1981] 1 C.F. 225 (C.A.), qui fut infirmé pour d'autres motifs dans [1982] 2 R.C.S. 72, la Cour a rendu un jugement contraire à celui de Four B et elle a maintenu l'accrédita- tion, par le Conseil canadien des relations du travail, d'une unité de négociation composée des employés du Conseil de la bande de Saint-Régis. Ces employés assumaient diverses responsabilités
dont l'administration de l'éducation, des terres et propriétés immobilières indiennes, des logements, des travaux publics et des foyers pour personnes âgées ainsi que l'entretien des écoles, des routes, l'hygiène publique et l'enlèvement des ordures ménagères. Le juge Heald, dont l'opinion sur la question de la compétence a été suivie par les deux autres juges, a statué que les activités des employés de l'unité de négociation étaient si étroitement reliées au statut et aux privilèges des Indiens que les relations de travail constituaient «une partie intégrante de la compétence fédérale principale sur les Indiens ou les terres réservées aux Indiens». Il a donc conclu que l'accréditation de l'unité de négo- ciation relevait de la compétence du Conseil cana- dien des relations du travail. Il a établi une distinc tion avec l'arrêt Four B (précité) en indiquant que dans cette affaire les Indiens de la réserve géraient une entreprise commerciale n'ayant aucun effet sur le statut et les droits des employés en tant qu'Indiens ou membres de la bande, alors que dans l'affaire Francis, les employés ou le Conseil parti- cipaient à l'administration générale de la bande, ce qui touchait incontestablement au statut, aux droits et aux privilèges des Indiens de la bande.
Dans l'arrêt Whitebear Band Council v. Car penters Prov. Council of Sask., [1982] 3 W.W.R. 554 (C.A. Sask.), des menuisiers et apprentis- menuisiers engagés par le Whitebear Band Coun cil pour réaliser un projet de construction et de rénovation domiciliaire financé par le gouverne- ment fédéral ont présenté une demande d'accrédi- tation au Saskatchewan Labour Board. La déci- sion de ce dernier d'accréditer l'unité a été annulée par la Cour d'appel de la Saskatchewan pour le motif que le Saskatchewan Labour Board avait excédé sa compétence. Le juge Cameron de la Cour d'appel a conclu en ces termes la page 566):
[TRADUCTION] Je suis en conséquence convaincu que dans les circonstances, la construction de maisons sur la réserve fait partie intégrante des activités générales du conseil de la bande et elle ne peut être à bon droit isolée de son tout et traitée comme une activité industrielle ordinaire dans la province et relevant de la compétence provinciale ...
De prime abord, la présente instance semble analogue à l'arrêt Four B (précité). Comme dans cette dernière cause, le Conseil en l'espèce reçoit des fonds du ministère fédéral des Affaires indien- nes et du Nord canadien, il exerce ses activités sur
une réserve indienne et il engage principalement (sinon exclusivement) des Indiens. Egalement, le Conseil en l'espèce est une société privée constituée en vertu des lois de la province, tout comme c'était le cas dans l'arrêt Four B, même si le Conseil est un organisme à but non lucratif alors que Four B Manufacturing Ltd. avait été constituée comme une entreprise commerciale. Toutefois, ces ressem- blances sont sans importance puisque, comme l'a précisé le juge Beetz dans l'arrêt Four B (précité), ce n'est pas l'endroit l'entité exerce ses activités ni qui elle engage qui sont les éléments détermi- nants dans l'attribution de la compétence mais bien ce qu'elle fait. La question clé est de savoir comment on peut caractériser la nature et les fonctions du demandeur.
