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30 2 R.C. de l'É. COUR DE L'ÉCHIQUIER DU CANADA [1965] 1964 ENTRE : ea. 14 MARIE BLANCHE BRETON REQUÉRANTE, 1965 ,--.--, ET janv. 12 SA MAJESTÉ LA REINE INTIMÉE. CouronnePétition de droitChute sur trottoirEntretien de trottoir Réparation de trottoirResponsabilité de la CouronneBlessures cor-porellesLoi sur la responsabilité de la Couronne, S. du C. 1952-53, 1-2 Élis. II, ch. 30, art. 3(1)(b)—Charte de la Cité de Québec, S. de Q. 19 Geo. V, ch. 95, art. 417Question de droit soumise.
2 Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA [19651 31 Victime d'une chute sur un trottoir apparemment dangereux la requérante 1965 poursuit en recouvrement des dommages subis et, au soutien de sa BRETON réclamation, allègue que le trottoir en question est soit la propriété de V. la Couronne, soit sous sa garde et à qui en incombe l'entretien et la LA REINE réparation à titre de propriétaire du terrain vis-à-vis du trottoir. Elle ajoute que le fait causal de responsabilité est le résultat de la négligence fautive de l'intimée. Comme défense à l'action l'intimée plaide, en résumé, absence de lien de droit entr'elle et la requérante. A l'instruction les parties soumirent, avec la permission de la Cour, la question de droit suivante: L'intimée dans la présente cause, à savoir Sa Majesté aux droits du Canada, est-elle assujettie aux dispositions de l'article 417 de la Charte de la Cité de Québec qui impose au propriétaire de chaque immeuble ou terrain vis-à-vis un trottoir, l'obligation d'entretenir et de réparer ledit trottoir? Ce dernier article édictant que: 417. Dans toutes les rues de la cité, les trottoirs doivent être faits, entretenus et réparés par le propriétaire de chaque immeuble ou terrain vis-à-vis duquel ils doivent être. Si tel propriétaire néglige de faire, refaire, entretenir ou réparer, selon le cas, les trottoirs, le chef de police lui donnera avis, par écrit, de faire ce qui est prescrit au sujet de ces trottoirs ... Si, dans les huit jours suivant l'avis, les travaux requis auxdits trottoirs n'ont pas été faits, alors ces travaux seront faits par la corporation, qui peut s'en faire rembourser le coût par le propriétaire .. . Jugé: Ce règlement décrète que, dans le territoire municipal de Québec, l'entretien convenable des trottoirs est une charge de la propriété riveraine. Corrollairement, la conclusion découlant du texte de l'art. 3(1) (b) de la Loi sur la responsabilité de la Couronne, S. du C. 1952-53, 1-2 Élis. II, ch. 30, qui se lit comme suit: 3. (1) La Couronne est responsable «in tort» des dommages dont elle serait responsable si elle était un particulier en état de majorité et capacité, a)... b) à l'égard d'un manquement au devoir afférent à la propriété, l'occupation, la possession ou le contrôle de biens. est que la Couronne assume en tout point cette responsabilité du propriétaire québécois. Cf. Thérèse Deslauriers-Drago et Sa Majesté la Reine [1963] Ex. C.R. 289, à la p. 290. 2° La réponse doit donc être affirmative à la question posée. PÉTITION DE DROIT en recouvrement de dommages-intérêts subis à la suite d'une chute sur un trottoir. La cause fut instruite devant l'Honorable Juge Dumoulin, à Québec. André Desmeules pour la requérante. Gaspard Côté pour l'intimée. La question de droit est exposée dans les motivés de la décision que rend maintenant (12 janvier 1965) M. le JUGE DUMOULIN :
32 2 R C de l'É. COUR DE L'ÉCHIQUIER DU CANADA [19651 1965 Par sa pétition de droit, la requérante, une employée du BRETON ministère provincial des Terres et Forêts, à Québec, repré- V. LA REINE sente que, revenant de son travail, vers 5:00 heures de i l'après-midi, le 9 août 1962, et après la traversée de la Dumouln J. Grande-Allée «pour se rendre à un arrêt d'autobus» situé à l'angle sud-est de cette rue et de la Place Georges V, elle aurait fait une chute sur le trottoir et se serait infligée «une entorse grave à la cheville droite Elle allègue ensuite, dans sa pétition amendée, au para-graphe 3, que: 3. Le trottoir à l'endroit de l'arrêt d'autobus est soit la propriété de l'intimée, soit sous la garde de cette dernière à qui en incombe l'entretien et la réfection en sa qualité de propriétaire du terrain situé vis-à-vis du dit trottoir. Vient ensuite le paragraphe 5 qui explicite le fait causal de responsabilité « à la faute et négligence de l'intimée et plus précisément pour les raisons suivantes: a) Elle a négligé par l'entremise de ses préposés, de tenir le trottoir dont il s'agit en bon état d'entretien et de réparation; b) Elle a gardé ce trottoir dans un état qui le rendait dangereux pour ceux qui y circulaient Comme suite immédiate de l'accident attribuable à cette négligence fautive, la réclamante postule, à titre de dom-mages-intérêts, un montant global de $3,659. Dans son plaidoyer de défense, l'intimée nie les reproches matériels formulés à son égard, et ajoute d'abondant que: 10. Elle n'avait aucune obligation, soit légale, soit contractuelle, de voir à l'entretien ou d'entretenir le trottoir sur lequel la requérante allègue s'être blessée, et les dommages que la requérante prétend avoir alors subis, par suite dudit accident, ne sont pas attribuables à un manquement à un devoir afférant à l'Intimée. D' il s'ensuivrait que: 13. Il n'y a aucun lien de droit entre la requérante et l'Intimée. A l'audition, les parties, se prévalant de la Règle 149 (Règles et Ordonnances Générales de la Cour de l'Échi- quier du Canada), soumirent la requête ci-après reproduite: Par leurs procureurs soussignés, les parties en la présente instance demandent respectueusement à cette honorable Cour de décider les points de droit ci-après énumérés avant qu'il ne soit procédé à l'instruction de la p c r ésente instance. a) l'Intimée dans la présente cause, à savoir Sa Majesté aux droits du Canada, est-elle assujettie aux dispositions de l'article 417 de la Charte de la Cité de Québec qui impose au propriétaire de chaque immeuble ou terrain vis-à-vis un trottoir, l'obligation d'entretenir et de réparer ledit trottoir?