En l'espèce, j'estime que les attributions du Con- seil peuvent et doivent de par leur nature, être considérées comme faisant partie intégrante de la compétence principale fédérale sur les Indiens et les terres indiennes en vertu du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867. La présente conclusion s'appuie sur les faits de la cause. Le Conseil a pour fonction d'administrer le Qu'Ap- pelle Residential Indian School, ce qui comprend la construction et l'entretien des édifices et des résidences scolaires, la gestion des finances et du personnel de l'École, de même que l'élaboration des politiques scolaires. Parmi les objets énoncés dans le certificat de constitution du Conseil et dans son acte constitutif, on retrouve ce qui suit (voir les annexes «B» et «C», article 2f), de l'exposé conjoint des faits):
[TRADUCTION] La Society [ci-après appelée la «société»] a pour objets:
f) la protection et la promotion de la littérature, de l'histoire et des arts indiens de même que la protection et la promotion des éléments culturels et traditionnels les plus précieux, notamment la langue, la religion, la musique folklorique, la danse, l'artisanat et généralement toutes les coutumes indien- nes et elle doit faire les recommandations nécessaires au gouvernement du Canada afin que lesdits éléments culturels puissent être inclus dans le programme académique du Qu'Appelle Indian Residential School.
Les règlements du Conseil sont également révé- lateurs (voir l'annexe «C» de l'exposé conjoint des faits), par exemple:
1. Le règlement afférent à la composition de la société indique que cette dernière doit être accessi ble à tout Indien visé par un traité et à tout Indien inscrit des districts de Touchwood-File Hills- Qu'Appelle et de Yorkton de la Regina Indian Society.
2. Le règlement afférent aux officiers et adminis- trateurs énonce:
[TRADUCTION] Il doit y avoir 25 candidats; chaque bande indienne doit être une bande au sens de la Loi sur les Indiens et être située dans les districts de Touchwood-File Hills-Qu'Ap- pelle et de Yorkton et chacune choisit un candidat pour assister à l'assemblée générale de la société; la Regina Indian Society, qui s'appelait autrefois Regina Urban Indian Association, choi- sit un candidat pour assister aux assemblées générales de ladite société et ces 25 candidats choisissent ensemble les administra- teurs de la société; ils sont les seules personnes éligibles aux postes d'administrateurs de la société.
3. Le règlement afférent aux devoirs et pouvoirs des administrateurs prévoit:
[TRADUCTION] d) Les administrateurs doivent discuter du programme académique de l'école et faire des recommanda- tions à l'assemblée générale et au gouvernement du Canada en vue d'apporter au programme des modifications qui favorise- ront la réalisation des buts et objectifs de la société.
k) De concert avec le gouvernement fédéral, les administra- teurs doivent réglementer les admissions au Qu'Appelle Indian Residential School.
4. Le règlement afférent à l'exercice des pouvoirs financiers énonce:
[TRADUCTION] a) Pour atteindre ses objectifs, la société demandera au gouvernement fédéral de signer une entente en vertu de laquelle celui-ci lui versera à chaque année les fonds nécessaires pour couvrir les coûts relatifs aux étudiants, à l'entretien, aux réparations, aux améliorations, aux rénovations
et aux charges d'exploitation.
Le traité 4 prévoit spécifiquement que [TRA- DUCTION] «Sa Majesté s'engage à fournir les ser vices d'une école dans la réserve attribuée à chaque bande dès que cette dernière sera établie sur ladite réserve et qu'elle pourra accueillir un enseignant». (Voir l'annexe «I» de l'exposé conjoint des faits.) Même si en 1981 le ministre a transféré la responsabilité de l'administration de l'École au «conseil consultatif local», il a été autorisé en vertu de l'article 114 de la Loi sur les Indiens, S.R.C. 1970, chap. I-6, et ses modifications, à conclure avec le demandeur, pour chacune des années 1981 à 1985 inclusivement, des accords détaillés relati- vement à l'éducation des enfants indiens suivant les prescriptions de cette Loi. (Voir les annexes
«Q» à «T» inclusivement de l'exposé conjoint des faits.)