2 Ex. C.R. EXCHEQUER COURT OF CANADA [1965] 33 b) Subsidiairement, au cas d'une réponse affirmative à la question (a), 1965 semblable obligation incombe-t-elle à l'Intimée, à savoir Sa Majesté BRETON aux droits du Canada, même si entre le trottoir dont il est fait état y. dans la pétition de droit de la requérante et la propriété de Sa LA REINE Majesté vis-à-vis dudit trottoir, se trouvait, contiguë à celui-ci, Dumoulin J une mince lisière de terrain appartenant à la corporation de la cité de Québec? Cette seconde soumission purement conjecturale aussi longtemps qu'une preuve objective ne l'eût accréditée, fut retirée par le procureur de l'intimée, Me Gaspard Côté, qui déclara s'en tenir uniquement à la première question. La solution du problème ainsi posé ne me semble pas soulever de grandes difficultés. Et d'abord, que dit la loi pertinente, en l'espèce l'article 3 (1) et (b), chapitre 30, du statut 1-2 Élisabeth II, qui a force astreignante depuis le 15 novembre 1954? Je cite: 3. (1) La Couronne est responsable «in tort» des dommages dont elle serait responsable si elle était un particulier en état de majorité et capacité, a) ... b) à l'égard d'un manquement au devoir afférent à la propriété, l'occupation, la possesion ou le contr8le de biens. Pour les fins de la discussion, il est irréfutablement acquis que l'une des propriétés du Gouvernement du Ca-nada, dans la cité de Québec, le manège militaire et le spacieux quadrilatère qui couvre l'espace entre cet édifice et la ligne de rue, forment un ensemble immobilier «vis-à-vis» le trottoir de la Grande-Allée, côté sud-est, immeubles possédés et occupés par les préposés de l'intimée et soumis au contrôle de ceux-ci dans l'exécution normale de leurs devoirs. Puisque l'application pratique de la Loi sur la responsa-bilité de la Couronne en matière d'actes préjudiciables consiste à imposer à l'État les mêmes obligations qu'à tout «particulier en état de majorité et de capacité», de-mandons-nous ce que serait en pareille occurrence l'obligation incombant au propriétaire québécois. La Charte de la Cité de Québec forme une partie inté-grante de la législation provinciale étant le statut 19 George V, chapitre 95, sanctionné le 4 avril 1929. L'art. 417 de cette loi de la Province de Québec, édicte que: 417. Dans toutes les rues de la cité, les trottoirs doivent être faits, entretenus et réparés par le propriétaire de chaque immeuble ou terrain vis-à-vis duquel ils doivent être. Si tel propriétaire néglige de faire, refaire, entretenir ou réparer, selon le cas, les trottoirs, le chef de police lui 91540-3
34 2 R.0 de l'É. COUR DE L'ÉCHIQUIER DU CANADA [1965] 1965 donnera avis, par écrit, de faire ce qui est prescrit au sujet de ces trot-toirs ... Si, dans les huit jours suivant l'avis, les travaux requis auxdits BRETON V. trottoirs n'ont pas été faits, alors ces travaux seront faits par la corporation, LA REINE qui peut s'en faire rembourser le coût par le propriétaire .. . Dumoulin J. L'intention qui ressort de cette rédaction assez fruste est que, dans le territoire municipal de Québec, l'entretien convenable des trottoirs est une charge de la propriété riveraine. Corollairement, la conclusion non moins nette découlant du texte plus limpide de l'art. 3(1) (b) de la Loi fédérale précitée, est que la Couronne assume en tout point cette responsabilité du propriétaire québécois dans les limi-tes de la Cité. La Cour doit donc répondre affirmativement à la question posée et décider que Sa Majesté la Reine aux droits du Canada est assujettie aux dispositions de l'art. 417 de la Charte de la Cité de Québec qui impose au propriétaire de chaque immeuble ou terrain vis-à-vis un trottoir, l'obligation de l'entretenir et de le réparer. Cette loi, assez récente, sur la responsabilité de la Cou-ronne (S.C. 1952-53, 1-2 Élisabeth II, c. 30) dont le con-texte élimine toute disparité légale entre la Couronne et le sujet, a été savamment étudiée par l'honorable Juge Noël de notre Cour dans la cause Thérèse Deslauriers-Drago et Sa Majesté la Reine', il fut écrit, inter alia, que: 3. L'article 3(1)(b) de la Loi sur la responsabilité de la Couronne prévoit, par contre, une responsabilité directe «à l'égard d'un manquement au devoir afférent à la propriété, l'occupation, la possession, ou le contrôle des biens». Une réclamation non recevable contre la Couronne sous l'article 3(1)(a) pourrait l'être sous l'article 3(1)(b) par suite d'une responsabilité directe du maître représenté par son préposé .. . Quant aux frais, ils seront à la discrétion du juge de l'instance principale. Jugement conforme. 1 [1963] R.C. de l'É. 289 à la page 290.
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