Je suis donc d'avis que le Qu'Appelle Indian Residential School et les relations de travail de cette institution relèvent de la compétence fédérale car il en a toujours été ainsi. Pour la période entre 1968 et 1973, l'École était de fait dirigée par le ministre fédéral responsable des Affaires indien- nes, après quoi le gouvernement a progressivement transféré ses responsabilités au Conseil qui était composé des vingt-quatre chefs de bande représen- tant les vingt-quatre bandes des districts de Touch- wood -File Hills-Qu'Appelle et de Yorkton. Depuis sa fondation en 1887, l'Ecole a été financée par le gouvernement fédéral vis-à-vis duquel elle est res- ponsable en fin de compte, conformément aux articles 114 123 de la Loi sur les Indiens.
De plus, le Conseil s'estimait toujours assujetti à la compétence du gouvernement fédéral lorsqu'il a faire face à l'accréditation de 1'AFPC en tant qu'unité de négociation pour ses employés. Il n'a formulé devant le Conseil canadien des relations du travail aucun argument d'ordre constitutionnel contre ladite accréditation.
Dans ce contexte, je suis tout à fait d'accord avec l'opinion émise dans l'extrait suivant de la décision du Tribunal des droits de la personne, décision qui est jointe à l'affidavit du chef Irvin Starr sous la cote «E»:
[TRADUCTION] Le fait que l'École a été conçue et mise en opération pour des Indiens, qu'elle est dirigée uniquement par des Indiens, que les inscriptions sont limitées aux Indiens, le fait également que ses objectifs consistent à promouvoir les coutumes indiennes et que le programme académique incorpore l'enseignement des langues et de la culture indiennes, tout cela favorise la reconnaissance du «caractère indien» des activités et les rattache aux droits, au statut et aux privilèges des Indiens.
Devant tous ces faits, il importe peu que plu- sieurs écoles administrées par la province de la Saskatchewan offrent des programmes d'études sur les autochtones et sur la langue crie. D'ailleurs, l'affidavit de Daniel J. Russell confirme qu'il y a effectivement des écoles qui offrent des cours d'études sur les autochtones aux étudiants de 10e à 12e année; toutefois, quoiqu'il puisse y avoir eu des cours d'études sur les autochtones offerts au niveau des divisions, un intérêt local suffisant le justifiait, M. Russell déclare qu'à sa connais- sance, aucun de ces cours n'est dispensé aux étu- diants de i fe à 9 e année dans le système scolaire
provincial. Une liste des écoles qui offrent des cours de langue crie et autres langues autochtones a été fournie et la majorité des écoles qui dispen- sent des cours de langues indiennes sont dirigées par des bandes indiennes ou par le ministère des Affaires indiennes.
À mon avis, comme dans les arrêts Francis et Whitebear (précités), les employés du Conseil en l'espèce sont tellement engagés dans les activités afférentes au statut, aux droits et aux privilèges des Indiens que leurs relations de travail avec le Conseil doivent être considérées comme formant une partie intégrante de la compétence principale fédérale sur les Indiens et les terres indiennes, prévue au paragraphe 91(24) de la Loi constitu- tionnelle de 1867.
Selon les critères fonctionnel et traditionnel, donc, les faits en l'espèce indiquent que la nature des opérations du Qu'Appelle Residential Indian School est principalement fédérale, que l'École est sujette à la législation fédérale concernant les rela tions de travail et en conséquence que le Tribunal canadien des droits de la personne a compétence pour instruire la plainte portée contre le deman- deur.
Pour tous ces motifs, la requête de la défende- resse, la Commission canadienne des droits de la personne, en vue d'obtenir le rejet de l'action du demandeur sur le fondement de la Règle 341 de cette Cour doit être accueillie avec dépens contre le demandeur.
Compte tenu de la conclusion ci-dessus, la requête du demandeur en vue d'obtenir une ordon- nance interlocutoire en vertu de l'article 18 de la Loi sur la Cour fédérale empêchant le Tribunal canadien des droits de la personne de mener une enquête en l'espèce «jusqu'à une ordonnance ulté- rieure de cette Cour» doit être rejetée avec dépens.
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.